Marche contre la gouvernance : Alpha Condé doit décrypter le message !

Alpha Condé, président de la République de Guinée
Alpha Condé, président de la République de Guinée

Dans la journée d’hier, mardi 16 août 2016, l’opposition guinéenne a organisé sa première marche contre le régime Alpha Condé depuis sa réélection (par un coup KO), le 11 octobre 2015. De Bambéto, l’impressionnante foule s’est ébranlée vers Dixinn. Certains reporters ont même parlé d’une marrée humaine à l’Esplanade du stade du 28 septembre où les opposants ont prononcé des discours très durs contre le régime, sous les hourras et les applaudissements du public.

Au retour, il y a malheureusement eu des bavures. La police- qui a estimé devoir dégager la route après les heures conventionnelles de la manifestation- a usé des armes à feu. Des personnes touchées par balles réelles ont été transportées à l’hôpital avec au moins un mort. Le jeune Thierno Hamidou Diallo, âgé d’une vingtaine d’années, a été tué, alors qu’il regardait le spectacle entre les jeunes manifestants et les policiers du haut d’un immeuble à Bambéto. Le frère du défunt, rencontré par un reporter de Guineematin.com, a dit qu’il était au troisième étage. On en reviendra…

Mais, au-delà de ces bavures, il est important de noter que ce n’étaient pas que des dizaines des guinéens, même si on n’a pas les chiffres exacts, ils étaient plusieurs dizaines de milliers de nos compatriotes à être sortis pour contester la façon dont notre pays est gouverné actuellement. Et, leur message mérite d’être écouté, compris et pris en compte par ceux qui ont la charge de diriger la Guinée aujourd’hui. C’est aussi cela la démocratie et surtout la grandeur humaine d’un dirigeant.

Evidemment, aussi grande qu’a été cette mobilisation, contrairement à ce que les opposants disent, ce n’est pas « tout le peuple de Guinée » qui s’est levé hier contre le président Alpha Condé et sa gouvernance. On peut passer des heures, des jours, des semaines, des mois et des années, à débattre de la popularité et de l’impopularité des uns et des autres. En son temps, le capitaine Moussa Dadis Camara avait mobilisé au palais du peuple devant « papa Wade » pour montrer que le peuple était avec lui. Et, peu de temps après, on a vécu le 28 septembre 2009… Voilà ce que le chef de l’Etat actuel devrait éviter ! Un chef d’Etat ne doit pas répondre à une manifestation de protestation par une manifestation de soutien ! Il doit montrer aux contestataires qu’il a compris le message et qu’ils n’ont plus besoin de reprendre la rue. Ce message coûte moins, comporte moins de risques et permet de fermer rapidement la parenthèse pour se concentrer à l’essentiel des actes à poser pour ce mandat.

Une situation de défiance et de bras de fer, le professeur Alpha Condé n’en a pas besoin, ni la République de Guinée d’ailleurs. Car, comme on le sait, l’issue d’un conflit est toujours incertaine. Et, entre un dirigeant et un opposant, c’est celui qui a le pouvoir qui risque de le perdre…

Bref, c’est le moment de changer de méthode, de discours et d’actes. Les chercheurs de postes et de marchés ne sont souvent pas les meilleurs conseillers ! Ce serait une grave erreur de persister dans la même position avec une telle mobilisation contre sa gouvernance. On peut agir de bonne foi et pour le meilleur de tous. Mais, si un tel nombre de citoyens pour lesquels on agit et avec lesquels on est sensé travailler ne vous entendent pas et ne vous comprennent pas, il vous appartient de changer et de vous exprimer autrement. L’expérience a prouvé que bien de dirigeants ont été surpris de la manière dont ils ont quitté le pouvoir. La Guinée n’a pas besoin de troubles et de changement brusque. Il est donc impératif d’écouter les mécontents au lieu de chercher des mots à la place des actes.

Nouhou Baldé

 

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