Fête du 08 mars : l’appel de Hadja Rabiatou Sérah aux femmes de Guinée

A l’occasion de la journée internationale des femmes, célébrée ce vendredi 08 mars 2019, Guineematin.com a rencontré Hadja Rabiatou Sérah Diallo, ancienne présidente du conseil national de transition et actuelle présidente du conseil économique et social de Guinée. L’ex syndicaliste a demandé aux femmes de croire en elles pour avancer.

« Les femmes doivent arrêter de rester cachées ou de se sous-estimer pour devenir des leaders. Les femmes doivent cesser de paraître pour être. Les femmes doivent savoir que tout ce que les hommes font, elles peuvent le faire. Dieu même est convaincu que la femme dans un foyer est rassembleur.

Dans une famille, si la femme meurt en première position, les enfants seront désœuvrés. Puisqu’avec la maman, les enfants sont consolés, encadrés, suivis et mieux éduqués. C’est une réalité… Je le répète souvent : chez tous les bons chefs, et sous l’arbre à palabre, quand ils sont confrontés à un problème, s’ils n’ont pas la solution, ils disent d’attendre le lendemain puisque la nuit porte conseil.

Ce conseil, ce n’est pas l’oreiller ni la maison qui l’apportent, c’est la femme avec son esprit alerte, son sens d’analyse et ses facultés de comprendre les choses de la vie. C’est elle qui conseille son époux la nuit et donne des solutions aux nombreux problèmes auxquels le mari est confronté », souligne l’ancienne secrétaire générale de la CNTG.

Mais, malgré son importance, la femme reste toujours ségréguée et marginalisée par les hommes, fait remarquer Hadja Rabiatou Sérah Diallo. La « Femme du monde en 2008 », dénonce et condamne cette situation. « Je vous dis que les hommes exploitent les femmes. Dans les partis politiques, ce sont les femmes qui chantent et dansent. C’est elles qui mobilisent les militants. Mais quand il s’agit de prendre les décisions, elles sont reléguées au dernier plan. Ce n’est pas bon », déplore la présidente du CES.

Elle souligne qu’avec 23,28 de femmes candidates aux élections communales de février 2018, elles n’ont recueilli que 6% de conseillères dans tout le pays. Des 342 maires, seules 6 femmes sont maires et une seule est à la tête d’une commune urbaine. Au gouvernement, nous n’avons que 4 femmes sur 39 ministres, une seule gouverneure sur 8 et une femme préfète sur 33.

Pourtant, rappelle-t-elle, « dans le passé, les femmes ont fait l’honneur à ce pays. Jeanne Martin Cissé, a été la première femme à présider le Conseil de sécurité des Nations Unies. Sur le plan national, les Hadja Mafory Bangoura, Mbalia Camara et bien d’autres ont fait honneur à ce pays. Donc, nous devons faire confiance aux femmes. Toute société qui ne prend pas en compte l’aspect genre est vouée à l’échec.

Je saisis d’ailleurs cette occasion pour saluer le Chef de l’Etat, le Pr Alpha Condé, qui a dédié son mandat aux femmes et aux jeunes. Il faudrait que cela soit appliqué de façon visible sur le terrain. Cette année d’ailleurs, le thème de la journée internationale des droits de la femme, porte sur son autonomisation. Les femmes sont sur tous les fronts du développement socioéconomique du pays ».

A la question de savoir comment est-elle parvenue à dominer tout le monde et se hisser à la tête du CES, Hadja Rabiatou Sérah Diallo répond calmement que c’est le résultat de son parcours, de son combat et de la confiance qu’elle incarnait. « … Je n’ai pas ce bagage intellectuel. C’est vrai. Mais quand on veut, on peut. On peut se former sur le tas. Moi, c’est ce que j’ai fait. Quand tu as cette volonté, tu peux avancer dans la vie. Quand le Chef de l’Etat m’a choisie parmi les 10 personnalités, les 25 autres venant des autres structures, nous nous sommes retrouvées, après la publication du décret, pour élire notre bureau exécutif.

Donc, à cause de mon engagement, de mon passé et de la confiance que les gens portent sur moi, ils m’ont élue à la tête du Conseil Economique et Social (CES), sans problème. Je rappelle qu’à l’an 2000, j’ai été élue première femme secrétaire générale de la CNTG. Pourtant, il y avait cinq candidats hommes et il y avait plus d’hommes votants que de femmes. Mais j’ai été élue sans problème à la tête de la plus grande et la vielle centrale syndicale du pays.

Et puis, vous me rappeliez, en 2008, au Pays Bas, nous étions 5 femmes candidates pour le trophée « Femme du monde », et j’ai été choisie. Au CNT, l’organe qui légiférait pendant la transition, j’ai été également portée à sa tête, pendant quatre ans. Donc, c’était vraiment simple pour mon élection à la tête CES. Tout dépend de l’engagement et de la détermination, le tout accompagné de la confiance des uns et des autres sur ta personne », a dévoilé la patronne du Conseil économique social.

Parlant des difficultés dans l’exercice de ses fonctions, Rabiatou Sérah relativise. « Je n’ai pas de difficultés particulières au Conseil. Les décisions sont collégiales et le travail se fait en équipe. Puisque le CES est une maison de paix, de dialogue, voire un laboratoire d’idées et de propositions à l’endroit de l’exécutif et du législatif. Au CES, vous avez toutes les corporations, toutes les entités qui y sont représentées.

C’est ce qui nous permet d’avoir une idée surtout, de réfléchir sur tous les sujets et de faire des propositions utiles à l’endroit du gouvernement et de l’Assemblée nationale. Dans ce travail, rien n’est sorcier. Ce n’est pas nouveau chez moi. Au CNT, on était 155 membres sans compter le personnel. Parlant de celui-ci, nous avons élaboré un statut particulier pour le personnel afin de garantir son existence juridique. Donc, je n’ai pas de problème ».

Pour briser le tabou chez les femmes, Hadja Rabiatou Sérah Diallo, insiste sur un conseil. « Les femmes doivent oser. Elles doivent faire confiance en elles. Les femmes doivent cesser de se sous-estimer. Depuis le foyer, la femme doit savoir négocier avec son mari, l’amener à comprendre la nécessité de se compléter dans le ménage et surtout aider le mari à comprendre qu’il est de son intérêt d’œuvrer à l’équilibre familial.

Je vais demander donc aux femmes qu’elles se forment, qu’elles travaillent courageusement et qu’elles se fassent confiance. Les femmes doivent également être plus solidaires entre elles et se tenir solidement les bras pour avancer ensemble. Nous devons nous soutenir les unes des autres, sinon, ce n’est pas facile de renverser la tendance actuelle », a conclu Hadja Rabiatou Sérah Diallo.

Abdallah BALDE pour Guineematin.com
Tél : 628 08 98 45

Facebook Comments Box