Querelle de leadership à la tête de l’UFDG : comment éviter une implosion ?

 

Bah Oury et Cellou DaleinSi rien n’est fait par des personnes honnêtes et désintéressées pour calmer l’esprit de suffisance des deux principaux leaders de l’UFDG, afin de faire respecter et en même temps limiter les prérogatives de Cellou Dalein Diallo et de Bah Oury, le principal contre pouvoir politique en Guinée va s’effriter et finalement imploser… Editorial !

Exilé depuis plus de quatre ans, le retour «triomphal» de Bah Oury devait être une victoire du principal parti de l’opposition guinéenne. Mais, il se présente plutôt comme le début d’une fronde qui risque de fragiliser le seul contre pouvoir politique du régime d’Alpha Condé.

Interrogé chez nos confrères de RFI, à la veille de son départ d’exil, le premier vice-président de l’UFDG a clairement admis son intention de conquérir la présidence du parti, actuellement occupée par Cellou Dalein Diallo.

Egalement, Bah Oury dit que «si monsieur Alpha Condé s’implique davantage pour aller dans le sens de la réconciliation nationale et de l’apaisement, nous serons ensemble pour bâtir un pays moderne, une nation réconciliée»…

Or, chez Cellou Dalein Diallo, il n’est pas question de quitter la présidence de l’UFDG. Surtout pas comme cela. Il a dit et redit que le congrès l’y a mis jusqu’en 2020, de même que son premier vice-président qui n’avait pas candidaté à la présidence du parti.

Par ailleurs, toute main tendue du président Alpha Condé est bannie et criminalisée par les dirigeants de l’UFDG. Du moins, jusqu’à ce samedi 23 janvier 2016 ! Il y a donc un risque de fragilisation de la principale force de l’opposition. Etant donné que Bah Oury arrive, demain, déterminé et surtout avec un air revanchard contre ceux qu’il accuse de n’avoir rien fait pour son retour d’exil ; notamment en organisant des manifestations ou insérant la condition de son retour dans les négociations politiques.

C’est une période qui nous rappelle celle de 2002, quand le doyen Bâ Mamadou, alors proche d’un certain Alpha Condé (opposant radical du régime Lansana Conté) à force de contester la direction du parti dont il assumait la présidence d’honneur, s’est vu exclure par Siradiou Diallo et Bah Ousmane qui ont tenu à participer aux élections législatives de 2002, contrairement au doyen Bâ, Alpha Condé et autres radicaux de l’époque…

C’était le début de l’effritement de l’UPR qui était pourtant devenu le principal parti de l’opposition, juste derrière le PUP (parti au pouvoir) et devant le RPG du professeur Alpha Condé, troisième force politique à l’époque.

Après avoir «dirigé» l’UPR bis un moment, le très populaire Bâ Mamadou, avec un franc-parler hors du commun, est allé prendre la tête de l’UFDG de Bah Oury.

L’UPR se videra progressivement pour grossir le nouveau parti de Bâ Mamadou qui a participé aux élections communales et communautaires de 2005. Année électorale à laquelle l’UFDG a obtenu ses premiers succès. Même si des alliances ont été nécessaires dans certaines communes comme Dinguiraye, Télimélé, Fria…

Bref, après l’arrivée de l’ancien Premier ministre Cellou Dalein Diallo que le doyen Bâ Mamadou a «vendu» comme son choix et l’alternative du manque d’expérience de Bah Ousmane et de Bah Oury, le parti a repris de nouvelles forces. Et, Cellou Dalein a annoncé de nouvelles arrivées, avec ses vices- présidents de la Haute Guinée, de la Basse Guinée et de la Guinée Forestière. Mais, le «propriétaire du parti» n’a jamais voulu accepter de rester au dessous des «importés du PUP».

C’est le début d’une guéguerre de positionnement. Bah Oury qui a accepté l’arrivée de Cellou à contre cœur a toujours montré que si on le provoquait, c’est toute la vague qu’il attaquerait…

Aujourd’hui, au moment où Alpha Condé, devenu entre-temps président de la République, se délecte des embrouilles du camp d’en face ; son parti, le RPG faisant face à une difficile fronde. S’il n’est pas derrière le retour «belliqueux» de Bah Oury comme le laissent entendre certains Cellouistes de l’UFDG, cette «affaire» pourrait bien lui redonner un nouveau souffle.

D’abord, les débatteurs et commentateurs oublient de plus en plus l’inextricable fronde du RPG qui exige le départ des 37 nouveaux ministres et l’intégration des militants.

Ensuite, c’est une vraie menace d’implosion qui plane à la tête de l’UFDG. A qui profite le crime ?

Comment éviter l’implosion de l’UFDG ?

Il est évident que Bah Oury, qui ne doit la fin de son exil et son retour qu’à la magnanimité du chef de l’Etat, ne baissera pas la tête devant un Cellou Dalein Diallo qui, dans sa tête, ne s’est jamais montré préoccupé de son dur exil. Au contraire !

Egalement, Cellou Dalein Diallo qui se sait populaire et capable d’éjecter Bah Oury de la vice-présidence du parti n’acceptera pas longtemps la contestation interne au sein de l’UFDG. D’autant plus qu’il connaît un peu les effets négatifs de travailler avec ses adversaires, l’ayant durement vécu pendant sa courte primature de sa longue expérience gouvernementale.

Finalement, le clash n’est pas difficile à faire si personne, au sein du parti et au-delà, ne fait rien pour convaincre Cellou Dalein Diallo et Bah Oury que le parti actuel que l’un dirige et que l’autre a fondé n’est plus leur propriété privée. C’est le résultat d’un dur combat qui a coûté beaucoup de sacrifices à beaucoup de personnes connues et anonymes, et qui devrait connaître maintenant son air de gloire et non sa décadence. Les deux leaders doivent se parler franchement et devant des témoins désintéressés et non les opportunistes de l’un et l’autre. Au-delà des victimes humaines et matérielles qui méritent du respect de ces deux hommes, la Guinée a besoin d’un parti fort à l’opposition pour un véritable contre-pouvoir afin d’éviter toute dictature dans notre cher pays.

Nouhou Baldé

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