Chronogramme des élections : l’aspect légal, au-delà de la passion !

CENI, Code électoralL’opposition guinéenne a organisé ce jeudi 2 avril, une journée « Conakry, ville morte » pour protester contre le chronogramme des élections qui prévoit la présidentielle avant les locales, a constaté les reporters de Guineematin.com déployés dans les différentes communes de la capitale guinéenne.

Cette forme de protestation est la première dans une série d’actions envisagées par les leaders politiques de l’opposition guinéenne qui exigent l’organisation des élections communales avant la présidentielle. Cette classe politique dite Républicaine estime qu’en organisant la présidentielle, alors que des conseils communaux périmés et des délégations spéciales illégalement installées sont toujours en fonction à la tête des collectivités décentralisées du pays, c’est donner un quitus de fraude électorale en faveur du pouvoir en place.

Avec cette nième crise politique en Guinée, on est bien en droit de nous demander si réellement les présidents des conseils districts et de quartiers, les maires des communes rurales et urbaines, les présidents des délégations spéciales ont-ils la possibilité d’influencer ou de changer le suffrage obtenu par un candidat à une élection présidentielle.

Pas évident. Car, l’article 82 du code électoral guinéen stipule que les résultats des bureaux de vote sont affichés et remis aux représentants des candidats. Ces résultats ne peuvent en aucun cas être modifiés en vertu du dernier alinéa de l’article 85 du code électoral guinéen.

Sur un autre aspect, il est bon de savoir que selon l’alinéa 3 de l’article 19 du code électoral de notre pays, les élections sont faites sur la base de la liste révisée au cours du dernier trimestre de l’année qui précède celle du scrutin. Hors, depuis les législatives du 28 septembre 2013, il n’y a pas eu de révision sauf la correction des anomalies du fichier. Une opération qui n’a ajouté aucun électeur sur les 5.206.118 inscrits. Aller donc aux communales dans ces conditions priverait de nombreux guinéens omis lors de la dernière révision du fichier, ou qui ont eu 18 ans et plus après les législatives de 2013.

Par ailleurs, nous ne voyons pratiquement pas comment ramener les élections communales avant la présidentielle sans augmenter le mandat du Président Alpha CONDE quand on sait que l’article 28 de la Constitution stipule que le scrutin pour l’élection du Président de la République a lieu 90 jours au plus et 60 jours au moins avant la date de l’expiration du mandat du Président en fonction. Dans le cas guinéen, 90 jours avant la date d’expiration du mandat du Pr Alpha CONDE, c’est le 21 septembre 2015. Il est pratiquement impossible d’organiser la révision du fichier électoral et tenir les communales avant cette date.

Si nous déroulons dans le temps toutes les activités qui rentrent en ligne de compte de la préparation de la présidentielle,  à partir de ce vendredi 3 avril, lendemain de la journée ville morte de l’opposition, nous comprendrons aisément que nous sommes déjà en retard, car seulement 5 mois  et 17 jours nous séparent du 21 septembre 2015.

Pour vous en convaincre, cet exercice de calculs de temps est illustratif :

  1. Mise en place et formation des démembrements dans les 38 circonscriptions de l’intérieur et dans les 18 de l’extérieurs, nous prendra 45 jours.
  2. La désignation et la formation des membres des Carles, 15 jours
  3. La préparation de la Révision des listes électorales (recrutement, formation, mobilisation des Opérateurs de saisie et du matériel), 30 jours
  4. Révision proprement dite et la remontée des données, 60 jours
  5. Traitement des données et impression des cartes, 30 jours
  6. Conditionnement et distribution du matériel dans les préfectures, 15 jours

Si nous faisons la somme de tous ces délais, nous aurons 195 jours. Ce qui fait 6 mois 15 jours. De là, il apparait clairement qu’il faut encore trouver du temps pour :

ü  La répartition du matériel dans les bureaux de vote

ü  L’installation des bureaux de vote

ü  La désignation et la formation des Commissions Administratives de Centralisation des Votes

Alors dites nous où est le temps pour les élections locales ?

Par contre, on pourrait établir un chronogramme qui prévoit : la révision, l’élection présidentielle et les communales étant entendu que le respect du délai de l’élection présidentielle est un impératif catégorique que nous impose la loi si l’on ne veut pas placer le Président et son gouvernement dans une illégalité constitutionnelle lourde de conséquences.

  1. Les dernières élections communales se sont tenues en 2005. Selon l’article 113 du code électoral, le mandat de cinq (5) ans des Conseils communaux est fini en 2010, bien avant l’élection du nouveau président élu le 7 novembre 2010.

On se souvient que les accords politiques du 3 Juillet 2013 avaient demandé ces élections communales courant 2014 et le gouvernement avait mobilisé la somme de 142 495 478 000. Sur ce budget 36,25% ont été utilisé pour la préparation des opérations électorales. Mais le virus Ebola a empêché l’organisation de ces élections.

La CENI peut donc valablement organiser ces communales après le délai contraignant du 21 octobre 2015 (article 28 de la Constitution).

En plus des communales, il y a aussi les élections des districts et quartiers et l’élection des conseils régionaux pour compléter les élections locales.

Ces éléments nous font dire que l’opposition guinéenne donne encore un coup d’épée dans l’eau. Car, elle vient d’ouvrir encore un faux débat.

Idrissa Sampiring DIALLO pour Guineematin.com

Téléphone : (00224) 660 11 35 15 & 622 269 551

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