Débat sur la Constitution : le regard d’un étudiant guinéen vivant à Dakar

Depuis un temps, la question de la possibilité pour le Président de la République de Guinée de changer la constitution guinéenne de 2010 est au cœur des controverses entre les acteurs de la vie juridico-politique du pays.

Il est d’une importance capitale que chaque juriste, étudiant ou praticien s’active, dans les limites de ses connaissances, pour apporter avec honnêteté, intelligence et persévérance une certaine contribution.

Il convient d’emblée de souligner que le débat intellectuel doit être constructif, éducatif et intelligent. Il ne doit y avoir ni injures ni haine. Comme l’a dit Antoine de Saint-Exupéry dans la Citadelle, « si tu diffères de moi mon frère loin de me léser tu m’enrichies. »

Ceci étant, la beauté d’une discussion ne réside pas seulement dans la diversité d’idées, mais aussi dans sa finalité qui doit être une conclusion saine et logique tirée des arguments raisonnés.

En effet, deux groupes divergent sur la constitution guinéenne de 2010. L’un est favorable à l’élaboration d’une nouvelle constitution qui pourrait éventuellement permettre au Président de la République de briguer un troisième mandat (chose qui est en contradiction avec l’article 154 de la constitution), et l’autre ne l’est pas. Certains estiment qu’en vertu de l’article 51 de la constitution, le Président de la République peut prendre l’initiative de changer ladite constitution, et soumettre une nouvelle au peuple. D’autres soutiennent que cette idée est à écarter à partir du moment où ledit article n’a aucun lien avec le changement constitutionnel.

Face à ces divergences idéologiques sur la compréhension de la question soulevée, loin d’avoir le monopole du savoir, il urge plus que jamais d’analyser sommairement la situation.

Pour faire apparaître et comprendre la cohérence des argumentations, il sera question d’aborder brièvement la mutabilité constitutionnelle (I) et la réflexion sur le contexte guinéen (II).

« Je suppose les hommes parvenus à ce point où les obstacles qui nuisent à leur conservation dans l’état de nature l’emportent par leur résistance sur les forces que chaque individu peut employer pour se maintenir dans cet état. Alors cet état primitif ne peut plus subsister, et le genre humain périrait s’il ne changeait sa manière d’être.

Or comme les hommes ne peuvent engendrer de nouvelles forces, mais seulement unir et diriger celles qui existent, ils n’ont plus d’autre moyen, pour se conserver, que de former par agrégation une somme de forces qui puisse l’emporter sur la résistance, de les mettre en jeu par un seul mobile et de les faire agir de concert. »[1]

Pour que les hommes puissent unir et diriger les forces déjà existantes, il faudrait bien qu’ils s’organisent en créant un État, car, «  La justice et la propriété commencent avec la constitution de l’État. » écrivait Thomas Hobbes dans  ‘’Léviathan’’.

Depuis des siècles maintenant, les États sont constitués, bien qu’en Afrique nos États sont jeunes parce qu’ils sont nés pour la plus part dans les années 60. Cette période marque également la naissance de nos constitutions. De passage, il est logique de souligner que la première constitution guinéenne date de 1958, date à laquelle l’État guinéen a vu jour. Cette constitution a considéré la République de Guinée comme un Etat indépendant et souverain[2].

En effet, la constitution est à la fois le statut juridique de l’Etat. Elle organise l’Etat et le régime de garantie des droits du citoyen face à ce même Etat.[3] En d’autres termes, la constitution est le texte fixant les règles juridiques fondamentales d’organisation et de fonctionnement de l’État et de ses institutions, ainsi que les droits et les libertés des citoyens. Elle est aussi appelée ‘’loi fondamentale’’.

Contrairement au Royaume-Uni où la constitution n’est pas écrite, celle de la Guinée est formelle, donc écrite. La constitution guinéenne en vigueur est celle de 2010.

