Siddy Sow, mécanicien-handicapé : « si tu es infirme et que tu as les mains…»

Les personnes porteuses de handicap en Guinée sont souvent assimilées à de simples mendiants voire de fainéants. Aboubacar Siddy Sow, né infirme, incapable de se tenir débout, n’est pas de cette catégorie. Il a profité de son handicap pour apprendre la mécanique moto, métier qui lui permet aujourd’hui de satisfaire ses besoins, contrairement à ceux qui pullulent dans les rues de Conakry en train de mendier. C’est ce qu’il a confié à un reporter de Guineematin.com, le mardi dernier, 29 mai 2018, dans son garage, situé au quartier Simambossiyah, dans la commune de Ratoma.

Agé de 34 ans, Aboubacar Siddy Sow, mécanicien de profession, assis dans un fauteuil, tient une jante. Maitre Sow est revenu sur ce qui l’a poussé à opter pour ce métier. « J’avais un vélo sur lequel je partais à l’école. Un jour, le pneu a crevé et ma grand-mère avait pris mon vélo pour envoyer chez un réparateur. Ils ont fixé un prix pour la réparation du vélo. Quand le vélo a été réparé, ma grand-mère devait encore de l’argent au réparateur. Elle devait payer 200 FG, mais elle n’arrivait pas à payer l’argent. Un jour, je quittais l’école quand le réparateur m’a vu. Il m’a dit que si je ne paye pas son argent il va enlever la roue de mon vélo. Il a donc enlevé la roue de mon vélo en me laissant assis par terre. Après, ce sont mes amis qui m’ont aidé à rentrer à la maison. Un jour, ma grand-mère a pris deux kilos de riz pour revendre afin de payer l’argent du réparateur et j’ai reçu la roue de mon vélo que j’ai montée moi-même. Depuis ce jour, moi aussi j’ai décidé de chercher des clefs pour réparer mon vélo en cas de panne », a dit Aboubacar Siddy Sow.

Après le village, Aboubacar Siddy Sow va demander à son père de trouver un garage dans le but d’apprendre la mécanique. « Je réparais le vélo avec un maître. Quand il est décédé, nos voisins mécaniciens m’ont approché pour dire que je connais bien mon travail. Eux aussi, s’ils avaient des travaux sur le moteur, je m’approchais d’eux pour apprendre. On a fait trois ans ensemble et j’ai appris le travail de moteur. Donc, c’est là tout a commencé pour moi », confie-t-il.

Notre interlocuteur reconnait que le travail de mécanicien exige une certaine force. Avec son handicap, il ne peut le faire. Mais, grâce à ses apprentis, dit-il, aucune difficulté ne se pose sur le plan physique. « Je ne peux pas travailler seul. Donc, je travaille avec mes apprentis. Quand il y’a un moteur à ouvrir, je peux venir indiquer aux apprentis les parties où ils doivent ouvrir. Après ça, je fais le travail et à leur tour ils font monter le moteur. Je peux réparer les carburateurs et je demande à un apprenti qui est fort pour pédaler la moto parce qu’il faut pédaler fort la moto », a-t-il expliqué.

Aboubacar Siddy Sow parvient aujourd’hui à joindre les deux bouts grâce à son métier et invite les personnes vivant avec un handicap d’apprendre un métier. Chose qui pourra les libérer de la mendicité. « Ce que je peux dire à mes amis infirmes, c’est d’apprendre un petit métier. Parce qu’il n’y a pas un sot métier, ils peuvent même faire l’horlogerie qui est considérée comme un petit métier. Mais, quand ta montre se gâte, forcément il faut la réparer. Moi, si je viens dans mon garage, même si je ne travaille pas, au minimum je peux rentrer à la maison avec 50 000 fg dans ma poche. Si tu es infirme et que tu as les mains qui sont bonnes, il faut faire quelque chose qui peut te rapporter », a conseillé Aboubacar Siddy Sow.

Siba Guilavogui pour Guineematin.com

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