Meeting sans bavure à Kaloum : « on devait sécuriser les militants de l’opposition », dit le colonel Bafoé (interview)

Au lendemain du meeting de l’opposition républicaine à Kaloum, de nombreux observateurs ont salué le fait que tout se soit déroulé sans accrochages. Mais qu’est-ce qui explique que l’on n’en soit pas arrivé à des actes de violence comme c’est souvent le cas ? Quelle recette a été concoctée par le colonel Bafoé et ses hommes ? Cet état de fait-il va-t-il se perpétuer quand on sait que d’autres manifestations sont en vue ? Qu’en est-il du cas Elie Kamano ? Pour répondre à toutes ces questions, un reporter de Guineematin.com a rencontré ce lundi 17 juillet 2017, le colonel Ansoumane Camara, connu sous le nom de BAFOE. Le colonel BAFOE est directeur national des Compagnies Mobiles d’Intervention et de Sécurité, relevant du ministère de la sécurité et de la protection civile.

Décryptage !

Guineematin.com : qu’est-ce qui a été fait concrètement hier, dimanche 16 juillet 2017, pour que le meeting de l’opposition réussisse à Kaloum ?

Colonel Ansoumane Camara : je voudrais qu’on situe les choses dans leur contexte. Les organisateurs ont demandé à tenir un meeting à Kaloum, dans les délais qu’il faut. Et, ça a été accordé par les autorités de la ville de Conakry qui nous ont demandé un concours, d’assurer la sécurité de leur meeting avant, pendant et après. Il nous a été demandé d’éviter que des intrus ne viennent perturber, s’introduire pour commettre des mauvais actes. Donc, on a reçu une lettre de mission de l’autorité de la ville de Conakry et on avait le devoir et le doit de défendre et de sécuriser les militants de l’opposition. C’est ce qui fait qu’il y a eu l’entente entre les militants de l’opposition et nous. Par contre, des contre-manifestants étaient allergiques à nous au niveau de Tombo et même certains ont quitté vers la mer et qui voulaient venir au lieu du meeting (boulevard Diallo Telly, ndlr). Ils ont été empêchés par nos services. Je dis tout ça, c’est pour vous situer dans le contexte et que vous compreniez notre position désormais dans n’importe quel mouvement. Quelque soit le mouvement de l’opposition, marche ou meeting, si elle est autorisée par l’autorité, quelque soit la force extérieure, cette force nous trouvera sur son chemin. Nous ne leur permettrons pas d’empêcher les gens de faire leur marche ou leur meeting autorisé. Mais par contre, si elle est interdite, quelque soit aussi la force de cette institution, c’est que toujours force va rester à la loi. Ils vont nous trouver sur leur chemin pour les empêcher de faire ce que l’autorité légitimement établie a interdit. Ce qui veut dire que le meeting d’hier s’est bien passé. Même la marche de l’année dernière (16 août 2016, ndlr) s’était très bien passée. Puisque le délai était entre 8 h et 15 h.

L’accident s’est fait à 17 heures. J’étais très désolé. C’est pour cela qu’on n’a pas à chercher à calculer. L’officier qui s’est rendu coupable de port d’arme sur les lieux d’assassinat, que ce soit lui ou pas, automatiquement je l’ai livré.

Guineematin.com : est-ce que cet officier est toujours entre les mains de la justice d’autant plus que des rumeurs faisaient état de sa fuite ?

Colonel Ansoumane Camara : il est actuellement entre les mains de la justice. Il est là. Vous savez, il y a trop de rumeurs dans ce pays. Après le transport judiciaire, il s’est trouvé que ce n’est pas lui. Parce que, selon le constat, ce n’est pas lui. Mais c’est à la justice le libérer ou de ne pas le libérer. Mais, jusqu’à présent, il n’est pas dans nos rangs, il est à la maison centrale.

Guineematin.com : on a remarqué hier qu’il y avait entente entre forces de l’ordre et manifestants de l’opposition contrairement à ce qui est d’usage. Habituellement il y a provocation et réaction, comment expliquez-vous cela ?

Colonel Ansoumane Camara : c’est un peu comme un malfaiteur un agent de sécurité et la victime. Vous qui êtes victime d’agression ou de vol, vous aimez la police et qu’elle fait. Mais, le malfaiteur voit mal la police qu’il hait. Hier, le vent était du côté des jeunes militants de l’opposition parce que la marche était autorisée et on était là pour eux. Mais, le jour que le contraire va se produire, ils vont nous traiter de tout, de chiens, de mal formés, de loubards. Mais, nous sommes pour les faibles, nous sommes républicains, on est pour l’autorité légalement élue et installée par le peuple de Guinée. Nous sommes des subordonnés à l’autorité civile.

