Guinée : Dr. Faya du BL demande aux députés de l’opposition de se retirer du parlement

Dr. Faya Millimouno, président du Bloc Libéral
Dr. Faya Millimono

L’on s’achemine vers la fin du mandat des députés guinéens alors qu’aucune date n’est en vue pour la tenue des élections législatives. Cet état de fait n’est pas du goût de Dr Faya Millimouno, président du Bloc Libéral (BL) qui craint pour l’avenir démocratique de notre pays, à travers « la banalisation de notre République ». Il l’a dit à l’occasion d’une interview accordée à un reporter de Guineematin.com dans l’après-midi d’hier, lundi 07 janvier 2019.

Guineematin.com : le mandat des députés guinéens arrive à expiration très bientôt. Aucune date n’est n’a été annoncée par les tenants du pouvoir pour la tenue des élections législatives. Que vous inspire cette situation ?

Dr Faya Millimouno : nous sommes clairement devant un autre exemple de banalisation de notre République. Le BL avait pourtant signalé, c’était au début de l’année 2018. On a interpellé la classe politique en publiant une déclaration où nous avions dit qu’il y avait une crise qui pointait à l’horizon et qu’il fallait travailler à l’éviter. Chacun a fait la sourde oreille. Et aujourd’hui, nous sommes effectivement dans une situation où notre assemblée, comme c’est fut le cas lors des derniers moments de Lansana Conté, on avait une assemblée périmée. A la mort de Lansana Conté, on ne pouvait prendre un député périmé pour respecter l’ordre constitutionnel. Ce serait violer davantage la Constitution. Ce qui a donné au boulevard ouvert pour les militaires. Il ne faut pas qu’on continue à banaliser la République. On a l’impression, dans notre pays, que la loi est un encombrement. A partir du mois d’Avril, la Guinée va clairement rentrer en période transitoire. On a difficilement quitté la période transitoire, qui a commencé en 2010. Et encore, nous allons vers une autre période transitoire. La question est de savoir, qu’allons nous faire de cette énième période transitoire pour notre pays ?

Guineematin.com : que faut-il faire alors Dr Faya ?

Dr Faya Millimouno : nous interpellons nos amis qui sont dans cette assemblée. Si de nouveau, ils emboitent le pas à la mouvance présidentielle dans la violation de la loi, il faut se rende à l’évidence qu’il n’y a pas d’alternative en dehors du Bloc Libéral.

Guineematin.com : vous voulez mettre en garde contre une prolongation de leur mandat ?

Dr Faya Millimouno : on a l’impression que les gens commencent à émettre l’idée qu’il y ait une prolongation. La Constitution, ni aucune loi de la République, ne donne droit à un député de prolonger son mandat. Le président de la République non plus n’a pas le droit de prolonger le mandat. Nous sommes clairement entrain de banaliser cette République, et on est entrain de devenir comme une République bananière aujourd’hui. Voilà la situation devant laquelle nous nous trouvons aujourd’hui.

Guineematin.com : quelle solution préconisez-vous pour sortir de cette situation ? Une dissolution du parlement ?

Dr. Faya Millimono

Dr Faya Millimouno : on ne parlera même pas de dissolution, on parle de la disparition. Parce que l’Assemblée est désormais illégitime, illégale. Elle ne peut pas plus parler au nom du peuple, elle ne représente plus les guinéens. Il aurait fallu qu’on organise les élections tel que prévu pour qu’à partir du 05 avril prochain, une autre législature commence. Voilà ce que les gens doivent éviter. Beaucoup sont entrain de dire que le professeur Alpha Condé va organiser une modification de la Constitution pour un 3ème mandat. Il peut ne pas. Peut être qu’il est entrain de trouver une solution en commençant par faire un glissement au niveau de l’Assemblée. Ils sont au nombre de 114. Si les guinéens avalent la pilule de voir le mandat des députés aller au-delà de ce qui leur a été accordé par le peuple de Guinée, il se sentira tout à fait confortable d’aller au-delà de 2020. Et, on peut bien se trouver dans une situation où le professeur Alpha Condé peut rester au pouvoir pendant 5 ans, voire 10 ans sans organiser des élections. On a vu tout ça en Côte d’Ivoire, on est entrain de le vivre aujourd’hui au Congo Kinshasa. Donc, faisons très attention. C’est pour cette raison que nous continuons à interpeller tous ceux qui sont de l’opposition et qui sont à l’Assemblée, c’est le moment de faire une déclaration pour dire « nous remercions le peuple de Guinée pour nous avoir accordé la confiance pendant 5 ans. Notre mandat est terminé, nous n’avons plus de légitimité et nous ne sommes plus légaux. Et donc, nous suspendons. Terminé ». De cette manière, on verra si le RPG, avec ses députés seulement, va continu er la banalisation de la République en nous parlant de prolongation, parce qu’à ce moment là, nous pouvons simplement aller à l’Assemblée nationale, pour fermer portes et fenêtres et dire chacun n’a qu’à se chercher.

Guineematin.com : qui est responsable de cette situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui ?

Dr Faya Millimouno : le professeur Alpha Condé est clairement responsable de cela. Il est celui qui a prêté serment de veiller au respect de la Constitution, de faire respecter la Constitution et de veiller au fonctionnement correct des institutions. Aujourd’hui, il y a des institutions qui ne sont plus dignes d’être appelé institution républicaine, d’autres qui sont entrain d’être périmées. On se demande si les gens réalisent le danger qui guette. On est entrain de voir mourir devant nous la démocratie et l’Etat de droit pour lesquels, tant de guinéens ont perdu la vie.

Guineematin.com : si les députés arrivaient à quitter carrément l’Assemblée, est-ce que cela ne donnerait pas au président Alpha Condé un boulevard pour concentrer l’exécutif et le législatif entre ses mains ?

Dr Faya Millimouno : il ne le peut pas, parce que la Constitution ne lui donne pas ce droit. La Constitution ne prévoit pas que le président de la République, pour régner en roi, peut simplement ignorer que l’Assemble nationale a une durée déterminée, et donc laisser l’Assemblée périmer. Il n’a pas ce droit. Et, ça serait clairement une période transitoire qu’il va falloir commencer. C’est à cela que le guinéen que nous sommes devons commencer à réfléchir. Il faut que dans notre pays, que nous cessions de considérer la loi comme un encombrement. Aujourd’hui, nous crions sur tous les toits pour parler de démocratie, d’Etat de droit. Mais en réalité, nous n’y pensons pas. Et quand on se rappelle que tant de guinéens qui sont handicapés, tant de guinéens qui ont perdu la vie, qui ont eu leur dignité pour que la Guinée soit démocratique, ça nous choque.

Propos recueillis par Alpha Mamadou Diallo pour Guineematin.com

Tél : 628 17 9 17

Facebook Comments Box