La constitution est adoptée par le pouvoir constituant originaire, c’est-à-dire par le peuple qui exerce sa souveraineté par voie de référendum. Pour plus de précisions sur les termes, le ‘’pouvoir constituant » est le pouvoir qui a reçu un mandat pour créer ou réviser la Constitution d’un Etat. Il nécessite donc de distinguer le pouvoir constituant originaire du pouvoir constituant dérivé.

Le pouvoir constituant originaire est l’organe chargé d’élaborer la première (ou une nouvelle) Constitution. Ce pouvoir est qualifié d’originaire parce qu’il intervient chaque fois qu’il y a un vide constitutionnel suite à la fondation d’un nouvel Etat, d’un effondrement ou d’un consensus pour changer le régime politique en place.[4] Dans une démocratie, ledit pouvoir est détenu par le peuple.

Le pouvoir constituant dérivé est un pouvoir constituant prévu par la Constitution elle-même, qui lui confère une compétence de révision constitutionnelle. Il tire sa légitimité et son fondement du pouvoir constituant originaire, par le biais de la Constitution.

Le pouvoir constituant dérivé est celui donc, non plus de créer une nouvelle constitution, mais seulement de modifier celle qui existe, selon les modalités et dans les limites fixées par la constitution en vigueur.[5] Il s’agit pour le cas guinéen du Président de la République et des députés qui doivent agir concurremment.[6]

  1. De la mutabilité constitutionnelle

Il est d’une certitude incommensurable qu’aucun constituant n’a pensé élaborer pour l’éternité un texte constitutionnel insusceptible de modification[7], tout simplement parce que l’œuvre humaine n’est pas parfaite. Raison pour laquelle, chaque pays a pratiquement connu des mutations constitutionnelles.

C’est pourquoi, il convient d’examiner le changement constitutionnel (A) et la révision constitutionnelle (B).

  1. Du changement constitutionnel 

La constitution étant la loi suprême, c’est-à-dire celle supérieure à toutes les autres lois applicables dans un pays, peut faire l’objet de changement. Le changement constitutionnel pose la question du pouvoir constituant originaire qui doit exercer sa souveraineté.

En effet, ce changement obéi à certaines conditions qui sont diverses et variées. Ces conditions sont filles de l’histoire du droit constitutionnel.

Pour qu’une constitution puisse être changée, il faut bien que le pays soit dans une situation de mutation, c’est-à-dire de renouvellement. Les événements qui peuvent conduire à un changement constitutionnel sont les suivants : l’indépendance d’un État[8], la révolution, la junte militaire (coup d’État), le renversement de dictature, l’adhésion à un Etat fédéral, le gouvernement provisoire.[9] Certains auteurs parlent même du vide juridique déjà existant, qui va conduire à la création d’un nouvel Etat, et du vide juridique créé, dont la conséquence est la rupture entre les régimes.[10]

À titre illustratif, il nécessite de citer la France, en 1818 après le retour de la monarchie, la République de 1848 après l’abolition de la monarchie, le retour de la République en 1870 après le régime du second empire. C’est le cas également de la Russie soviétique en 1917.

Le changement constitutionnel doit avoir un caractère novateur mais nuancé qui peut s’inspirer des constitutions des pays voisins[11], bien que d’après Montesquieu, en parlant de la singularité des lois, les lois « …doivent être tellement propres au peuple pour lequel elles sont faites, que c’est un très grand hasard si celles d’une nation peuvent convenir à une autre. »[12]

Une nouvelle constitution est rédigée selon la volonté du gouvernement nouvellement établi. Ledit gouvernement n’est à priori soumis à aucune règle spécifique de l’élaboration à l’entrée en vigueur de la nouvelle constitution. Cependant, deux modalités d’établissement d’une nouvelle constitution sont de coutume dans la pratique du droit constitutionnel.

