Tortures d’un détenu : le commandant de la BAC n°8 condamné à 6 ans de prison

Maître Frédéric Foromo Loua, avocat

Le tribunal criminel de Dixinn a rendu son verdict dans le procès du commandant de la BAC n°8 de Kakimbo (Conakry), poursuivi pour tortures d’un détenu. Le commandant Salifou Walto Soumaoro a été reconnu coupable et condamné à 6 ans d’emprisonnement, plus le paiement d’une amende de 10 millions de francs. Un des avocats de la partie civile, interrogé par Guineematin.com, saluent cette décision du tribunal.

Cette affaire remonte à 2016. Dans la nuit du 04 mars de cette année, une équipe de la BAC n°8 basée à Kakimbo dans la commune de Ratoma, s’est rendue au domicile d’Ibrahima Diogo Sow, un jeune marchand, accusé de vol à mains armées. Ils ont défoncé sa porte et ont mis main sur lui et sa compagne avec laquelle il se trouvait à la maison. Les deux ont été conduits immédiatement à Kakimbo où Diogo Sow a été soumis à des traitements inhumains et dégradants.

Une personne non identifiée a réussi à filmer la scène et a posté la vidéo sur les réseaux sociaux. Ces actes de tortures ont ému plus d’un et ont amené un collectif d’avocats (des défenseurs des droits de l’Homme) à se constituer partie civile pour poursuivre le commandant de cette Brigade Anti-Criminalité, accusé d’avoir donné l’ordre à ses agents de torturer le jeune homme. Le Commandant Salifou Walto Soumaoro a été arrêté et placé sous mandat depuis le 30 janvier 2017.

Durant tout son procès devant le tribunal criminel de Dixinn, l’accusé a reconnu avoir participé personnellement à l’arrestation d’Ibrahima Diogo Sow à son domicile, à la Cimenterie, suite à un vol à mains armées perpétré chez un homme d’affaires à Kipé, mais il a nié avoir donné l’ordre de le torturer. Son avocat, maître M’Bomby Mara, a sollicité l’acquittement pur et simple de l’officier de la gendarmerie pour délit non constitué.

Mais, de son côté, le procureur Boubacar 1 Bah a indiqué que l’accusé est effectivement coupable des faits pour lesquels il est poursuivi. C’est pourquoi, il a demandé au tribunal de le retenir dans les liens de la culpabilité, en le condamnant à 5 ans d’emprisonnement et au paiement d’une amende de 5 millions de francs. La partie civile, elle, a demandé au tribunal de condamner le commandant Soumaoro au paiement d’un montant de 2 milliards de francs guinéens à titre de dommages et intérêts.

Le lundi, 04 février 2019, le tribunal a rendu sa décision. Il a condamné l’accusé à 6 ans d’emprisonnement et au paiement d’une amende de 10 millions de francs. Un verdict salué par maître Frédéric Foromo Loua, l’un des avocats de la partie civile, qui parle d’une avancée majeure dans ce domaine. « L’histoire de ce pays est jonchée de séances de tortures. Vous vous rappelez du camp Boiro en passant par le régime de Lansana Conté, la transition et le régime actuel. Chaque régime a usé de la torture pour asseoir son pouvoir, pour intimider, et discriminer.

Aujourd’hui, le commandant Walto a été reconnu coupable de crimes de tortures. Je pense que c’est une avancée. C’est une décision à saluer, même si nous estimons que la sanction est dérisoire par rapport à la gravité de l’infraction. Mais, c’est déjà symbolique de voir un élément des forces de défense et de sécurité dans ce pays, être condamné à de la prison ferme pour avoir torturé un citoyen », a réagi l’avocat.

Nous n’avons cependant pas pu recueillir la réaction de l’avocat de la défense par rapport à cette décision du tribunal.

Saidou Hady Diallo pour Guineematin.com

Tél. : 622 589 527/654 416 922

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