Haute Guinée : la mine d’or de Kankan Coura ne fait plus recette, au grand dam des jeunes

La mine d’or, découverte pour la première fois à Kankan au mois de septembre 2018, au quartier Kankan-Coura, dans la commune urbaine, avait suscité un grand engouement chez les jeunes. Mais aujourd’hui, cet engouement n’est plus de mise et la mine ne fait plus recette. C’est désormais le désespoir qui se lie sur les visages des rares citoyens qui s’y aventurent, rapporte le correspondant de Guineematin.com basé dans la préfecture.

La découverte de cette mine d’or à Kankan Coura avait plongé la région dans un processus nouveau, attirant les jeunes de toutes les préfectures de la région. Aujourd’hui, le constat révèle que la zone a été désertée suite à sa fermeture. On n’y rencontre qu’une vingtaine de jeunes à la recherche désespérée de l’objet précieux.

La révélation de l’existence de l’or sur les lieux par les médias avait conduit à sa fermeture par les autorités. A Kankan Coura, les tombolomans (gendarmes de la mine) gardent en travers de la gorge ce « mauvais rôle » joué par les médias. « Nous, on ne veut pas la collaboration des medias dans cette mine. Tout Kankan le sait, tout ce qu’on est en train d’endurer ici aujourd’hui, c’est grâce aux hommes de medias. Ils nous sont diffamés. Donc, nous ne voulons pas voir les journalistes ici », a dit un d’entre eux.

Un autre renchéri en disant avoir beaucoup perdu suite à l’implication des médias et la fermeture de la mine pour quelques semaines. « Cela a été une grande crise pour les mineurs, parce que la mine a été fermée. Quand on la fermait, moi j’étais en train de gagner beaucoup d’or. Si les gens n’avaient pas peur de moi en ce moment, ils allaient venir creuser pour se faire beaucoup d’or ».

Notre reporter parviendra, non sans peine, à les convaincre du bien fondé de sa présence. « Actuellement, nous sommes là, seulement parce qu’on ne peut pas rester dans les cafés. Au début, ici était rempli de monde. Quand tu venais ici pour retrouver quelqu’un, c’était difficile. Même si tu l’appelais, il ne pouvait pas savoir que son téléphone sonne. Beaucoup de pauvres citoyens gagnaient leur quotidien ici. Les femmes ont abandonné leur commerce dans les marchés à l’époque pour venir vendre de quoi manger et elles gagnaient beaucoup d’argent en fin de journée. La manière dont vous êtes venus comme ça, si c’était à l’époque, on pouvait vous donner du gravier, peut-être que ça pourrait vous rapporter de l’argent », a laissé entendre un autre Tömböloma, sous anonymat.

Au niveau de la mine proprement dite, le constat est saisissant. Lounceny Doumbouya et deux de ses coéquipiers sont en action. Une personne se trouve dans un puits, elle remplie un seau de gravier, que Lounceny tire et vide avec un autre. « Nous sommes des jeunes, nous ne pouvons pas rester à la maison, tout ceux qui sont là ont du métier. Moi, je suis apprenti-chauffeur sur la nationale Conakry-Bamako, mais si tu vois que j’ai quitté là-bas pour venir ici, c’est parce que souvent notre voiture tombait en panne. Donc, si on venait expliquer cela à notre patron, il racontait beaucoup de choses sur nous. Mais ici, si je gagne, Dieu merci ; si je ne gagne pas aussi, Dieu merci, on ne dérange personne. Au début on gagnait beaucoup d’argent par jour, mais actuellement on se débrouille seulement », a dit Lounceny Doumbouya.

A quelques pas de là, Mamady Kourouma, originaire de Mandiana, est entrain de creuser un puits. Selon lui, il gagne 20.000 fg par jour en restant dans la mine, mais s’apprête à quitter les lieux. « Il n’y a plus d’or ici. Moi, je suis là seulement parce que je n’ai pas beaucoup de choses à faire. Venir ici vaut mieux que de s’asseoir de croiser les bras. Je gagne au moins 20.000 fg par jour en venant ici. Sous peu de temps, nous allons tous disparaître ici, parce que le propriétaire des lieux aura besoin de ses terres pour planter de l’anacarde. Avant la découverte de cette mine, moi j’étais à Mandiana. J’ai été appelé pour venir. Quand je quitterais ici, je retournerais à Mandiana », a-t-il fait savoir.

Selon les Tomboloma, des gens de mauvaise foi auraient ensorcelé la mine d’or pour ne pas qu’elle produise l’objet précieux, en y enterrant des objets maléfiques. Ce qui est sûr, c’est que cette mine d’or n’attire plus les jeunes comme à sa découverte. Le petit nombre que l’on rencontre sur les lieux promet de quitter dès le début de la saison pluvieuse.

De Kankan, Abdoulaye N’koya SYLLA pour Guineematin.com

Tél. : (00224) 627 24 13 24

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