Accord de coopération entre la Guinée et la Turquie : la question de « Forêt forte » s’invite dans le débat…

La session des lois se poursuit à l’Assemblée nationale. Cette semaine, les députés sont occupés à l’étude de certains textes en commission et en inter commission. C’est le cas de l’accord de coopération entre la République de Guinée et la Turquie, dans le domaine de la foresterie qui a été discuté en inter commission ce jeudi, 8 juin 2017, sous la l’égide de l’Honorable Sékou Benna Camara, Président de la commission ressources naturelles, développement durable et environnement, rapporte un reporter de Guineematin.com qui est sur place.

Les députés venus des différentes commissions générales ont soumis aux cadres du département de l’Environnement, des eaux et forêts, conduits par le secrétaire général, Saïdou Barry Sidibé, une batterie de questions, portant sur la sauvegarde de l’écosystème guinéen en général et de la mise en valeur de cet accord Guinéo-Turc en particulier.

Le président de la commission a rappelé en substance les enjeux de cet accord. « La Turquie s’engage à aider la Guinée à surmonter certains problèmes et défis environnementaux auxquels la Guinée est confrontée », a souligné l’Honorable Sékou Benna Camara, avant de demander au département de décliner les dispositions envisagées par la COP21 pour combler le trou laissé par les Etats Unis d’Amérique qui ont annoncé leur retrait de l’accord de Paris.
En réponse, le Secrétaire général du département a rassuré l’engagement du gouvernement à œuvrer pour défendre l’écosystème guinéen. S’agissant de l’accord bilatéral (Guinéo-Turc) proprement dit, un coordinateur sera nommé par chacune des deux parties. Ces deux coordinateurs seront chargés du suivi et de la mise en place du mécanisme de l’accord dans tous les aspects, a expliqué M. Sidibé.

S’agissant du retrait annoncé des USA de l’accord de Paris, le département guinéen de l’Environnement a rappelé que cette situation concerne le monde entier et non pas la Guinée seule ou même l’Afrique. « Il a été prouvé que les pays du tiers monde ne produisent pas assez de gaz à effet de serre ; mais, les absorbent, ils constituent un puits écologique important qui participe à la réduction de ces gaz », a-t-il indiqué.

Le secrétaire général du ministère de l’Environnement a surtout rappelé qqu’à part les Etats Unis, tous les autres grands pays développés et émergents comme ceux de l’Union Européenne, la Chine, l’Inde, le Japon ont décidé de rester dans le cadre de l’accord de Paris.

Comme à l’accoutumée, la question de la société « Forêt forte » s’est invitée dans les débats. Selon le Colonel Sidibé Sidibenet du département l’environnement des eaux et forêts, « cette société exploite des forêts villageoises qui ont atteint leur croissance. Quand cette période arrive, pour éviter de perdre tous ces bois, on les exploite. L’objectif de cette société était d’exploiter les forêts classées de Ziama et de Djekké ».

A en croire le colonel Sidibé, la société « Forêt Forte » menace actuellement de fermer « puisqu’elle se plait de manquer de surface d’exploitation. La société paye les taxes et respecte la surface d’exploitation ; mais, ce sont les exploitants artisanaux qui ne respectent pas les règles. Dès que « Forêt forte » exploite une zone, les paysans viennent mettre des cultures de rente comme le palmier à huile et l’hévéa. Ce qui aggrave la disparition de nos forêts. L’autre problème auquel notre écosystème est confronté reste la production du charbon à grande échelle. La seule solution à ce problème est l’utilisation du gaz domestique. Pour limiter la coupe abusive du bois, nous avons aussi initié le projet de cogestion des forêts, notamment celles communautaires ».

Par rapport à la réduction des surfaces forestières, « c’est un phénomène naturel. Il y a la démographie avec tous ses corollaires ».

Du mauvais comportement de certains éco-gardes, communément appelés conservateurs de la nature. « Leur recrutement s’est fait sans concours. Ce qui a permis à certains individus de moralité douteuse et de faible niveau intellectuel de se faire enrôler. Au fur et à mesure, qu’ils se manifesteront, nous allons les identifier et les extirper des rangs du corps des conservateurs. Déjà, un nouveau recrutement d’agents sortis des écoles techniques des eaux et forêts est prévu dans ce sens », a soutenu le Lieutenant Colonel Thierno Daouda Diallo.

Des plantations forestières en disparition, ces cadres de l’environnement expliquent quand un arbre est vieux, il faut l’exploiter, si non on le perd. Ce qu’on peut envisager pour les forêts de Dalaba et ailleurs, la décision est de remplacer ces plants par des essences locales à croissance locale.

Cependant, ces réponses n’ont pas semblé satisfaire les députés. « Nous sommes renversés par vos réponses. Si vous défendez ici la société Forêt forte, nous ne nous reconnaissons plus. Cette société coupe des bois de moins 60 cm de diamètre. Elle fait la carbonisation et a fini par décimer toutes les forêts périphériques villageoises. En plus, nous voulons connaître l’impact économique de cette société pour les populations », s’est insurgé le député Alpha Mamadou Baldé qui milite pour une révision du contrat de la société Forêt forte.

Le Colonel Sidibé Sidibenet revient pour souligner que le problème de la Guinée, ce sont les Guinéens. « Par exemple, les populations s’opposent au reboisement, alors que les pépinières sont disponibles. Il faut un travail de profondeur auprès des riverains pour les amener à participer à la gestion de nos forêts ».

La culture de l’anacarde et du Maringá s’est invitée dans les discussions.

Finalement, les députés, après avoir survolé les nombreux problèmes liés à la protection de l’écosystème, ont déploré la modicité de l’enveloppe allouée au département de l’environnement. Ils ont exhorté les cadres à œuvrer aussi bien sur le plan national qu’international pour accroître les ressources de ce ministère, jugé clé dans le développement durable.

Abdallah Baldé pour Guineematin.com

Tél : 628 08 98 45

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