Déguerpissement à Conakry : le ministère de la sécurité dresse un bilan à mi-parcours (Interview)

Le ministère d’Etat en charge de la sécurité a entamé, la semaine dernière, une vaste opération de déguerpissement des voiries urbaines Conakry. Six jours après le début de cette campagne, le département se félicite déjà des résultats obtenus sur le terrain. Dans une interview accordée à Guineematin, ce mercredi 18 octobre 2017, le chef de cabinet du ministère de la sécurité, Nouhan Traoré,  a parlé du déroulement de cette campagne de déguerpissement.

Guineematin.com : votre département a lancé une opération de déguerpissement à Conakry. Concrètement, il s’agit de faire quoi ?

Nouhan Traoré : Comme vous l’avez si bien dit, depuis un certain temps, le ministère de la sécurité  et de la protection civile est engagé dans une opération que nous appelons  plan d’urgence de la sécurité routière pour faire face à la récurrence  des accidents de la circulation que nous connaissons en Guinée, pour faire face aux embouteillages qui caractérisent notre circulation routière à Conakry. Avant que les états généraux de la sécurité routière se tiennent, on a jugé utile de mettre sur place un plan d’urgence  de la sécurité routière, qui n’est autre chose que les actions de maintenant là. Puisque les accidents n’attendent pas, les embouteillages n’attendent pas, que faut-il faire pour freiner cet élan et  maintenant en attendant les états généraux ? D’où l’idée de plan d’urgence de la sécurité routière. Donc, c’est une démarche anticipative, une démarche de prévention qui va être déroulée en deux temps. D’un côté, on a jugé utile de sensibiliser nos concitoyens, les populations en général sur les dangers liés à un certain nombre de comportements. On a donc organisé les émissions débats télévisés et des débats radiodiffusés. Mais aussi on a fait des spots à travers des agences de communication, 32 spots sont aujourd’hui diffusés en français et dans quatre de nos langues vernaculaires. Aussi, les ONG sont impliquées pour procéder à des sensibilisations porte-à-porte auprès des usagers, notamment à la gare routière et bien d’autres endroits qu’on a identifiés à cet effet. Donc, après ces sensibilisations, on arrive à l’action de répression qui va consister, comme on le constate maintenant, à déguerpir les endroits publics pour assurer la meilleure fluidité de la circulation, qui consiste effectivement  à arraisonner ces véhicules abandonnés tout au long de la route. A date, il y’a une cinquantaine de véhicules  qui se trouvent dans cinq fourrières qu’on a mises en place. Et c’est cette action qui se poursuit.

Guineematin.com : pour ce plan d’urgence de la sécurité routière, quel est le nombre d’agents déployés sur le terrain ? Et pour quelle durée ?

Nouhan Traoré : le plan d’urgence, comme son nom l’indique, a une durée de vie de trois mois. Et, on a déployé 911 agents et ce chiffre n’est pas définitif. En fonction du besoin du terrain on peut soit augmenter le chiffre par la hausse ou le réduire purement et simplement. Mais à date, nous estimons que cet effectif-là est capable d’abattre les résultats que nous attendons d’eux.

Guineematin.com : justement parlant de résultat, quel bilan pouvez-vous tirer  des six jours de déguerpissement ?

Nouhan Traoré : la campagne a démarré le jeudi passé. Donc, dès demain, nous tombons sur la semaine. Le volet opérationnel de déguerpissement suit son cours normal et en même temps les sensibilisations. A date qu’est-ce que nous constatons ? Déjà d’après les constats de terrain, l’opinion publique nationale est largement satisfaite de cette campagne.  La population aujourd’hui  se sent très soulagée par la fluidité de la circulation à Conakry, surtout à des heures d’habitude de pointe, premier constat. Deuxième constat, les abords des marchés étant déguerpis, les marchands ont pris place à l’intérieur des marchés. Ils ne vont plus déborder et nous de notre côté, il faut le reconnaître, c’est une œuvre humaine, donc qui est porteuse, soit d’insuffisances, que nous sommes en train de corriger. Par exemple, il y’a certains axes qui ne sont pas totalement déguerpis, c’est le cas par exemple du pont de Moussoudougou (8 novembre) et la route le Niger qui ne sont pas totalement déguerpies.

