Comme annoncé dans notre communiqué de lancement, www.guineematin.com est votre organe qui vous informe, mais aussi qui vous donne la possibilité de vous exprimer, de prendre position pour ou contre ceci ou cela, celui-ci ou celui-là… C’est dans ce cadre que Guineematin.com vous proposons, ci-dessous, un article d’opinion soumis par monsieur Ibrahima Dubréka DIALLO. Tout le long de ce papier, vous constaterez que monsieur Diallo nous conte l’histoire récente de notre pays, évidemment, avec une dose de sa prise de position… Excellente lecture !
A l’orée des années cinquante, la Guinée, par son vote référendaire historique du 28 septembre 1958 contre le projet chimérique du général De Gaule pour la communauté des colonies d’Outre-mer avec la France, le NON (1 136 324 votants) l’emporta sur le OUI (56 981). Après cette victoire écrasante du peuple, la Guinée accéda à l’indépendance le 2 octobre 1958. Par la même occasion, la Guinée devient le quatre vingt deuxième Etat membre des nations unis (ONU), le 12 décembre 1958.
En claire, l’indépendance de la Guinée, est une victoire acquise de haute lutte accomplie par le peuple de 1958. Il est inadmissible et même injuste d’attribuer cette victoire à un seul individu même s’il s’appelait Sékou TOURE. Le vote du 28 septembre 1958 a été obtenu grâce à toutes les formations politiques, les organisations syndicales, estudiantines et les mouvements des jeunes. Il est d’ailleurs important de citer ces parties politiques d’opposition à la présence en Guinée de la France comme pays colonisateur. Ils sont entre autres le PDG (Parties Démocratique de Guinée) de Sékou TOURE section du RDA (Rassemblement Démocratique Africain) qui avait son siège à Bamako, République du Mali ; le BAG (Bloc Autonome de Guinée) de BARRY Diawadou et le MSA (Mouvement Socialiste Africain) de BARRY III, tous les deux membres du PRA (Parti du Regroupement Africain) ayant son siège à Cotonou, République du Dahomey actuel Benin. Il y a lieu de rappeler que ces deux parties politiques ont intégré le PDG après l’indépendance et leurs leaders nommés ministres dans le premier gouvernement de Sékou TOURE. Cependant, ils n’échappèrent pas à la machine à tuer du maître de Conakry. Le premier, BARRY Diawadou, sera arrêté en 1969 et éliminé par inanition, le second BARRY III, sera arrêté et pendu en janvier 1971 au pont 8 novembre à Conakry. Avant cette élimination physique de Diawadou et BARRY III, leurs partis politiques (BAG et MSA) ont été préalablement liquidés entre 1956- 1958 à cause des exactions que le pays a connu. Ces violences opposaient tantôt peulhs et soussou, tantôt militants de BARRY Diawadou ou Karim Bangoura et les troupes barbares de Sékou Touré. Avec cette intimidation imposées par les partisans de Sékou TOURE aux autres militants des parties politiques adverses et la victoire remarquable du PDG lors des élections législatives de l’assemblée territoriale du 31 Mars 1957, le PDG enlève 57 sièges sur 60, alors qu’à l’assemblée précédente il n’avait qu’un député . Avec cette prépondérance politique, Sékou TOURE a été élu premier présidant de la Guinée, le 15 janvier 1961 par 1 576 580 voix sur 1 576 747 votants pour un mandat de 7 ans. Il s’était fait plébisciter le 9 mai 1981 pour un quatrième et dernier septennat car il mourra à la clinique Cleveland aux Etat- Unis d’Amérique le 26 mars 1984. Il a fait plus qu’un bail au pouvoir, en tout cas c’est l’un des plus longs records d’un chef d’Etat au pouvoir en Afrique de l’ouest. Sékou TOURE appartiendra désormais au passé triste de son pays. Dictateur jamais égalé dans la sous région Ouest Africaine, il laissera un pays sans Etat ni nation véritable. Il éliminera (50 000 victimes) sans jugement des guinéens innocents et forcera d’autres à l’exil abandonnant tout derrière eux. La Guinée sera ainsi vidée de sa substance humaine. Le pays sera en ruine, bâillonné, misérable, sans âme ni flamme. La capitale, Conakry, restera à l’image de tout le pays, une ville fantôme noyée d’immondices, sans eaux ni électricité. Enfin, le peuple perdra tout espoir de vivre libre et heureux chez soi après 26 ans d’indépendance acquise sans confrontation armée avec le pays colonisateur.
