MON CHER MOUSSA MOISE, VOUS AVEZ L’OPINION ET LE DROIT ET AVEC VOUS !

Le 25 décembre 2017 s’ouvrira, à Conakry, votre procès. Un procès historique, à tout point de vue. Ici, l’adjectif  ‘’historique’’, n’est pas galvaudé. Vous ferez donc face, M. Moussa Moise, à un juge. Cependant, ne présumons pas de ce qu’il va advenir de cette audience. Mieux, l’élégance républicaine voudrait que les citoyens  que nous sommes,  fassions confiance à notre justice. Tout en m’abstenant  de faire un commentaire sur le fond du dossier, je voudrais, après avoir revisité mes cours de Droit des médias, vous rappeler qu’au-delà du soutien de l’opinion publique dont vous bénéficiez,  vous avez aussi, avec vous, le droit dans une large mesure.

Commençons par la la Constitution guinéenne qui proclame son adhésion à la Déclaration Universelle des droits de l’Homme (DUDH). De cet instrument juridique universel, nous nous attarderons évidemment sur son article 19  qui dispose que : « Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression. Ce qui implique le droit de ne pas être inquiété  pour ses opinions et celui de chercher, recevoir  et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen que ce soit ».

La liberté d’informer du journaliste, faut-il le rappeler, est la première exigence déontologique et éthique du journalisme. D’ailleurs, les premiers mots de la déclaration des devoirs et des droits  du journaliste de Munich insistent  bien sur cette exigence : « le droit à l’information, à la libre expression et à la critique est une des libertés fondamentales de tout être humain ».

Plus loin, la charte de Munich vous dit ceci : « Les journalistes revendiquent le libre accès à toutes les sources d’information et le droit d’enquêter librement sur tous les faits qui conditionnent la vie publique. Le secret  des affaires publiques ou privées ne peut, en ce cas, être opposé au journaliste que par exception en vertu des motifs clairement exprimés ».

En vertu de nos propres textes,  l’Etat a tant l’obligation positive  de garantir la liberté de la presse en créant les conditions  de son effectivité que l’obligation négative de ne pas s’ingérer dans la liberté de la presse. A ce propos, la charte des journalistes du Sénégal énonce en son premier point : « Le droit du public à une information juste et équilibrée prime sur toute autre considération ».

Les journalistes répondent de leur liberté d’informer  au public. Ce n’est donc pas pour rien que Jean Charron, insistant sur la prétention  de servir exclusivement le public sur laquelle repose le journalisme, faisait remarquer que : « Les journalistes et les élus puisent leur légitimité à la même source, le public ».

Loin d’être exhaustif dans l’énumération de l’arsenal juridique garantissant au journaliste le droit d’exercer librement sa profession, j’ai voulu convoquer ces quelques éléments  du droit pour vous apporter mon soutien. Dans la mesure où je vous ai connu  professionnel, toujours serein et mesuré dans tout ce que vous faites.  Le plus important et, je le crois profondément,  c’est que, dans cette affaire, vous devez être libre avec conscience.

Mamadou Yaya BALDE
Journaliste guinéen au quotidien privé sénégalais EnQuête
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