Un an d’Antonio Souaré à la tête de la FEGUIFOOT : le bilan selon Amadou Diouldé Diallo

Le 28 février 2017, un nouveau bureau exécutif prenait les rênes de la fédération guinéenne de football. Dirigé par le riche homme d’affaires et amoureux du ballon rond Mamadou Antonio Souaré, ce nouveau bureau avait suscité beaucoup d’espoirs. Il était censé marquer une rupture avec les mauvaises pratiques qui ont longtemps caractérisé la gestion du football guinéen, et favoriser le rayonnement de cette discipline sportive qui a connu ses heures de gloires sous la Première République. Un an après, qu’est-ce qui a changé ? S’achemine-t-on vers de nouveaux horizons pour le football guinéen ? Fait-on encore du surplace ou même une marche à reculons ?

Guineematin.com a donné la parole à l’historien et journaliste sportif Amadou Diouldé Diallo, qui nous livre son constat.

Des jalons posés et des avancées obtenues

Je crois que, Antonio Souaré était porteur d’une volonté de participation et de contribution à la promotion du football guinéen, football d’ailleurs qu’il a pratiqué. Maintenant sur le plan de la gestion interne au niveau de la fédé, sur le plan par exemple de la qualification des hommes, y a eu des stages des arbitres, y en a eu pour les entraîneurs, y a de la participation même pour des journalistes, tout a été fait dans ce cadre-là. Y a aussi l’administration, pour rendre l’administration fonctionnelle, à un certain moment malheureusement, la machine s’est retrouvée grippée avec cette histoire des audits, on en a fait une préoccupation, ça a créé suffisamment de problèmes au niveau de l’administration elle-même et de la comptabilité de la fédé, ça a fait des grincements des dents et des problèmes par-ci par-là, et ça a failli désorienter la fédération de ses objectifs. Heureusement, à un moment donné elle a pu garder le cap pour se fixer sur ses objectifs prioritaires avec l’appui de la CAF et de la FIFA aujourd’hui, ils ont organisé le séminaire FORWARD ici en Guinée qui est un acquis. Et la Guinée est aujourd’hui une destination importante, le président de la CAF est venu ici avec le 2ème vice-président, madame la secrétaire générale de la FIFA a également rendu visite à la Guinée.

Donc, il y a quand même une destination mais un potentiel aussi que tout le monde cherche à faire valoir parce que la Guinée est quand même une nation de football. Donc sur le plan des contacts à l’international, la fédération a été très présente tant au niveau de la CAF qu’au niveau de la FIFA, je rappelle que le président de la FGF est non seulement membre d’une commission de la FIFA statut des joueurs mais également président des membres de la compétition de la commission interclubs, tandis que le vice-président est lui au niveau je crois de la commission des compétitions des jeunes. Donc, il y a eu une offensive azimutale au niveau des contacts à l’international, ça c’est une évidence, donc y a une meilleure lisibilité, y a une meilleure visibilité de la fédération. Le dernier cas en date, c’est le choix du président de la fédération guinéenne de football pour être le commissaire du match TP Mazembe et Widad Casablanca en super coupe d’Afrique, cela signifie une reconnaissance et une considération pour notre football.

Des problèmes et des défis importants

Ce qui n’a pas marché, c’est qu’on n’a pas de résultats, parce que quoi qu’on dise, le foot c’est d’abord les résultats, et les résultats, c’est les 90 minutes sur le terrain. Donc en un an, on a été éliminé de la course à la coupe du monde, on a participé aux phases finales de la coupe du monde des cadets en Corée du Sud et celle des juniors en Inde, on a éliminé aux premiers tours des deux compétitions, l’équipe nationale locale était tout dernièrement au CHAN (Championnat d’Afrique des Nations), elle a été également éliminée au premier tour. Donc, si on prend dans l’ensemble la participation de la Guinée aux différentes compétitions, il faut dire que les résultats ne sont pas satisfaisants, parce qu’on n’a pas eu de bons résultats. Mais, cela justement ne peut pas être imputé à la seule fédération guinéenne de football, j’ai dit c’est parfois une question de chance. La gestion du football chez nous aujourd’hui pose problème, parce que pour avoir des talents, il faut avoir des infrastructures, nous n’en avons pas. Or, ce n’est pas la fédération qui construit les infrastructures, c’est l’Etat. Ce n’est pas sur l’eau ou sous l’eau que nous allons jouer au football c’est sur un terrain, nous n’en avons pas sur l’ensemble du territoire. Même le stade de Nongo qui nous a été donné, n’est pas opérationnel, ça ce n’est pas de la responsabilité de la fédération.