Boum ! Boum ! patakoum ! patakoun ! Ce sont ces bruits d’armes de guerre qui ont réveillé le commun des mortels dans la cité Conakry le 3 avril 1984. Les Guinéens avaient encore en mémoire la fameuse invasion à Conakry du 22 novembre 1970 par des opposants vivants à l’intérieur du pays, appuyés par le Portugal pour déstabiliser le régime dictatorial de Sékou Touré et s’emparer du pouvoir exécutif. Cette opération avait fait plusieurs victimes civiles et militaires confondus. Les années d’après l’agression ont connu d’autres massacres de guinéens par le parti-Etat. Très tôt le matin, l’unique radio du pays annonce la prise du pouvoir par l’armée. Cette nouvelle rassure les populations de Conakry qui commencent à sortir pour se mêler à la fête de la liberté retrouvée. En effet, le Silly (l’éléphant) est mort laissant derrière lui des éléphanteaux organisés en clans. Pendant qu’ils se disputaient sur comment garder le pouvoir hérité de leur mentor, un groupe de militaires qui veillait au grain s’en empara comme pour dire trop c’est trop.
Le CMRN (comité militaire de redressement national) dirigé par un Colonel inconnu du grand public, en l’occurrence Lassana CONTE, prend le devant de la nation. Il proclame la deuxième République, ouvre les portes des geôles guinéennes dont la plus célèbre est le camp de la mort Mamadou Boiro situé au cœur de la capital Conakry.
Les nouveaux maitres du pays multiplient les déclarations de bonne volonté pour rassurer l’opinion nationale et internationale en ce qui concerne le respect des droits humains et les règles de la bonne gouvernance. Comme par le passé, ce nouveau changement de régime suscita beaucoup d’espoir et d’enthousiasme au sein des populations souffrantes du sous- développent et du manque de liberté de s’exprimer et de se mouvoir. Ainsi, les guinéens ont fini par adhérer avec fermeté au programme de développement annoncé par le CMRN. De surcroit, les organisations internationales (CEDEAO, OUA, ONU, ct…) légitimèrent le nouveau régime de Conakry qui obtiendra son visa pour aller sur les tribunes internationales en vue de justifier le coup de ‘’ farce’’ du 3 avril 1984 pour enlever un cadavre au pouvoir. Avec cette ouverture de la Guinée au monde extérieur, la diaspora guinéenne entama son retour au bercail, les investisseurs venus de divers horizons envahirent la capitale et les institutions internationales accordèrent une priorité au programme de redressement économique et humanitaire du pays. La Guinée sort ainsi de ses 26 ans d’isolement, au nom d’un socialisme de type communiste qui n’a jamais bénéficié d’une adhésion significative des populations guinéennes.
En décembre 1990, le gouvernement de la deuxième République fait adopter par voie référendaire une loi fondamentale qui favorise la proclamation de la troisième République et autorise le pluralisme politique intégral.
