Bambéto : le couloir de la mort, rebaptisé couloir des martyrs

Mr. Ibrahima Dubréka
Mr. Ibrahima Dubréka

Le souvenir d’une jeunesse martyrisée, abandonnée à elle-même, d’une jeunesse… sacrifiée ! Guineematin.com vous propose ce témoignage pathétique, poignant et ce cri de cœur et d’appel à la responsabilité du doyen Ibrahima Dubréka

Il est important d’en parler. C’est une bande de terre de 85 mètres de long sur 4 mètres de large devant, c’est une impasse car il  existe une mosaïque  de concessions qui  bloque le passage. Elle longe la clôture de la grande gare routière de Bambéto, côté Ouest. Le nom, ‘’Couloir de la mort ‘’ a été donné à cet espace par les jeunes manifestants lors des nombreuses marches dites pacifiques de l’opposition. Ils s’en servent comme échappatoire quand ils sont attaqués par les agents des forces de l’ordre à Bambéto. Ils escaladent les clôtures  des concessions voisines à la gare routière pour trouver refuge ailleurs. Parfois, ils sont pris entre deux feux des agents de la sécurité. Par conséquent, ils font les frais de l’attaque policière. A cet endroit précis, les marches de l’opposition ont enregistré assez de victimes qui, par bastonnade, qui, par gaz lacrymogène ou par fusillade à balles réelles.

Certains jeunes manifestants pris lors des marches pacifiques, sont embarqués dans des camions de la police par leurs agresseurs pour des destinations diverses, parfois inconnues. Après chaque marche pacifique de l’opposition, Bambéto et les périphéries sont envahis   par les agents de ‘’l’insécurité ‘’ haineux et barbares. Les paisibles citoyens sont molestés ; les femmes et leurs filles sont violées ; les marmites des dames sont renversées ; parfois emportées avec leurs contenus ; des personnes innocentes sont grièvement blessées et parfois atteintes de balles réelles ; les injures éhontées sont prononcées par les agents à l’encontre des membres d’une ethnie, particulièrement prise pour cible… Quelle honte pour une nation qui se veut démocratique et paisible !

– Je me souviens du petit cireur lors de l’état de siège de janvier-février 2007 qui, par malchance, aux environs de 19h 00, a rencontré une Jeep de bérets rouges au niveau de la gare routière de Bambéto. Il reçut une rafale de  balles dans les jambes qui furent  fracturées à plusieurs endroits. Il saignait abondement et la nuit tombait. Avec risque et péril, des jeunes volontaires, nuitamment, le déposèrent à l’arrêt de bus, sur l’autoroute Leprince en partance pour Hamdallaye dans l’espoir qu’il sera découvert et secouru par la croix rouge. Malheureusement, il rendra l’âme dans la nuit au même endroit faute de moyen de transport pour son transfert à l’hôpital à cause de l’état de siège en vigueur.

– Je me souviens en juin 2008, après une manifestation à Conakry, de ce cadavre d’un jeune manifestant atteint par balle et  porté par la foule pour le déposer à la morgue de la grande mosquée de Bambéto. Après une altercation violente entre policiers et manifestants, le corps a été abandonné à l’entrée du couloir de la mort et les porteurs ont pris la poudre d’escampette pour sauver leurs peaux.

– Je me souviens, lors d’une opération de ratissage dans la zone de Bambéto, après une marche pacifique en février 2013 de ce jeune écolier, malade et alité, qui a été sorti manu-militari de sa chambre par ses bourreaux. Il fut malmené sur place et embarqué avec des hurlements de douleur pour une destination inconnue.

– Je me souviens de cette jeune fille prise par  des policiers dans le couloir lors d’un contrôle de routine à 20 heures. Elle cherchait tout simplement à rentrer à la maison quant elle fut interpellée par les policiers. Malheureusement, elle fût violée par ses agresseurs en tirant des coups de feu en l’air pour empêcher les voisins de secourir la victime. Je me souviens, je me souviens…

Aujourd’hui, le même tronçon rebaptisé couloir des martyrs, est occupé par des jeunes abandonnés à eux même, dépourvus  d’une formation de base solide. Ils utilisent tous (vols, viols, drogue, raquette, jeux de hasard, etc.) les moyens illégaux  à leur disposition  pour passer le temps et vivre leur vie. Cette situation de la jeunesse devrait interpeller les parents, les gouvernants et la société civile pour  qu’une solution durable soit trouvée à ce problème. L’Etat doit être au service des citoyens d’un pays pour que la nation se renforce davantage et avance réellement car l’unité nationale est la seule garante de la paix.

 Ibrahima Dubréka

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