Cent (100) morts, zéro (0) coupable : y a-t-il une justice dans ce monde ?

De Zakariaou Diallo à Alimou Baldé, ils sont déjà cent jeunes à être tués (la plus part par balles réelles) pour avoir manifesté dans la rue sous le régime du président Alpha Condé, entre le 03 avril 2011 et le 07 novembre 2018. Des milliers de personnes ont été blessés et plusieurs milliards ont été perdus dans les mêmes conditions et pour les mêmes causes.

Chaque fois, le scénario est presque le même : l’opposition fait des déclarations pour solliciter le respect de la loi, plus généralement pour demander le respect d’un calendrier électoral ou protester contre des manipulations des suffrages. Puis, les adversaires du régime (essentiellement Cellou Dalein Diallo et son entourage) appellent à des manifestations de rue ou à des journées « ville morte ». Très écoutée dans la commune de Ratoma, l’opposition entraîne ainsi la paralysie de l’axe qui est systématiquement quadrillé par des agents des forces de l’ordre. En barricadant la circulation pour faire respecter le mot d’ordre de manifestation ou « ville morte », les jeunes sont souvent pourchassés par les agents des forces de l’ordre jusque dans les concessions familiales où des exactions sont commises y compris sur des femmes apeurées…

Cent morts, zéro coupable !

Depuis l’arrivée du président Alpha Condé à la tête de la République de Guinée, la zone Hamdallaye-Bambéto, Cosa, Wanindra, Kagbelin souffre le martyr ; certains l’appellent même la Palestine de l’Afrique ! Être trouvé dans cette zone par des agents de sécurité est terrorisant : ils renversent des marmites trouvées au feu, pillent des domiciles et emportent ce qui peut l’être (biens et personnes). Et, la technique est connue : les citoyens arrêtés qui n’ont personne pour payer leur libération (ou qui n’ont pas été retrouvés à temps par leurs parents) sont présentés à la télévision d’Etat comme des fauteurs de trouble à l’ordre public, arrêtés sur la voie publique, à juger et condamner ; tandis que personne ne répond ni pour les tueries, ni pour les exactions dans les domiciles privés… Pire, la drogue est vendue librement dans ces quartiers ; et, quand il n’y a pas de mouvements politiques, aucune intervention des forces de sécurité quand il y a des appels de détresse des citoyens victimes de banditisme par exemple…

Mais, dans la Guinée d’aujourd’hui, outre les partisans déclarés du pouvoir, il n’est pas rare d’entendre des personnes qui se réclament de la société civile (mais qui sont apparemment à la recherche d’arguments pour défendre le régime) justifier l’assassinat de ces militants de l’opposition par l’interdiction de la manifestation ou la liberté des non manifestants à circuler pendant les journées « ville morte » ou de manifestation. Et, certains insistent sur le fait que ces jeunes opposants soient infiltrés par des brigands (ou missionnaires du pouvoir) qui commettent des exactions sur des simples passants ou qui attaquent des agents des forces de l’ordre comme cela avait été enregistré à Koloma où un gendarme a succombé après avoir été blessé par un jet de pierre…

Aujourd’hui, les familles de ces victimes (civiles comme agents des forces de sécurité) n’ont que leurs yeux pour pleurer. Aucune plainte n’a pour le moment prospéré ! Pire, on fait comme si les victimes étaient des coupables parce qu’ayant bravé une interdiction de manifester. Certains vont même jusqu’à demander à l’opposition d’arrêter ses manifestations ! C’est comme si ceux qui appuient sur la gâchette n’étaient pas des humains auxquels on peut demander de ramener l’ordre sans ôter des vies ou bien l’instauration d’un régime totalitaire sans aucune opposition était synonyme de bonne gouvernance.

Pourtant, tout le monde sait (puisque nul n’est censé ignorer la loi) que la manifestation est un droit consacré par la constitution guinéenne. Et, il n’y a même pas à demander une « autorisation » de manifester ; il y a juste à écrire une lettre d’information aux autorités locales… La même constitution (qui offre tous les attributs et privilèges à nos dirigeants) n’accorde pas aux autorités guinéennes « le pouvoir » d’interdire aux citoyens de manifester. S’il y a des arguments valables, les autorités ne peuvent légalement que modifier l’itinéraire ou proposer une autre date en soutenant ceci par des arguments. Ce qui veut dire que ce ne sont en réalité pas les manifestants qui violent la loi ; mais, ceux qui essaient de les en interdire… Pourtant, même une personne qui aurait commis un délit de violation d’une décision d’un maire, d’un gouverneur, d’un ministre ou qui aurait même violé la loi ne mérite pas d’être tué. Les tueries de manifestants sont donc des crimes à dénoncer, condamner et combattre pour sauver des vies…

Bref, ne pouvant rien espérer dans la Guinée d’aujourd’hui où les intelligences sont abruties par la corruption à grande échelle et l’ethnocentrisme, peut-on espérer trouver une vraie justice dans ce monde ? Y a-t-il de vrais défenseurs des droits humains pour essuyer les larmes de ces centaines de familles endeuillées ? Sincèrement, à quoi servent les membres de la communauté internationale, les ONG, sages et autres intellectuels qui disent défendre les droits humains dans ce monde ?

A préciser que la centième victime de ces répressions (Alimou Baldé) est un élève qui n’est âgé que de 22 ans. Il est originaire de Soïndé (Singueléma) dans la préfecture de Télimélé. Prions pour le repos des âmes de toutes ces victimes et surtout qu’il y ait justice pour que cela s’arrête ! Cent morts sans aucun coupable et en période de paix, cela ne peut se voir qu’en Guinée…

Nouhou Baldé

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