Manifestations à Dubréka : les explications du préfet

Younoussa Le Bon Sylla, ex préfet de Dubréka
Younoussa Lebon Sylla, préfet de Dubréka

Comme annoncé dans nos précédentes publications, la commune urbaine de Dubréka a été le théâtre d’un mouvement de colère au cours des trois derniers jours. Des habitants des quartiers Tersè, Yorokoguéya et Gbéréyiré ont manifesté dans la rue lundi, mardi et mercredi contre les sociétés ALAM et AMG qui exploitent des carrières de granite dans la zone. Les manifestants qui réclament des infrastructures de base dans leurs localités, ont procédé à des actes de vandalisme en saccageant notamment le bureau du conseil de quartier de Tersè.

Plusieurs d’entre eux ont été interpellés par les forces de l’ordre, déployées sur le terrain par la préfecture. Le Préfet de Dubréka, qui déplore l’attitude des manifestants, promet que tous les auteurs de ces actes de vandalisme répondront de leur « forfaiture » devant la justice. Younoussa Lebon Sylla l’a dit à l’occasion d’un entretien qu’il a accordé à des envoyés spéciaux de Guineematin.com dans la ville.

Décryptage !

Guineematin.com : cela fait trois jours que des citoyens des quartiers Yorokoguéya, Tersè et Gbéréyiré manifestent contre les sociétés ALAM et AMG qui exploitent du granite dans les localités. Vous êtes la première autorité de la préfecture, dites-nous qu’est-ce qu’il en est réellement ?

Younoussa Lebon Sylla : je vous souhaite d’abord la bienvenue à Dubreka, pour vous enquérir des informations. Le manque d’information crée souvent la confusion sur le terrain, donc il faut éviter cela. Il y a un problème à Dubreka entre une partie de ma population et les sociétés qui exploitent les carrières de granite effectivement. Mais, ce que je sais par rapport à cette question, à un moment donné, il y a eu l’arrêt des écritures avant l’installation des différentes communes. Donc, avec l’arrêt des écritures (qui est une manière d’arrêter la comptabilité au niveau d’un système d’exploitation ou de la mairie), les secrétaires généraux des communes qui géraient les affaires courantes, il fallait arrêter les écritures avant l’arrivée de la nouvelle équipe de la mairie.

Donc, à un moment donné, il y a eu des soulèvements. Moi-même j’étais obligé d’intervenir sur le terrain. Ils ont posé assez de problèmes par rapport aux forages, les problèmes d’électrification de leurs localités, plus le problème d’écoles : collège et lycée. J’ai pris bonne note, il y a eu des promesses par rapport à cette question. Mais, en tant que tutelle, c’est la commune, les autorités communales qui doivent gérer les affaires de la commune, ce n’est pas la préfecture. Donc, en aucun cas, je n’ai le droit de m’engager pour une telle réalisation ou de promesses à leur égard. Donc, il était question de remettre tout ce que cette localité doit percevoir en matière de ristournes sur le compte de la commune urbaine de Dubreka.

Donc, la nouvelle équipe de la mairie a été installée, il est question de convoquer la première session ordinaire de cette commune, ce qui n’est pas fait encore. Mais, ce que je sais, j’ai toujours eu un droit de regard sur leur système de travail. Ce sont mes prérogatives.

Guineematin.com : depuis l’arrêt des écritures, combien vous avez eu comme recettes en faveur des habitants de ces quartiers ?

Younoussa Lebon Sylla : depuis l’arrêt des écritures jusqu’au 31 juillet 2018, cette localité a une somme au compte de la commune de 167 millions de francs guinéens. Il s’agit bien sûr des quartiers de Tersè, Géréyiré et Yorokoguéya, qui ont eu aussi 45 chargements de granite de 10 mètres cube à leur compte. Ils ont posé le problème, mais avant le problème sans demander, sans revenir à la base pour dire : monsieur le préfet, vous avez promis, on veut que ça soit réalisé. D’un seul coup, sans préalables, ils se permettent de barrer la circulation pour tout monde. On ne les empêche pas de demander, on ne les empêche pas de manifester, mais il y a l’autorité de l’Etat en place. Ils ne doivent pas empêcher les autres de se mouvoir, ils n’ont pas cette autorité.

Le droit de manifestation est reconnu par notre constitution, donc ils ont ce droit, mais ils n’ont pas le droit d’empêcher les autres de sortir de chez eux, de vaquer à leurs activités. Le premier jour, l’autorité de la commune a fait un déplacement pour les rencontrer, et on leur a parlé de leur montant qui est là. On leur a dit, tout ce qu’ils veulent, qu’ils viennent nous faire des propositions puisqu’on ne peut pas faire une proposition à une communauté. C’est eux qui connaissent leurs besoins. Pour une deuxième fois, la mairie est revenue à la charge, elle est allée vers eux pour leur dire : venez on va discuter, on va échanger par rapport à cette question. Ce n’est pas cette société qui refuse de payer vos taxes, les taxes sont là, disponibles sur votre compte.

Venez on va voir si on doit commencer par le forage, si on doit commencer par l’école, s’il faut payer les transformateurs, on va voir ensemble. Comme ça après, on va demander l’appui de ces sociétés et on va demander l’appui de la préfecture, on va demander l’appui des bonnes volontés, les ressortissants sont là. Tout le monde doit contribuer au développement de sa collectivité. Cela n’est pas fait, le samedi, le dimanche, le lundi, le mardi. Mais, on ne peut pas laisser les délinquants venir semer le trouble dans la cité. Donc, on ne les empêche pas, mais il faut libérer la voie pour les autres citoyens de la République de Guinée.

Il faut libérer la voie pour les partenaires sociaux, pour le développement de la Guinée. Donc, c’est pourquoi on a engagé une intervention pour que les voies d’accès soient libérées.

Guineematin.com : des actes de vandalisme ont été enregistrés à l’occasion de ces manifestations : les locaux du conseil de quartier de Tersè ont été saccagés, le domicile du chef de quartier de Tersè a été attaqué ; il y a également eu une réaction disproportionnée des forces de l’ordre qui ont violenté les manifestants. Qu’en dites-vous ?

Younoussa Lebon Sylla : je ne peux pas confirmer pour le moment. Parce que j’aurais appris, je ne suis pas arrivé sur le terrain pour faire le constat. Mais, j’aurais appris qu’il y a eu des actes de vandalisme. Donc, cela sera réprimé. Les fauteurs de troubles vont répondre à leur forfaiture. Parce que c’est un Etat de droit. Donc, ils ont affaire avec la justice.

Guineematin.com : qu’est-ce que vous comptez faire pour apporter des solutions immédiates à cette crise ?

Younoussa Lebon Sylla : la solution est là. J’ai dit à ces gens depuis hier que même la première guerre mondiale s’est terminée sur une négociation. Nous avons vu le syndicat avec l’Etat par rapport à leur augmentation de salaire, ça s’est terminé sur une table de négociation. La mairie est là, je veille sur tout. Ils n’ont qu’à venir vers les autorités pour une négociation, pour des discussions. Mais, je ne peux pas permettre des actes de vandalisme dans la cité.

Propos recueillis par Ibrahima Sory Diallo et Mohamed Doré pour Guineematin.com

Tél. : (00224) 621 09 08 18

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