En avril 1992, le pouvoir légalise une quarantaine de partis politiques. La Guinée organise les premières élections présidentielles démocratiques en décembre 1993. Le PUP parti du président général Lansana CONTE l’emporta sur les autres candidats à savoir Alpha CONDE du RPG, Bâ Mamadou de l’UNR, Siradio DIALLO du PRP, Jean Marie DORE de l’UPG, Facinet TOURE… En 24 ans de pouvoir, le régime CONTE a organisé au total trois (1993, 1998, et 2003) élections présidentielles ; deux (1995 et 2002) élection législatives et trois (1995,2000 et 2005) communales et communautaires. Il y a lieu de signaler que la quasi-totalité de ces élections ont été bâclées et frauduleusement organisées en faveur du PUP, parti au pouvoir. Pendant 24 ans de gouvernance solitaire du régime CONTE, le pays n’a pas connu un développement réel. Pour preuve, le manque de services sociaux (eaux et électricité) de base ; l’inexistence d’infrastructures routières, sanitaires et scolaires et l’absence d’une politique agricole efficace au service des paysans. La démocratie garantie par la troisième République a été confisquée par l’exécutif. L’insécurité des populations et de leurs biens s’est notoirement aggravée, l’incompétence, le laxisme, la corruption, la gabegie et les détournements de denier public ont freiné l’élan de l’aide apportée par la communauté internationale et les institutions financières. L’accumulation de tous ces manquements à la bonne gouvernance a accéléré la fin de l’air CONTE qui commença par la mutinerie des 2 et 3 février 1996 suivie d’agressions rebelles intenses sur les frontières sud du pays, en 2001, et les nombreux mouvements de contestation populaires réprimées dans le sang en juin 2006 et janvier –février 2007. Il y a en plus de cela la longue maladie qui le rongeait et qui, finalement l’a emporté. Il mourra le 22 décembre 2008 au camp Almamy Samory TOURE où il avait élu sa résidence officielle depuis sa prise du pouvoir le 3 avril 1984. Comme son prédécesseur, pouvoir sans dauphin, un pays sans Etat, menacé. Comme son prédécesseur, il quittera le pouvoir sans dauphin, un pays sans Etat, menacé d’ethnocentrisme et une économie exsangue. Une fois encore, les guinéens n’atteindront pas l’objet de bien être suscité par la prise du pouvoir par l’armée, le 3 avril 1984.
Après l’annonce du décès du général Lansana CONTE, dans la nuit du 22 décembre 2008 par l’honorable El hadj Aboubacar SOMPARE, président de l’assemblée Nationale périmée et le constat de la vacance du pouvoir par Mr Lamine SIDIME ; président de la cour suprême, les militaires, à leur tête, un bouillant capitaine nommé Moussa Dadis CAMARA s’emparèrent d’un pouvoir exécutif qui n’avait pas de preneur légal. Comme d’habitude, les militaires guinéens attendent toujours la mort du président pour se saisir d’un pouvoir errant. Ils occuperont par la suite les rues de la capitale en tirant des coups de feu en l’air pour bénéficier du soutien des populations et enfin crier victoire. L’honorable Somparé joue à la carte de succession et perd. Il ne peut s’en prendre qu’à lui-même car il lui a été donné une belle occasion pour démettre CONTE de ses fonctions de président car ce dernier était incapable d’exercer la plénitude de ses prérogatives constitutionnelles depuis un bon moment. Il resta comme de marbre. Désormais, il ne peut que se ronger les ongles et se contenter d’une possible retraite politique.
Et vint le Conseil National pour le Développement et la Démocratie(CNDD) pour remplacer le pouvoir exécutif balayé. Son président, le capitaine Moussa Dadis CAMARA, jeune, plein d’ambition pour son pays, avec un franc-parler digne d’un homme de rang. Il était conscient de l’état catastrophique dans lequel il a trouvé son pays. Les maux s’appellent corruption généralisée, enrichissement illicite, gabegie, trafics de drogue, contre bande, impunité et que sais-je encore. Le peuple de son côté, ose croire naïvement que la propagande du CNDD sera cette fois la solution tant attendue de ses souffrances qui ont pour nom : insécurité ; pauvreté, ethnocentrisme, etc. Dadis multiplie les déclarations de bonne foi pour convaincre davantage et bénéficier du soutien indéfectible de ses compatriotes.
