Le président des paysans de Mali à Guineematin : « toutes nos pistes sont impraticables »

Abdoul Karim Diallo, le président de l'Union des Paysans Producteurs, MaliLe gouvernement sénégalais a récemment interdit l’importation de certains produits agricoles comme la pomme de terre. Cette interdiction, selon le gouvernement sénégalais, viserait à protéger les producteurs locaux. Ce qui ne manquera pas de fouetter la pauvre économie des paysans du Foutah Djallon en Guinée.

Le correspondant de Guineematin.com à Tougué s’est rendu dans la préfecture de Mali (une des localités de la Moyenne Guinée, pourvoyeuses de pomme de terre au pays de la Terranga) où il a pu s’entretenir, le 4 mars 2015, avec monsieur Abdoul Karim Diallo, le président de l’Union des Paysans Producteurs de Mali, une antenne de la fédération paysanne de Guinée.

Guineematin.com : Nous avons appris que le Sénégal a interdit la vente de certains produits agricoles dont la pomme de terre. Comment vous avez accueilli cette mesure ?

Monsieur Abdoul Karim Diallo : Nous avons appris comme vous cette interdiction. Mais, l’interdiction n’est pas éternelle, elle sera levée dès qu’ils finiront de vendre leur production locale.

Guineematin.com : Quelles les conséquences de cette interdiction pour les producteurs guinéens ?

Abdoul Karim Diallo : Cette interdiction n’a aucune conséquence négative, par ce que nos périodes de production ne sont pas les mêmes. Nous ne produisons pas en même temps. Il y a au moins 3 mois entre nous. Après la vente de leur pomme de terre, ils vont autoriser à nouveau. Et, ça trouvera qu’en ce moment nous récoltons les nôtres et on pourra aller vendre chez eux. Mais, pour la fermeture des frontières guinéo-sénégalaises à cause d’Ebola, cela nous a causé beaucoup de dommages. Tous nos produits (pomme de terre, choux, carottes etc.) qu’on avait récoltés en ce moment avaient pourri dans nos magasins. Jusqu’à présent, nous ressentons les conséquences. Nous n’avons pas pu récupérer nos dettes que les paysans ont contracté, nous avons énormément perdu à cause d’Ebola.

Guineematin.com : Quelles quantités de pomme de terre produisez- vous par an ?

Abdoul Karim Diallo : C’est très difficile pour moi de vous dire exactement la quantité réelle que nous produisons. Nous ne sommes pas bien organisés, chacun exporte sans même nous informer. Mais, je peux estimer à peu près 300 à 350 tonnes par an, parce que nous utilisons plus de 80 tonnes de semences pour les deux saisons.

Guineematin.com : Si vous n’exportez pas cette quantité au Sénégal ou ailleurs, pensez- vous qu’elle peut être consommée ou vendue en Guinée ?

Abdoul Karim Diallo: Oui ! Pendant la saison sèche ! Parce que ce n’est pas beaucoup qui vont cultiver. Mais, vu l’allure des choses, si nous n’exportons pas, nous ne pourrons pas écouler nos produits en Guinée.

Guineematin.com : Quelles sont les difficultés que les producteurs de la pomme de terre rencontrent ici à Mali ?

Abdoul Karim Diallo : D’abord, le manque d’eau pendant la saison sèche ; les effets nocifs des insectes et chenilles, etc. par exemple, cette année, la fraîcheur a détruit tout ce qu’on a produit : que ça soit pomme de terre, carottes et choux… Les semences arrivent tardivement. Mais, la difficulté majeure, c’est le transport de nos produits, toutes nos pistes sont impraticables surtout pendant la saison des pluies. On avait lancé un appel pour qu’on répare le pont appelé « Loumba- Loumbita », situé à 50 kilomètres de Mali en allant vers le Sénégal, mais jusqu’à présent rien n’est fait.

Guineematin.com : Donc, vous n’avez pas de problème pour stocker vos récoltes ?

Abdoul Karim Diallo : Grâce à la fédération paysanne qui nous a construit deux grands magasins, on n’a aucun problème, mais nous sollicitons la construction d’autres magasins pour qu’on puisse stocker dans les uns et vendre dans les autres.

Guineematin.com : Qu’est ce que vous pouvez ajouter à ce que vous avez dit ?

Abdoul Karim Diallo : Ce que je peux ajouter, c’est de dire que la richesse provient de l’agriculture. Si nous travaillons notre sol, personne n’aura besoin de sortir du pays et se faire tuer ailleurs. Franchement, si nous mettons nos sols en valeur, nous sortirons de la pauvreté.

Guineematin.com : Merci monsieur Diallo

Abdoul Karim Diallo : C’est moi qui vous remercie d’être venu jusqu’à chez moi ici pour qu’on parle de ce sujet.

Entretien réalisé à Mali par Alpha Ibrahima Diogo Baldé pour Guineematin.com

Tel:(+224)622 221 178 / 622 828 082

 

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