En plus, on a remercié l’entraîneur Lappé Bangoura, on a lancé une sorte d’appel d’offre pour recruter un entraîneur étranger, mais je dis que nous avons un problème aujourd’hui en Guinée, c’est que nous n’avons plus de grands joueurs. C’est-à-dire qu’aujourd’hui vous n’avez pas dans tous les grands clubs européens, même dans les clubs intermédiaires d’ailleurs de joueurs guinéens. Vous pouvez citer 1 ou 2 ou 3 seulement, c’est-à-dire vous avez Naby Keita, vous avez Ibrahima Traoré qui est blessé, vous avez 2 ou 3, ça ne suffit pas. Alors que, à un moment vous aviez quand même une grosse écurie avec Titi Camara, Morlaye Soumah Colovati, Pablo Demba Thiam, Abdoul Salam Sow, une génération était là. Malheureusement, on est né un peu trop tôt ou un peu trop tard, nous n’avons pas aujourd’hui de grands joueurs. Et, puisque ce n’est pas vous et moi qui jouons, c’est eux, ces joueurs-là nous font défaut. Quel que soit l’entraîneur que nous allons trouver, l’entraîneur ne peut travailler que sur les ressources humaines qu’il va trouver sur place.

La fédération manque aussi d’une administration opérationnelle. Cela, est dû au fait que le secrétaire général qui était en poste depuis 25 ans, donc qui maîtrise les arcanes et tout, s’est retrouvé dans les affaires des audits, donc y a un secrétaire général par intérim qui est là en attendant de trouver un autre ou de le confirmer, entre temps il se sera peut-être davantage outillé. Parce que, une fédération, une confédération c’est l’administration, dans d’autres pays d’ailleurs vous ne voyez même pas le président de la fédération au siège, il vient rarement.

Ce qu’il faut faire pour corriger les problèmes et relever les défis qui se posent au football guinéen

Il va falloir opter pour l’intéressement des binationaux parce que y en a beaucoup en Angleterre, en France, aux Etats-Unis qui jouent au football et qui ne sont pas connus. Il faut donc faire une orientation vers les binationaux et en même temps mettre des centres de formation chez nous de manière à ce que nous formions nos joueurs ici. Si nous n’avons pas de centres de formation pour envoyer les jeunes à l’école, nous allons toujours avoir des problèmes.

C’est vrai qu’il y a maintenant des petits académies, y a un centre de formation à Yorokoguéyah avec Antonio Souaré qui va voir le jour, y a KPC qui promet d’en construire à Khorira, il faudrait donc aller à une sorte d’adéquation entre les produits des centres de formation locaux et les produits des binationaux. Mais les binationaux il ne s’agit pas seulement de s’asseoir, de faire une liste et dire on a appris que tel est là on va voir son père pour qu’il vienne jouer pour la Guinée, non ! Les jeunes qui sont là-bas, ce n’est pas la tradition africaine pour dire mon père a dit ma mère a dit, c’est eux-mêmes qu’il faut aller rencontrer, et puis, organiser une sorte d’opération de retour au pays. Il y a les vacances, prenez le soin de les inviter ils vont venir, ils sont au contact du pays, ils vont sortir et trouver des camarades, ils vont aller en boite de nuit, ils vont prendre goût. La prochaine fois que vous leur ferez appel ils vont venir parce qu’ils sont déjà restés au contact physique des réalités de leur pays. Il faut se battre auprès de l’Etat pour avoir les infrastructures nécessaires notamment les terrains.

Propos recueillis par Algassimou Yali Bah pour Guineematin.com

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