Le temps réellement passé au pouvoir par le CNDD, comparativement aux deux précédents régimes- Sékou TOURE et Lansana CONTE- a été relativement très court. L’ère Dadis au pouvoir sera orientée vers la lutte sans réserves contre la corruption, la gabegie et le trafic de la drogue. Il promettra des élections présidentielles démocratiques sans sa participation. Le massacre aveugle et éhonté contre les manifestants contre sa gouvernance abusive le 28 septembre 2009 par les forces militaires au stade du même nom à Conakry contribuera activement à sa chute en décembre de la même année. Je précise que je suis témoins et victime de cette répression sanglante qui a enregistré des centaines de morts, des disparus, des blessés et des femmes violées par endroit au stade. Quant à moi, j’ai eu une côte cassée, des blessures et des entorses au niveau des jambes et des bras. Ce fut un calvaire inoubliable de ma vie.
Dadis, sur des mauvais conseils, voudra faire endosser la responsabilité des massacres du 28 septembre 2009 par son aide de camp Toumba DIAKITE. Ce dernier, en homme averti, n’est pas prêt à se laisser entrainer seul dans cette triste aventure. Toumba DIAKITE, lors d’une altercation avec son mentor, Dadis, le 3 décembre 2009 au camp Koundara à Kaloum, lui logera une balle dans la tête. Dadis sera évacué au Maroc d’urgence et admis dans un hôpital pour des soins intensifs. Après son traitement au Maroc, les décideurs l’enverront à Ouagadougou, capitale du Burkina Faso pour une convalescence qui se prolonge. Il continue de méditer sur son sort à cet endroit. Bonjour l’exil forcé.
En convalescence à Ouga, Dadis Camara, sous impulsion de la communauté internationale, désignera KONATE, deuxième vice-président du CNDD, président intérimaire pour achever la transition commencée sous son autorité fin 2009 en Guinée. Un Conseil National de transition mise en place pour la circonstance toilettera la loi fondamentale qui deviendra une constitution pour la République de Guinée. Le général Sékouba KONATE organisera des élections présidentielles qui ont failli déclencher des affrontements ethniques dans le pays en fin 2010 à cause du caractère partial de l’opération.
En tout cas n’eut été la sagesse du candidat déclaré perdant par la cour suprême, en l’occurrence Cellou Dalein DIALLO, le pays allait verser dans la violence avec des conséquences incalculables. Il y a lieu de préciser que pour ce qui concerne l’élection présidentielle de 2010, le général Sékouba Konaté, président intérimaire de la transition est le seul comptable de comment le candidat Alpha CONDE, qui n’a bénéficié au premier tour que de 18% de l’électorat, s’est retrouvé élu président au second tour devant Cellou Dalein qui détenait plus de 44% à la même échéance. Là encore, la transition qui a duré deux (2008-2010) ans a accouché d’une souris, à cause du manque de sincérité et de transparence qui ont accompagné le ‘’Scripting’’ qui a porté le professeur Alpha CONDE au pouvoir en 2010.
Elu en novembre 2010, le professeur Alpha CONDE, opposant historique et ancien enseignant à la Sorbonne, dit-on, s’est distingué de son prédécesseur Lansana CONTE par cette déclaration surprise, je cite <<je prendrais la Guinée où Sékou TOURE l’a laissée-Guinea is back » pour celui qui connait le passé douloureux de notre pays, durant les 26 ans de pourvoir sans partage de Sékou TOURE prendra cette annonce comme une provocation et une atteinte à l’unité nationale qui est déjà fragilisée. Aujourd’hui, les actions gouvernementales du professeur Alpha CONDE vont dans le même sens que cette déclaration historique. Ces pratiques ont pour noms : ethnocentrisme, corruption, insécurité, gabegie financière, régionalisme, laxisme, etc. Ce sont là les vraies maladies de notre pays depuis son accession à l’indépendance en 1958. Le rappel de ce parcours réel de notre pays en 55 ans d’indépendance devrait nous interpeller pour enfin s’unir d’avantage et construire une nouvelle Guinée pour tous.
Ibrahima Dubréka DIALLO
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