Guineematin.com : pourquoi ces axes que vous venez de citer ne sont pas déguerpies pour le moment ?

Nouhan Traoré : les ONG qui sensibilisent avant que l’action policière ne  démarre sur le terrain ne sont pas encore passées par là-bas. Donc, on attend justement le passage des ONG et s’en suivra effectivement la descente des agents sur le terrain.

Guineematin.com : quelle est la consigne qui a été donnée aux agents pour mener à bien cette campagne de déguerpissement ?

Nouhan Traoré : bien, le ministre de la sécurité a été très clair. Des consignes qui ont été données aux agents sont très claires. Un, il faut qu’ils mènent leurs opérations dans le strict respect des droits humains, pas de brutalité grossière, pas d’injures, pas de réaction, même  la provocation.  Deuxième consigne, c’est la fermeté. Il faut qu’ils se montrent tout à fait ferme. Bref, tout comportement d’usager qui n’est pas de nature à honorer,  qui est de nature à semer des troubles à la circulation routière soit purement et simplement réprimé. Donc, c’est les consignes fermes qu’ils ont reçues. Déguerpissez,  occupez les lieux dans le cadre du respect des droits de l’Homme. Ce sont ces consignes qui constituent le guide des agents que nous avons déployé sur le terrain.

Guineematin.com : êtes-vous informés que certains de vos agents arnaquent les vendeuses sur le terrain ?

Nouhan Traoré : non pas du tout, ce ne sont que des allégations purement et simplement mensongères. C’est de l’intoxication, parce que ce qui est sûr, nos agents sont aussi surveillés. Nous avons le service de l’inspection régionale des services  de police qui est présent sur le terrain. Nous avons le conseil de discipline qui veille aux grains. Donc, tout manquement de la part d’un agent des consignes qui lui auraient été données va entrainer des sanctions pures et simples. Jusqu’à date, je n’ai pas la preuve tangible selon  laquelle certains agents se livreraient à des pratiques, mais ce qui est sûr nous demeurons vigilants vis-à-vis de ce comportement.

Guineematin.com : ce n’est pas la première fois qu’on organise ce genre de campagnes de déguerpissement, quelle est la particularité de l’opération en cours ?

Nouhan Traoré : ce qui caractérise ce plan d’urgence, en premier, c’est sa durée, il n’y a jamais eu une action de déguerpissement qui a duré plus d’une semaine. La durée de vie de ce plan d’urgence, qui va être suivi directement de la tenue des états généraux de la sécurité routière, est de trois mois. En deuxième lieu, c’est le nombre aussi d’agents déployés, 911 et qui peut varier suivant les circonstances  et les besoins. Aussi, il faut noter la sensibilisation de l’ensemble des populations, il n’y a jamais eu une telle campagne de sensibilisation. D’abord, du côté des ONG de porte-à-porte, on a  déployé des animateurs qui sont allés directement rencontrer les gens pour les sensibiliser sur les dangers liés à l’occupation anarchique des artères publiques, il n’y a jamais eu lieu. Il n’y a eu des panneaux qui mettent en relief certains dangers, donc il n’y a jamais eu des spots déclinés dans des  langues vernaculaires du pays par rapport aux dangers liés à la sécurité routière. Autre particularité de taille, c’est la synergie entre les différents départements. Au total, il y’a dix départements impliqués dans ce plan d’urgence et dans les états généraux auxquels s’ajoutent effectivement les acteurs de la société civile.

Interview réalisée par Siba Guilavogui pour Guineematin.com

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