Criminalité faunique : le verdict sur Abdourahamane Sidibé et son fils Abdoul Salam au centre des débats !

Communiqué : Le tribunal de première instance (TPI) de Kaloum a rendu ce vendredi 14 avril 2017 sa décision dans l’affaire Ministère Public contre Abdourahamane Sidibé et son fils Abdoul Salam, deux des trafiquants internationaux de grands singes les plus importants du continent Africain. Le père écope d’un an de prison dont 9 mois assortis de sursis et le fils 4 mois de prison dont 2 mois assortis de sursis. C’est le résultat du procès contre eux qui avait démarré récemment après qu’ils aient fait opposition à la décision qui les a condamné à 5 ans de prison ferme par défaut en juillet 2016. De 5 ans ferme, leur peine passe donc à 3 mois ferme pour l’un et 2 mois ferme pour l’autre. Une décision jugée extrêmement faible et totalement incompréhensive par l’opinion publique et certaines autorités car il s’agit de la plus importante affaire de trafic faunique que la Guinée n’est jamais eu et pour laquelle le pays a été épinglé et mis sous sanction par la Convention CITES des Nations Unies.

La lutte contre la criminalité faunique en Guinée est loin d’être finie. Certes, les textes et les beaux discours des gouvernants sur la question du trafic faunique en Guinée et de la lutte contre la corruption qui mine ce secteur se font quotidiennement écouter lors des rencontres, des ateliers de formations et autres. Mais, assez parlé, la loi doit frapper énergiquement les contrevenants, surtout quand il s’agit de trafic international.

Les hommes en robe noire pour qui, un immense respect est accordé, sont les seuls à pouvoir freiner les agissements des réseaux criminels en faisant appliquer la loi fortement et sans aucune influence.

Des efforts colossaux sont faits quotidiennement par le Ministère de l’Environnement et le projet GALF depuis de nombreuses années. Et ce type de décision de Justice va à l’encontre de ces efforts.

On se demande quel poids a influencé ce grand dossier sensible et suivi avec attention par les autorités en charge de l’Environnement, les Partenaires mais aussi l’ensemble de la communauté internationale ?

Pour revenir aux faits, la famille Sidibé a été citée dans le dossier en 2016 dans l’affaire Ministère Public contre le commandant Ansoumane Doumbouya, l’ancien chef de la CITES en Guinée, poursuivis pour les délits de faux, usage de faux, usurpation de titre ou de fonction, capture, détention, circulation, commercialisation, importation et exportation des espèces animales intégralement protégées, tels que les chimpanzés, les gorilles, les lamantins, les bonobos et d’importante quantité d’autres espèces qui ont été massivement exportés et illégalement depuis le territoire Guinéen vers le reste du monde.

Lors de son procès, Abdourahamane Sidibé a reconnu avoir exporté illégalement 12 chimpanzés dont certains sans permis, ce qui constitue, aux yeux de la loi, le faux et usage de faux. Le code pénal prévoit entre 2 à 7 ans de prison ferme pour tout usage de faux.

Dans son délibéré, le TPI de Kaloum avait condamné par défaut le 08 juillet 2016, Abdourahamane Sidibé et son fils Abdoul Salam Sidibé à 5 ans de prison ferme avec émission des mandats d’arrêts internationaux contre les deux. Une chasse à l’homme a débutée dans plusieurs pays pour faire exécuter ces mandats internationaux et appliquer la loi.
Ainsi, à l’arrestation du père dans la deuxième quinzaine du mois de février 2017 par le BCN d’Interpol, il avait formulé une demande d’opposition à son jugement qui n’avait d’ailleurs pas respecté la procédure. Ce qui avait amené la partie civile à demander l’irrecevabilité de sa demande. Le 06 mars 2017, le fils Abdoul Salam est interpellé et incarcéré à la maison centrale de Conakry. Les deux dossiers vont connaitre une jonction pour en faire une affaire devant le tribunal les jours qui ont suivis l’arrestation du fils Abdoul Salam Sidibé. Les mis en cause sont largement impliqués dans l’exportation illégale de grands singes de l’Afrique, les lamantins et autres espèces vers le continent asiatique, précisément la Chine.

