Guineematin à Womey : la précarité sur les lieux, les visages, les discours… (Reportage)

Chef du district de WomeyC’était pourtant une grande localité, mais lorsque vous arrivez la journée, vous y trouverez peu de personnes. Les deux policiers à l’entrée de la localité, quelques personnes à l’hôpital et une poignée d’habitants, en majorité des femmes au marché. Les élèves qui ont repris le chemin de l’école sont en classe. La majorité de la population est au champ. L’agriculture étant l’activité principale à Womey. L’annnée passée, les tueries qui y ont été commises et qui ont fait connaître cette sous-préfecture avaient coïncidé à la période des récoltes, les habitants ayant fuit, n’avaient donc pas pu récolter tous leurs champs. A leur retour, il fallait vite reprendre les travaux champêtres pour remplir les greniers.

Il était midi à Womey, ce mardi 17 novembre 2015, lorsque nous cherchions à rencontrer le sous-préfet ou une autre autorité administrative locale. Le bloc administratif qui abrite leurs bureaux était fermé. Il est très difficile de les rencontrer ici à Womey, nous a-t-on dit. Le sous-préfet, le comandant Louis Honoré Théa, est en séjour à Conakry depuis quelques jours.

Quant au maire, il était à N’zérékoré ce matin. Erigée en sous-préfecture, le 20 janvier 1977, le centre de Womey ne compte que deux districts : Womey 1 et Womey 2. Depuis les événements du 16 septembre 2014, les tueries de certains membres d’une délégation officielle dont des journalistes, cette localité, située à une cinquantaine de kilomètres de la ville de N’zérékoré, fait l’objet de diabolisation de la part parfois même de hauts responsables de l’Etat.

Le président du district de Womey 1, monsieur Niankoye Mathias Haba, un enseignant, comme chaque jour depuis l’ouverture des classes, est allé enseigner à un village situé à quelques kilomètres de là.

La seule autorité en place, c’est le président du district de Womey 1, le doyen Kpali-Ouo Haba, agriculteur de son état. Contrairement à son homologue de Womey 2, lui n’est pas lettré.

Au cours d’une interview qu’il nous a accordée à son domicile, en présence d’un de ses proches qui nous a servit d’interprète, il a déploré un manque d’infrastructures scolaires et de personnels surtout de santé dans sa localité.

Pour toute la localité, il n’y a que deux policiers dont le poste fait face à l’hôpital sous-préfectoral. Juste à la rentrée de Womey. C’est d’ailleurs un d’entre eux qui nous a accompagnés durant tout notre séjour dans la sous-préfecture. On ne sait jamais !

Womey compte deux écoles primaires et un collège. A l’école primaire de Womey 1, fondée en 1959, le directeur, Monsieur Lamah Zaoro, a confirmé le manque d’enseignants qu’a déploré le président du district de Womey 1. « Nous avons environ 345 élèves repartis entre huit salles de classe. Nous ne sommes que trois (3) titulaires », a-t-il mentionné.

Toutefois, cette équipe de trois est aidée par six (6) autres contractuels communautaires, des volontaires pris en charge par la communauté. « Nous n’avons pas de logement adéquat ni de latrines pour le personnel », rajoutera-t-il.

En 2011, une école de trois salles de classe a été mise à la disposition de la population locale par Plan Guinée. Mais, aujourd’hui, malgré cette école, la demande est plus forte que la capacité d’accueil des deux écoles réunies. Le directeur de cette école, monsieur Lamah N’yankoye Kokoly, plaide pour la construction de nouvelles salles de classe pour pouvoir satisfaire tous les parents d’élèves qui veulent inscrire leurs enfants en première année.

Tous ses deux directeurs ont indiqué à l’envoyé spécial de Guineematin l’apport si important du Programme Alimentaire Mondiale (PAM). A notre présence, à l’école primaire Womey 1, des femmes servaient à manger à des écoliers à la cantine scolaire du PAM. « Grâce à ce programme, le taux de présence est positif », nous a-t-on confié.

Malgré les tueries qui se sont déroulées dans cette localité en 2014 et la présence éphémère de militaires, qui a fait fuir certaines personnes, les deux directeurs se réjouissent du retour effectif de l’écrasante majorité de leurs élèves de l’an passé.

Interrogé, monsieur Eugène Haba, un citoyen de Womey, a parlé à Guineematin.com de ses souvenirs des événements qui ont secoué sa localité. « C’est un grand regret pour moi, pour ceux qui sont morts. Nous qui sommes là maintenant, nous n’avons pas les moyens. Nous demandons à l’Etat de nous venir en aide en termes de nourriture et de formation de nos enfants », a-t-il dit.

De nos jours, la majorité de la population qui avait fuit est revenue. Mais, l’accès à la nourriture demeure un problème. A cela, s’ajoute le douloureux souvenir de ces moments passés dans la brousse et la répression qui a engendré cela.

De retour de Womey, Thierno Amadou Camara, envoyé spécial de Guineematin.com

 

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