Échec au bac 2018 : « l’Etat a sacrifié l’avenir des enfants », dit Nestor Kagbadouno

Les réactions continuent suite à la publication des résultats du baccalauréat session 2018. Des résultats jugés catastrophiques par l’opinion nationale. Dans un entretien qu’il a accordé à un reporter de Guineematin.com, ce jeudi 19 juillet 2018, Nestor Kagbadouno, directeur général de l’Université Ahmadou Dieng de Sangoya a tiré à boulets rouges sur l’Etat qu’il qualifie d’être le seul responsable de ce qui est arrivé.

La réaction a été quasiment unanime au sein de l’opinion après la publication des résultats du baccalauréat de cette année. Des résultats jugés catastrophiques, avec un taux de réussite de seulement 26%. Un échec que le directeur général de l’Université Ahmadou Dieng de Sangoya met sur le dos de l’Etat. « C’est vrai que les gens parlent d’une responsabilité partagée ; mais nous, nous disons que l’Etat est le seul responsable parce qu’il n’y a pas d’objectivité, il n’y a aucun mécanisme mis en place dans la sélection des enseignants dans notre pays », a-t-il dit.

A la question de savoir comment en est-on arrivé à un tel résultat, Nestor Kagbadouno a estimé que c’est à travers l’amateurisme qui a caractérisé le recrutement des enseignants au cours des dernières années : « Tout dernièrement, au lieu de recruter des gens qui sont compétents, ils ont pris des gens qui n’ont aucune expérience, aucune qualification pour préparer les candidats. Ils sont été pris juste parce qu’ils sont des parents biologiques ou politiques », soutient-il, ajoutant que c’est l’avenir des élèves guinéens que l’Etat est en train de sacrifier.

« Il y a eu des centres qui avaient été prévus, mais qui ont été supprimés. Au début, on disait qu’il n’y a pas d’argent et malheureusement, on est en train de sacrifier l’avenir des enfants en donnant une mauvaise image à l’enseignement guinéen. Et, le ministre qui est venu à la veille des examens n’avait aucune maitrise de ce qui se passait ».

Mais ce ne sont pas les seules raisons de cet échec, selon ce directeur d’université. Pour lui, le faible taux de réussite a été fait à dessein, parce que l’Etat ne veut pas orienter des étudiants dans les universités privées : « C’est clair, ils ne veulent pas orienter dans les universités privées. Vous avez entendu toutes les rumeurs qui parlaient de fraude, d’utilisation de téléphones dans les centres d’examen…

Il fallait que l’Etat trouve un moyen pour justifier cet état de fait, quitte à sacrifier l’avenir des enfants. Sinon, ils ont même annoncé que les résultats allaient sortir le dimanche alors que ce même jour, il y avait des épreuves non encore corrigées. Comment voulez-vous qu’on donne des résultats fiables avec cet examen ? C’est pourquoi, il est important que l’Etat revoit le cadre organisationnel de nos examens », a dit Nestor Kagbadouno, qui préconise la mise en place d’une structure comme l’office national du baccalauréat pour qualifier cet examen national.

Parlant justement de la question des orientations des admis, le DG de l’université Ahmadou Dieng de Sangoya souhaite une collaboration entre l’Etat et les universités privées méritantes. « L’Etat ne pourra pas fermer toutes les universités puisque parmi elles, certaines sont plus avancées dans les programmes que les universités publiques. Au lieu de dire qu’on n’oriente pas dans les universités privées, il est mieux de mener des inspections sérieuses et objectives pour voir celles qui sont capables d’accueillir les étudiants », souhaite Nestor Kagbadouno.

Pour terminer, le DG de l’Université Ahmadou Dieng invite aussi l’Etat à faire du système éducatif une priorité, en restant très sélectif dans l’orientation des jeunes dans les Ecoles Normales d’Instituteurs (ENI) : « Les enfants qui viennent dans les universités n’ont pas le niveau ; mais, ce n’est pas parce qu’ils sont nés sans niveau. C’est surtout parce qu’ils ont été mal formés à la base.

Il faut donc une certaine rigueur dans le choix des personnes devant enseigner nos jeunes, surtout ceux qui veulent aller dans les ENI. Il faut également renforcer la capacité des sortants de l’ISSEG (Institut Supérieur des Sciences de l’Education de Guinée ndlr) qui produit des gens prêts à enseigner. Malheureusement, ceux-ci sont mis à la touche chaque année au profit d’autres qui n’ont aucune compétence, aucune pédagogie requise », a-t-il dit.

Alpha Assia Baldé pour Guineematin.com

Tél : 622 68 00 41

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