Le vautour est cet oiseau rapace qui se nourrit de préférence de charogne et pour satisfaire son appétit il n’a cesse de survoler les abattoirs ou les charniers à la recherche de dépouilles à dévorer. Il a son semblable dans la société, ce sont des hommes et des femmes qui fouinent leur nez partout où ils peuvent piquer quelque chose à mettre sous la dent, qu’importe si cela est licite ou non. L’aspect moral de la conduite humaine ne les intéresse guère.
Les vautours, on en compte des milliers dans notre administration publique ou privée. Ce sont eux qui sont au devant des affaires, on en dénombre des petits, des moyens, des grands et puissants ; ils montent des projets qui aboutissent toujours à des scandales retentissants mais vite étouffés. Ceux qui devraient sévir contre ces scandales se contentent de prendre leur part du butin ou se laissent intimider par des barons de la pègre.
Des cadres ayant exercé une longue carrière dans l’administration guinéenne sont convaincus d’une chose, la seule manière d’accéder à l’aisance matérielle, faute d’un bon leadership à la tête du pays, c’est de voler, et pour y parvenir tourner le dos à toute référence morale. Il faut exceller dans l’art de mentir, de cirer les bottes à son chef, d’amasser autant que possible l’argent ou le matériel qu’on trouve sur son chemin. En Guinée, vous pouvez voir ainsi de nombreux cadres emprunter cette voie pour se procurer maisons, voitures, comptes bancaires bien garnis et tous les plaisirs d’une belle vie.
Lorsque vous vous hasardez à les critiquer, ils vous regardent avec une moue dédaigneuse et vous rient au nez, pour eux vous n’êtes qu’un pauvre type qui ne sait pas se battre, qui perd son temps à critiquer ou envier les autres.
Une affaire défraie d’ailleurs en ce moment la chronique dans la cité. Et elle illustre la persistance de la pratique de la corruption dans l’administration guinéenne. Il s’agit d’une affaire de plus de 21 mille tonnes de sucre, censées avoir été livrées à l’état guinéen en 2010, et dont le fournisseur Mohamed Kourouma, PDG de la société Hamana réclame près de 18 millions d’euros au gouvernement actuel.
Alors que l’inspecteur général d’Etat de son côté affirme que l’état guinéen ne doit rien au PDG de la société Hamana. Et que c’est plutôt cette société qui doit environ 200 mille euros au trésor public, en termes de créances. Une commission interministérielle mise en place pour examiner le contentieux, composée de 8 membres du gouvernement a tranché en faveur de l’opérateur économique. Ce qui a amené l’ancien ministre du Commerce, Mohamed Dorval Doumbouya, qui est celui dont le contrat porte la signature engageant l’état guinéen a rompu le silence, pour qualifier le dit ‘’contrat de faux.’’ Lors d’un point de presse animé lundi dernier, l’ex ministre Dorval a affirmé ceci : « je n’ai pas signé le contrat de Hamana et je ne pourrai pas signer. Ma signature a été imitée et mon cachet aussi. Il fallait que j’apporte les éclaircissements parce que les gens continuent à authentifier le mensonge partout», s’est-il défendu.
Le ministre se décharge sur sa secrétaire générale Mme Touré Hawa Keita, qui selon lui aurait falsifié sa signature, après que son cachet ait été volé. L’affaire fait les choux gras de la presse dans la cité sur fond de soupçon de corruption.
Ce qui fait dire à bien des gens qu’à l’allure où vont les choses, les vautours de l’administration ont encore de beaux jours devant eux. Leur ère a débuté sous le régime de Sékou Touré, s’est accentuée sous Lansana Conté, Moussa Dadis Camara, Sékouba Konaté et aujourd’hui Alpha Condé.
L’impunité s’est érigée en système de gouvernance. Qui va punir qui quand tout le monde mange aux mêmes râteliers. Un adage ne dit-il pas ‘’ceux qui se ressemblent s’assemblent’’ ?
In L’Indépendant