Torture en Guinée : Diogo Sow charge la BAC n°8 de Kakimbo devant la justice

Un jeune homme de 28 ans, accusé de vol à main armée a comparu ce lundi 22 janvier 2018 devant le Tribunal criminel de Dixinn. Ibrahima Diogo Sow est poursuivi par Ibrahima Diaouné, un citoyen résidant à Kakimbo dans la commune de Ratoma. Mais devant le tribunal, les débats ont porté surtout, sur les actes de tortures que l’accusé a subis à la BAC numéro 8 de Kakimbo qui a procédé à son arrestation, a constaté Guineematin.com à travers un de ses reporters.

C’est en mars 2016 que les Brigades Anti Criminalité numéros 4 et 8, ont procédé à l’arrestation d’Ibrahima Diogo Sow suite à une attaque à main armée perpétrée au domicile d’Ibrahima Diaouné à Kakimbo dans la commune de Ratoma. Peu après l’attaque, les services de sécurité auraient utilisé un système de géolocalisation installé sur un des téléphones enlevés au domicile de la victime, qui les a conduits jusqu’à chez l’accusé Ibrahima Diogo Sow à Kéitayah dans la préfecture de Dubréka. Ils se sont rendus chez lui dans la même nuit, ils ont défoncé la porte de sa chambre et ont mis main sur Ibrahima Diogo Sow et sa copine qui étaient dans la maison. Les deux ont été embarqués et conduits à la Brigade Anti Criminalité numéro 8 de Kakimbo. Là, l’accusé a été soumis à des actes de tortures pour l’amener à avouer qu’il a effectivement pris part à l’attaque du domicile d’Ibrahima Diaouné. Mais une partie de la scène de torture a été filmée en cachette par un inconnu, qui a posté la vidéo sur Internet. Une vidéo qui, on se rappelle, avait provoqué une vive indignation au sein de l’opinion publique et surtout au sein des organisations de défense des droits de l’Homme.

Suite donc à ces actes de tortures, Ibrahima Diogo Barry a été transféré à la Brigade de Recherche de Matam qui l’a auditionné et l’a transféré à la maison centrale de Conakry le 16 mars 2016. Depuis cette date, l’accusé est en détention. C’est ce lundi 22 janvier 2018 qu’il a comparu devant le tribunal criminel de Dixinn pour s’expliquer sur ce qui lui est reproché.

A la barre, l’accusé a nié les faits pour lesquels il est poursuivi, assurant qu’il est un simple marchand et qu’il n’a jamais attaqué qui que ce soit. Selon Ibrahima Diogo Sow, tout ce qu’il a dit dans cette affaire, sont des aveux obtenus sur la base de la torture. « Ce jour-là c’était un vendredi. Après la prière de vendredi, je me suis rendu au champ de mon père à Dubréka pour travailler. Je suis rentré le soir à Kéitayah, où ma copine m’attendait dans un Kiosque. Elle m’a dit qu’elle a faim, on est allé à la T10 pour acheter à manger. On est rentré ensuite à la maison, je me suis lavé, on a mangé et on s’est couché. Je m’étais endormi lorsqu’elle m’a réveillé pour me dire que des bandits sont en train de défoncer ma porte. A peine je me levais, ils avaient déjà défoncé la porte et sont brusquement rentrés dans la chambre. C’est ainsi que je me suis rendu compte que ce sont des agents de sécurité. Je leur ai demandé qu’est-ce qu’il y a ? Ils m’ont répondu par un coup de crosse sur la tête. Quand j’ai parlé pour une deuxième fois, ils m’ont donné un autre coup sur la bouche, j’ai perdu deux dents sur le coup. Ils ont giflé aussi ma copine, ils m’ont attaché et nous ont embarqués tous les deux avec tous les biens que j’avais à la maison », a relaté l’accusé. Ibrahima Diogo Sow poursuit en disant que ces effets ont été débarqués à la BAC numéro 4 et que lui et sa copine ont été conduits à la BAC numéro 8. Il dit avoir subi toutes sortes de tortures sur les lieux pendant plusieurs jours, dont une partie seulement a été filmée et postée sur Youtube. Sa copine qui était selon lui en état de famille, aurait été également torturée par les agents jusqu’à ce qu’elle a fait un avortement.

Cette version de l’accusé a été appuyée par ses avocats, qui ont demandé sans succès au tribunal, de visionner la vidéo de la scène de torture filmée à la BAC numéro 8 de Kakimbo pour se rendre compte qu’il a fait des aveux sous l’effet de la torture. La défense a demandé aussi la présentation des objets volés (Un IPhone 6S, deux téléphones de marque Samsung et une bague incrustée de Saphir) qui auraient été retrouvés au domicile d’Ibrahima Diogo Sow, de même que l’arme PMAK qui aurait servi l’attaque. Des éléments mentionnés dans l’ordonnance de renvoi, mais qui n’ont pas été présentés devant le tribunal. Les avocats de la défense ont demandé par ailleurs, la comparution du plaignant qui, depuis le début de la procédure, n’a pas été confronté au prévenu.

Une demande appuyée par le procureur, qui a estimé aussi que la comparution du plaignant est nécessaire pour la manifestation de la vérité. « Il faut que la victime comparaisse pour nous expliquer les circonstances dans lesquelles elle a été attaquée, qu’elle nous présente le téléphone localisé et qu’elle nous explique comment cette géolocalisation a été faite. Si la victime ne comparaît pas monsieur le président, le tribunal va tirer les conséquences », a dit le procureur Alsény Bah.

Finalement, le tribunal a décidé donc de renvoyer l’audience à demain mardi 23 janvier 2018 en faisant une jonction de procédures entre cette affaire et un autre dossier de vol à main armé, dont certains accusés pourraient selon la partie civile, être liés à cette affaire et en ordonnant la comparution des plaignants.

Alpha Fafaya Diallo pour Guineematin.com

Tél. : 628124362

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