Procès du député Ousmane Gaoual : voici la plaidoirie de Me Aboubacar Sylla

La troisième journée du procès de l’opposant Ousmane Gaoual a commencé comme prévu dans la matinée de ce vendredi 12 août 2016 au tribunal de première instance de Dixinn, a constaté Guineematin.cim, via deux de ses reporters.

Sans commentaire, nous vous proposons, ci-dessous, le décryptage de la plaidoirie de maître Aboubacar Sylla, un des avocats qui défendent l’honorable Ousmane Gaoual Diallo, poursuivi pour offense au chef de l’Etat et menaces contre trois hauts cadres de l’Etat et du parti présidentiel : Sanoussy Bantama Sow (ministre conseiller à la présidence de la République), Malick Sankhon (DG de la CNSS) et Hady Barry (secrétaire général du ministère des Affaires étrangères).

D’avance, Guineematin.com vous présente se excuses pour des erreurs qui pourraient se retrouver dans ce décryptage fait en direct dans la salle d’audience :

Monsieur le Président, je vais commencer par vous remercier. Je vais faire un clin d’œil au procureur pour sa maîtrise de la langue de Molière ; mais, il a des difficultés dans l’application de la loi.

Monsieur le Président, j’ai beaucoup appris par ce procès, de tous les deux côtés. Mais, pour ma part, je vais sacrifier une dose de plaidoyer classique parce que l’avocat, dans un plaidoyer dit ce qu’il veut.

Monsieur le Président, permettez-moi donc d’étayer les faits :

Monsieur le Président, Ousmane Gaoual Diallo, homme politique et député à l’Assemblée nationale, a tenu un discours le 30 juillet dernier au siège de l’UFDG en interpellant certaines personnes qui ont tenu des déclarations très graves : « Monsieur Cellou Dalein Diallo a acheté des coupes-coupes… ». Monsieur Bantama Sow a accusé Cellou Dalein Diallo de vouloir faire un coup d’Etat. « Madame Halimatou Dalein Diallo a entrepris une grande activité de salubrité avec l’argent que son époux a volé, nous recruterons des contre-manifestants pour contrecarrer la manifestation des opposants… ». Mais, monsieur le procureur a fait la sourde oreille.

Monsieur le Président, Ousmane Gaoual, en tenant ses propos, n’a jamais dit les avoir tenus à l’endroit du Président, c’est la négation, de facto il n’a pas tenu ces propos à l’endroit du Président…

Monsieur le Président, c’est parce que le législateur a voulu sortir le Président de la politique politicienne qu’il a limité les prérogatives du Président à une seule fonction.

Monsieur le président, vous permettrez, après ce survol succinct, de faire un point sur l’outrage. Là dessus, monsieur le président, je vous ai dit que monsieur Ousmane Gaoual Diallo a répondu à monsieur Alpha Condé qui a dit que l’opposition envoie les enfants pour se faire tuer. La démocratie, monsieur le président, est un pacte républicain. Il me semble que l’intention profonde de Monsieur Ousmane Gaoual Diallo, c’est de condamner les propos de monsieur le président en même temps de dire que le président de la République ne doit pas tenir les propos de ce genre. Et, pour éviter tous ces agissements que le  législateur a d’ailleurs interdit au Président de la République d’exerce aucune autre fonction.

Monsieur le Président, le droit évolue. Ma conviction dans ce métier, c’est de contribuer à l’aboutissement de la vérité. Monsieur Ousmane Gaoual Diallo, en tenant ces propos, a pris le soin de mettre le « Si », pour dire que le président de la République, une fois qu’il est élu, doit éviter d’exercer toute autre fonction.

Quand à la diffamation, en l’espèce, monsieur Ousmane Gaoual Diallo, très sincèrement, j’ai les échos de tous les propos tenus au siège de l’UFDG et tous les autres partis politiques. Mais, les personnes qui ont porté plainte, je sais très souvent ce qu’ils font :  » Dire que je vais m’attaquer à toutes personnes qui marcheront » répondre à celui qui a tenu ces propos, les chevaliers de la République, c’est quoi ? C’est une milice, lorsque quelqu’un reprend les propos qu’un autre a tenus, ça dépend de l’interprétation. La seule chose qu’il a ajouté, c’est le danger. Monsieur Bantama Sow a distribué à tout le monde des courriers que le ministre Papa Koly Kourouma a adressé au chef de l’Etat : c’est l’excès de zèle ! Je vais interpeler ici la société, il faut le dénoncer !