A en croire nos sources, cette activité illicite est très lucrative car les chimpanzés exportés en chine se vendent au prix de 20.000 dollars l’unité, des lamantins exportés dans les différents pays asiatiques au prix de 50.000 dollars l’unité sans compter d’autres animaux protégés et des oiseaux exportés dans la plus grande violation des lois nationales et de la Convention CITES(convention internationale sur le commerce des espèces de faune et de la flore sauvage menacée d’extinction). Selon nos sources bien fondées, cette famille a largement brillée dans cette activité illégale durant au moins 30 ans au détriment de l’Etat, c’est avec ces profits illégaux que la famille Sidibé a pu construire des villas et immeubles en Guinée ou ailleurs et effectuer de nombreux voyages à Dubaï, en Asie, aux USA, et en Europe.
Les enquêtes menées par le projet GALF, membre du réseau EAGLE (EcoActivist for LawEnforcement) ont fourni une gamme de documents dans lesquels les transactions financières et bancaires ont été signalées. Notamment, lors de l’arrestation de A. Doumbouya, ancien chef CITES, dans son ordinateur a été retrouvé à l’intérieur de dossiers cachés et verrouillés avec précaution les fameux permis CITES qu’il a délivré à Abdourahamane Sidibé pour l’exportation illégale des chimpanzés en Chine.

Egalement, le Département de la Sécurité Intérieure des Etats-Unis, dans le cadre d’une enquête mené par les Etats-Unis sur la famille Sidibé, a même fourni au Procureur des dossiers et preuves flagrantes montrant l’illégalité de leurs exportations aux USA et des dossiers de transfert d’argent effectués par les deux contrevenants par WESTERN UNION. Abdourahamane Sidibé a reconnu avoir reçu et effectué des transferts d’argent colossaux issus de ce trafic illicite dont les montants via WESTERN UNION s’élèvent environ 450.000 dollars US. Son fils a également reçu des transferts provenant de la Chine.

Ces preuves accablantes devraient permettre au tribunal de comprendre l’importance et l’ampleur du réseau Sidibé et donc de les juger à la hauteur de leur forfaiture et infliger des peines maximales à ces trafiquants internationaux.

Dans sa réquisition, le substitut du Procureur du TPI de Kaloum, Fallou Doumbouya, représentant le Ministère Public avait demandé au tribunal de retenir les prévenus dans les liens de culpabilité pour les délits mis à leur charge et il avait requis un an de prison ferme pour Abdourahamane Sidibé et 4 mois de prison ferme pour Abdoul Salam Sidibé. Cette réquisition du Procureur avait été taxée de faible vue les dégâts incommensurables causés à l’Etat.

Contre toute attente, le Juge Cherif Sow dans son délibéré du vendredi 14 avril 2017, a condamné Abdourahamane Sidibé à 1 an de prison dont 9 mois avec sursis et Abdoul Salam Sidibé à 4 mois de prison dont 2 mois avec sursis. En recevant la demande de la partie civile en sa constitution, et il a demandé aux prévenus de payer un franc symbolique au titre de dommage et intérêt, ceci alors que la partie civile avait demandé 100 millions de Francs Guinéen en réparation des dommages causés à l’Etat.

Dès l’annonce de cette décision, les réactions se sont fait entendre de partout dans le monde. De sources concordantes, font dire que même la communauté internationale qui suivait de très près cette affaire se dit extrêmement déçue et scandalisé par ce verdict qui aurait dû être un exemple de réussite du Gouvernement Guinéen en terme de lutte contre le trafic d’espèce.

La CITES n’est pas prête de levée la sanction qui pèse sur la Guinée avec une telle décision sur l’affaire principale qui a abouti à la sanction. C’est en effet, suite à la délivrance frauduleuse des permis CITES par A. Doumbouya à la famille Sidibé et d’autres trafiquants pour l’exportation illégale des chimpanzés que Genève a suspendue la Guinée.

Suite à l’exportation de 130 chimpanzés et 10 gorilles par ces réseaux criminels via ces permis frauduleux, l’Etat Guinéen a été placé sous sanction par la CITES, Convention Internationale de Nations Unies, depuis 2013. Il s’agit d’une suspension de commerce des 35.000 espèces listées par la Convention, ce qui est la plus lourde sanction que cette Convention peut infliger à un Etat.

Aux dernières nouvelles, l’avocat du Ministère de l’Environnement constitué partie civile et le Procureur ont tous interjeté Appel. Suite à l’Appel, l’exécution de la décision reste suspendue donc les prévenus restent emprisonnés jusqu’à leur prochain procès en Cour d’Appel.

Affaire à suivre

Fatou Kourouma de GALP

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