Un compatriote détenu à Luanda : « Nous sommes abandonnés par les autorités de notre pays »

Angola, détenus, TrintaHier, dimanche 01 février 2015, Guineematin.com a été contacté par un compatriote se trouvant actuellement dans le centre de détention d’étrangers de Trinta, en Angola depuis le 19 décembre 2014. Rappelé à 23 heures, Boubacar, originaire de Kindia nous explique leurs conditions de vie en prison, comment ils ont été arrêtés, leur abandon par l’ambassade de Guinée en Angola, mais aussi la mort en détention d’une femme et de son enfant. Lisez !

Guineematin.com : Présentez-vous à nos lecteurs ?

Je suis Boubacar. Je suis originaire de Kindia.

Expliquez nous ce qui se passe ?

Nous sommes des milliers de Guinéens qui avons été interpellés le 19 décembre 29014, dans l’opération du gouvernement Angolais. Je ne peux pas vous donnez le chiffre exact des Guinéens dans ce cas, puisque beaucoup de nos compatriotes se disent ivoiriens, sénégalais, maliens, léonais, libériens, somaliens, soudanais… Ce que je sais, nous sommes très nombreux et majoritaires dans le camp. Les 90% qui sont détenus ici ont des documents donnés par le gouvernement angolais. Depuis le 19 décembre 2014, nous vivons dans des conditions inacceptables. Nous mangeons une seule fois par jour. Il n’y a même pas d’eau dans le camp, rien. Nous sommes à l’abandon total des autorités guinéennes en Angola, y compris de l’ambassadeur qui est là. Chaque jour on l’appelle, mais il dit qu’il ne peut rien faire pour nous.

Aujourd’hui (dimanche 01 février 2015 : ndlr), il y a 30 Guinéens qui sont en route pour la Guinée. Cette semaine, il y aura beaucoup qui vont rentrer. Les autorités d’ici ont dit que l’opération va continuer parce que c’est nous qui avons rendu leur vie difficile dans ce pays. Et qu’à partir de l’instant ils vont ramener tous les étrangers dans leurs pays.

A l’intérieur du camp, est-ce qu’il y a des femmes et des enfants ?

Bien sûr, il y a des femmes emprisonnées ici. Il y a des femmes guinéennes qui sont avec des enfants. Les autres n’ont pas accepté de venir avec la délégation guinéenne.

Quel est le nom du camp dans le quel vous êtes détenus ?

Le camp s’appelle le Montanamo de Trininta.

Est-ce qu’il n’y a que seulement des Guinéens à l’intérieur du camp, ou bien il y en certains qui ont d’autres nationalités ?

Il y a des guinéens, des maliens, des burkinabés, des libanais, des chinois avec des portugais dans le camp où je suis.

Comment s’organise le rapatriement ?

Pour le rapatriement, c’est nous même qui payons, ce n’est pas le gouvernement qui prend en charge. Ceux qui ont des moyens se font payer leur billet et ceux qui n’en ont pas restent détenus jusqu’au moment où ils ont quelqu’un qui accepterait de payer leur billet…

Est-ce qu’on permet aux détenus d’aller au moins récupérer leurs objets avant le départ pour les pays d’origines ?

Non ! Non ! La façon dont on t’a pris, c’est comme ça tu vas rentrer.

Vous vous êtes en Angola depuis quand ?

Je suis là depuis deux ans et quelques mois.

Qu’est-ce que vous avez à ajouter sur ce que vous venez d’expliquer?

Ce que je peux ajouter, c’est que nous sommes à l’abandon total de la part de notre gouvernement, à travers notre ambassadeur qui est là en Angola. Actuellement, il y a la compagnie Royal Air Maroc le billet à 900 dollars (Luanda-Conakry), mais au sein de l’ambassade, on nous fait payer beaucoup plus ! Le billet est négocié entre l’ambassade de Guinée et ceux qui payent leur retour jusqu’à 1 900 dollars. Moi, j’ai eu l’ambassadeur en ligne, il m’a juste dit qu’il ne peut rien faire pour nous sauf le rapatriement.

Parmi vous les guinéens vivants dans ce camp, est-ce qu’il y toutes les ethnies qui sont représentés ?

Nous sommes tous mélangés dans ce camp. Mais les peulhs et les Malinkés sont les plus nombreux parmi nous. Il y a eu même  des morts à l’intérieur de ce camp. Une femme a accouché, elle est décédée avec son bébé. Un autre jeune Guinéen qui a voulu résister contre les forces de l’ordre parce qu’il a ses documents, on l’a battu à mort.

Parmi ceux sont là, il y a certains qui ont la nationalité angolaise, mais les autorités ont déchiré leurs papiers pour dire que tout le monde va rentrer.

Entretien réalisé au téléphone par Mamadou Alpha Baldé

Tél : (00224) 622 68 00 41

 

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