Monsieur le Président, il y a ce qu’on appelle la bonne foi, il ne faut pas l’ignorer. Le préjudice causé à autrui peut être justifié. L’honorable Gaoual Diallo a le souci de la paix publique.

Monsieur le président, on ne peut pas répéter les propos de quelqu’un. J’ai entendu l’UFDG dire que nous allons manifester. Il suffit de dire de l’autre côté qu’il y a eu de la surenchère, on ne peut pas se permettre de dire de l’autre côté qu’on va empêcher une manifestation.

S’agissant des menaces  de mort, je ferai le même exercice. Lorsque monsieur Hady Barry dit « si vous manifester et que quelque chose arrive, nous allons vous rechercher jusque dans votre domicile ». Personne n’a le monopole de la partie civile, je plaide aujourd’hui, parce qu’il y a la paix.

Monsieur le Président, à ce niveau aussi, je suis désolé, une partie a dit que je veux manifester ; l’autre se permet de dire que si vous manifester, nous allons empêcher. On a eu des gens qui ont reconnu qu’on nous a donné de l’argent pour faire si et ça. Donc, la surenchère, c’est de l’autre côté que ça a commencé. Et, ce qu’ils ont dit qu’ils vont faire est une incitation à la violence « si vous sortez mille jeunes, nous allons sortir 10 000 jeunes ».

Monsieur le président, j’étais très surpris lorsque monsieur Ousmane Gaoual Diallo a visé par cette plainte des sieurs Bantama Sow

Monsieur le Président, quelqu’un qui sort tout d’un coup pour accuser quelqu’un sans aucune preuve pour dire qu’on veut faire un coup d’Etat, il y a du zèle. Mais, je reproche les cadres, ces cadres qui sont dans tous les marigots, c’est des « bénis oui oui ».

Monsieur le Président, les gens qui rongent aujourd’hui autour du pouvoir actuel, ce sont les mêmes personnes qui ont soutenu le Koudéisme pendant l’ancien régime. Donc, faisons très attention, le zèle n’avance pas le pays.

Monsieur le président, le législateur guinéen a eu raison, le Président de la République est une institution, il doit tout le respect. Mais monsieur le Président, c’est le même législateur qui a aussi dit que le Président de la République doit éviter d’exercer toute autre fonction.

Monsieur le Président, le président de la République est la partie civile, c’est que c’est lui qui nomme à tous les hautes fonctions, c’est lui qui nomme les magistrats, le procureur… Mais, je crois en ce tribunal !

Monsieur le Président acceptez le doute… Éloignez-vous de la certitude.

Monsieur le Président, au nom de la défense unanime, quand je le dit, c’est avec Ousmane Gaoual Diallo.

Monsieur le Président, on n’a souvent dit à notre client de porter plainte. Mais, monsieur le Président, l’histoire judiciaire de l’UFDG n’est pas reluisante. Je me souviens qu’en 2010, les hommes de sécurité de l’UFDG, malgré l’acte qui attestait cette affectation, ils ont été condamnés pour abandon de poste ; alors que les autres n’ont nullement été inquiétés. L’affaire Zakariaou, jusque-là,  l’enquête n’a pas abouti. Donc, monsieur le Président, il y a frustration.

Monsieur le Président, vous ne devez obéir qu’à la loi ! C’est sur ces mots, monsieur le président, que je vais donner la parole à mes brillants confrères.

Après, maître Aboubacar Sylla, c’est maître Salifou Béavogui qui a pris la parole pour cette plaidoirie avec laquelle il avait promis hier de « démonter » cette accusation.

A suivre !

Propos recueillis et transcris par Ibrahima Sory Diallo et Kadiatou Baldé pour Guineematin.com

 

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