Guineematin.com : les gens ont exprimé leur satisfaction pour hier. Est-ce que vous promettez la même dynamique surtout que des meetings sont en vue dans d’autres communes et une marche pour le 02 août prochain ?

Colonel Ansoumane Camara : ça continuera, il n’y a pas de problème. Si les meetings et la marche sont autorisés par le gouvernorat de Conakry ou par l’administration du territoire et qu’on nous instruits d’encadrer, ils peuvent même aller commencer la marche à Kindia. On va marcher avec eux jusque là où ils veulent et on empêchera quiconque qui va essayer de s’introduire pour perturber la marche. Mais, si elle est interdite, il va sans dire qu’on va s’interposer pare qu’on est là pour appliquer la loi et l’autorité de la loi. L’un dans l’autre, on était tous contents et les choses se sont très bien passées. J’ai vu le leader très content, satisfait des forces de l’ordre. Nous aussi, c’est ce que nous aimons, que nous soyons appréciés par nos chefs.

Guineematin.com : aujourd’hui lundi, l’artiste Elie Kamano voulait organiser une marche qui semble-t-il était interdite. On apprend qu’il a été arrêté. Qu’est-ce que vous en savez mon colonel ?

Colonel Ansoumane Camara : je ne sais pas sur quelle étiquette Elie Kamano il va marcher. Sinon, on connait la société civile. Si c’était un concert au palais du peuple ou au stade, il fait venir ses fans, n’importe quel message qu’il passe là-bas, c’est au nom d’un artiste. Maintenant, dire qu’il va mobiliser les gens un jour comme lundi, jour ouvrable, avec tous les travaux que vous voyez aujourd’hui à Conakry, la circulation est perturbée avec les embouteillages, débarquez les loubards encore, vous vous imaginez ce que ça va faire. Et, il parle au nom de quelle institution ? S’il a des choses à dire, il y a tellement de médias, mais tu baves comme tu veux. Qui a été arrêté parce qu’il est intervenu dans une radio ?

Guineematin.com : quelle va être la suite pour Elie Kamano ?

Colonel Ansoumane Camara : il y a des spécialistes qui vont s’occuper de son cas. Est-ce que sa demande respectait la réglementation en matière de marche ? Est-ce que sa demande a été agréée ? Qu’est-ce qui l’a poussé à sortir si la demande n’a pas été agréée ? Il se fout de qui ? Puis qu’il ya des institutions dans ce pays qui s’occupent de ça, il va répondre fade à celles-ci. Il va passer devant le juge je pense, même si je ne suis pas officier de police judiciaire ou juriste. Ce que je sais, j’ai reçu des instructions selon lesquelles sa marche n’était pas autorisée et que sa demande même ne répondait pas aux critères. Donc, vu tout ça, il est sorti, c’est que c’est nous qu’il veut défier. Mais on a toujours montré que force reste à la loi… Il pouvait aller à la maison de la presse ou faire comme les Alpha Blondy, les Tiken Jah Fakoly qui disent tout dans leurs chansons mais qui ne sortent pas pour manifester. Les Rastamen sont là pour éduquer…

Guineematin.com : quel dernier mot voudriez-vous placer colonel Bafoé ?

Colonel Ansoumane Camara : sans la paix, il n’y a pas de vie. Sans entente, il n’y a pas de paix. Donnons-nous la main. Quand dans les cérémonies officielles vous voyez les leaders de l’opposition et les responsables de l’administration rire ensemble, échanger des accolades ; ça, c’est des exemples entre eux. Mais, quand ils sont face à leurs militants, c’est le contraire qu’ils montrent. Il faut que des choses comme ça cessent. Quand un militant voit un leader de l’opposition échanger cordialement avec un ministre de l’intérieur, entrain de s’amuser, je pense que c’est très beau à voir. Sinon, rien ne peut aller dans la pagaille… Donc, je demande la paix, l’entente et de la considération pour l’Etat. Quand l’autorité de l’Etat est respectée dans un pays, ça rassure les partenaires, ça crédibilise le pays et ça fait respecter les autorités même à l’extérieur…

Propos recueillis par Alpha Mamadou Diallo pour Guineematin.com

Tél.: 628 17 99 17

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