Siguiri : l’impuissance des autorités face à l’exploitation des enfants

Pendant que les regards du monde entier sont tournés vers la Libye où on parle de la vente des migrants ouest-africains, une autre forme d’esclavage, cette fois des mineurs, se passe en Guinée, précisément dans la préfecture aurifère de Siguiri. Dans cette partie de la Guinée, l’exploitation des enfants est une pratique considérée normale normale (ou presque) depuis plusieurs années. Cela, malgré les différentes conventions ratifiées par notre pays, notamment portant sur le droit des enfants et la présence des autorités à tous les niveaux, a appris Guineematin.com à travers son correspondant local.

L’esclavage des enfants est devenu une source de revenue pour plusieurs femmes qui n’hésitent pas à aller utiliser ses parents proches. Ces vendeuses d’illusions se rendent dans les villages et villes de la région pour récupérer les enfants dont l’âge varie entre 7 et 10 ans qu’elles confient à des exploitants soit à Siguiri centre où bien dans les zones minières. En retour, elles encaissent l’argent et font des réalisations personnelles sans aucun respect de la dignité humaine.

Interrogée par Guineematin.com, Mariame Kéïta, l’une des victimes, âgée de 9 ans, explique sa mésaventure. « C’est ma tante qui m’a envoyée de Dinguiraye. Elle avait promis à ma mère qu’elle allait me mettre à l’école. Dès qu’on est arrivé à Siguiri, elle m’a remise à une dame qui me donne de l’eau glacée à vendre tous les jours au marché. La dame me dit souvent qu’elle me paye ; mais, je ne sais pas combien. Le contrat est établi entre elle et ma tante », a-t-elle expliqué, en confirmant que les enfants de sa tente sont, quant à eux, à l’école.

Pour sa part, Aminata Bérété, originaire de Tokounou, une sous-préfecture de Siguiri dont l’âge varie entre 9 à 10 ans, elle dit travailler pour une autre dame depuis quelques mois. Elle a été envoyée avec beaucoup d’autres enfants (des filles et des garçons) de son âge par une dame qui se présente souvent dans leur village comme responsable d’une structure humanitaire aux services des enfants.

« J’étais une élève dans mon village. Tantie est venue nous prendre au village pour dire qu’elle veut aider nos parents à nous scolariser. Mais, quand nous sommes arrivés ici, elle nous a distribués entre d’autres personnes. Depuis, on me fait travailler comme domestique en ignorant mon salaire », a-t-elle expliqué.

Âgé de 11 ans, Fodé Kéïta est, quant à lui, originaire de Fodékariah, dans la préfecture de Kankan. « Mes parents sont à Fodékaria, sur la route de Kankan. Un jour, ma tante a parlé avec mon père et ma mère qui m’ont demandé de venir avec elle à Siguiri. Non seulement je vais aller à l’école ; mais, aussi elle allait envoyer un sac de riz chaque fin de mois à mes parents. Depuis que j’ai quitté mon village, je n’ai plus les nouvelles de mes parents. Je suis dans les mains d’une autre femme qui me traite comme un esclave », a-t-il expliqué.

Sous couvert d’anonymat, un travailleur de la Société Aurifère de Siguiri (SAG) a témoigné sur la pratique malsaine de la femme dont parle Fodé Kéïta. « Je connais cette dame. Elle vit de cette pratique depuis plusieurs années. Elle a construit des maisons sur le dos de ces enfants et de leurs parents », a-t-il dit.

Malheureusement, les autorités chargées de la protection des enfants ont l’air de ne rien pouvoir faire pour eux, sauf la sensibilisation dans les médias.

Interrogé dans la matinée de ce mercredi, 6 décembre 2017, monsieur Ibrahima 2 Camara, le chef de la section enfance de la préfecture de Siguiri a dit être conscient de cette pratique. Mais, il ne compte que sur les médias pour conscientiser les populations. « Je suis conscient de l’existence de cette pratique. C’est pour cela que je suis passé dans les radios de la place pour sensibiliser les citoyens ».

Malheureusement, monsieur Camara Ibrahima Sory 2 ne cache pas son impuissance face à l’ampleur de ce phénomène et surtout à ce qu’une initiative de sa part pourrait susciter dans la société… « Siguiri est une zone de tension ! J’ai peur de poursuivre les gens. Quand je déclenche une poursuite, les coupables peuvent faire révolter les gens contre moi… », craint-il.

A suivre !

De Siguiri, Bérété Lancei Condé pour Guineematin.com

 

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