Kaporo-rails (Conakry) : Des bulldozers rasent des maisons comme des châteaux de cartes

Ce qui convient d’être appelé désormais « l’opération de démolition » de Kaporo-rails se poursuit dans la commune de Ratoma. Cette opération musclée de déguerpissement que l’opposition guinéenne qualifie de « sauvage et injuste » durera au maximum une dizaine de jours. Et, l’Etat guinéen, à travers le ministère de la ville et de l’aménagement du territoire, entend aller jusqu’au bout pour récupérer ce qu’il appelle « le centre directionnel de Koloma ».

Ce, malgré la douleur des citoyens de Kaporo-rails qui sont en train de tout perdre comme par enchantement. Et, ce Mardi, 26 Février 2019, les habitants de ce « quartier martyr » assistent à une dégringolade des murs de leurs maisons. Des murs qui, sous le poids des bulldozers, tombent comme des châteaux de cartes, rapporte un journaliste de Guineematin.com qui suit cette « opération de déguerpissement ».

Des murs qui tombent, des arbres qui s’inclinent, des épaves de tôles, des morceaux de bois, des meubles cassés qui jonchent le sol, des bulldozers en rogne, un important dispositif de sécurité, des brouhahas discontinuent et spontanés de jeunes, des tirs de gaz lacrymogène par endroit… Kaporo-rail ressemble aujourd’hui à un champ de bataille.

Depuis quelques jours les habitants de ce quartier assistent impuissamment à une vaste et puissante offensive de l’Eat, qui démoli entièrement leurs maisons. Des maisons qui servaient, jusque-là, d’habitation à plusieurs centaines de guinéens.

Au nom de la « récupération des domaines réservés de l’Etat », la quasi-totalité des habitants de Kaporo-rails (dont des vieilles personnes qui avaient tout investit pour une retraite plus ou moins paisible) sont en train de subir un retour à la case de départ. Ce, après des années de dure labeur et une ‘’épargne’’ difficilement obtenue (au vu des conditions de vie précaires du guinéen).

A chaque jour suffit sa peine ! Et, à moins d’un miracle de dernière minute, ces pauvres citoyens guinéens sont désormais sans abris, sans moyens financiers,…et sans protection avec des bouches à nourrir et des enfants à scolariser et à éduquer.

« Dans son entièreté, Koloma fait 267,5 hectares. Et, le lot un, considéré comme le quartier résidentiel, fait 41 hectares», a récemment expliqué Dr Ibrahima Kourouma, le ministre de la ville et de l’aménagement du territoire. Ce qui, mathématiquement, ramène à une superficie de 226,5 hectares (la zone administrative) à déguerpir.

« Les opérations de déguerpissements doivent durer dix jours au maximum », a confié Dr Ibrahima Kourouma dans une sortie médiatique, la semaine dernière. Dix jours que les populations de Kaporo-rails doivent vivre avec la douleur au ventre, le désespoir dans l’âme,…et le sentiment d’avoir tout perdu comme par magie.

En plus des habitations, des bars, des garages, des gargotes,…ont été complètement ragés sous « l’œil bienveillant » des agents de sécurité qui occupent les lieux comme un terrain à eux conquis. Des agents qui, parfois, font usage de gaz lacrymogènes pour disperser et éloigner les groupuscules de jeunes qui se forment çà et là aux alentours du site où la démolition des maisons se fait à coup de bulldozer.

Dans les conversations très discrètes entre agents de sécurité, certains hommes en uniforme expriment leur désolation par rapport aux opérations en cours et pour lesquelles ils font usage de forces contre les populations. « Mais c’est l’Etat qui est fort », entend-on dans leur conclusion.

A suivre !

Mamadou Baïlo Keïta pour Guineematin.com

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