1ère modalité : le mode d’établissement autoritaire qui est le processus fermé ou secret, par lequel le gouvernement prend l’initiative d’élaboration, de rédaction et d’adoption d’une nouvelle constitution sans même la soumettre au peuple, qui en principe est habilité à l’adopter.

2ème modalité : le mode d’établissement démocratique. Par ce mode, le gouvernement passe par le peuple pour l’adoption de la constitution nouvellement établie. Au regard de la démocratie, qui est l’idéologie dominante, et qui doit servir de critère de référence, c’est au peuple qu’appartient le pouvoir constituant originaire, et c’est lui qui, en principe doit adopter la nouvelle constitution.[13] Ce processus peut se matérialise suivant trois manières :

–           Le peuple va élire une assemblée constituante pour la rédaction et l’adoption de la constitution. C’est le cas de la convention de Philadelphie de 1787, dont l’Assemblée constituante était dénommée les pères fondateurs. Ces pères fondateurs ont élaboré la constitution américaine ;

–           La démocratie semi-directe, qui consiste à élire une assemblée constituante pour l’élaboration de la constitution qui sera adoptée par le peuple par voie de référendum ;

–           La démocratie directe, qui consiste pour le peuple de participer à la rédaction de la constitution avant de l’adopter. Cette possibilité n’est ouverte que pour les petits États où le peuple peut discuter lui-même de la rédaction des textes de droit. C’est le plus difficile, mais le plus démocratique.

  1. De la révision constitutionnelle

La révision constitutionnelle est la modification « partielle » d’une constitution. Cette révision consiste à modifier les dispositions fondamentales, et par conséquent, la nouvelle constitution peut « changer l’esprit et la philosophie » de l’ancienne.

Cependant, la nouvelle constitution ne doit en aucun cas être en contradiction avec les dispositions intangibles[14] de l’ancienne. Ceci étant, la modification doit porter sur certaines dispositions, et non sur l’ensemble du texte, parce que les intangibilités constitutionnelles sont des valeurs démocratiques acquises.

Dans le cas d’espèce, c’est la constitution elle-même qui prévoit sa révision,[15] laquelle révision se matérialise par le pouvoir constituant dérivé.

La constitution prévoit des conditions de temps, de fond et de procédure que le pouvoir constituant dérivé est tenu obligé de respecter pour procéder à une révision constitutionnelle. Ces conditions sont définies par les articles 152, 153 et 154 de la constitution.

Primo, l’article 152 de la constitution dispose que : « L’initiative de la révision de la Constitution appartient concurremment au Président de la République et aux Députés.

Pour être pris en considération, le projet ou la proposition de révision est adopté par l’Assemblée Nationale à la majorité simple de ses membres. Il ne devient définitif qu’après avoir été approuvé par référendum.

Toutefois, le projet de révision n’est pas présenté au référendum lorsque le Président de la République décide de le soumettre à la seule Assemblée Nationale. Dans ce cas, le projet de révision est approuvé à la majorité des deux tiers des membres composant l’Assemblée Nationale.

Il en est de même de la proposition de révision qui aura recueilli l’approbation du Président de la République. »

Cet article pose le fondement procédural à respecter pour procéder à une révision constitutionnelle en Guinée.

secundo, il existe des périodes pendant lesquelles il est formellement interdit d’entreprendre une procédure de révision constitutionnelle. Ainsi, l’article 153 de la constitution dispose qu’ : « aucune procédure de révision ne peut être entreprise en cas d’occupation d’une partie ou de la totalité du territoire national, en cas d’état d’urgence ou d’état de siège. »

Tertio, la constitution interdit formellement de modifier certaines dispositions. L’article 154 s’inscrit dans ce sens en disposant que : « La forme républicaine de l’Etat, le principe de la laïcité, le principe de l’unicité de l’État, le principe de la séparation et de l’équilibre des pouvoirs, le pluralisme politique et syndical, le nombre et la durée des mandats du Président de la République ne peuvent faire l’objet d’une révision. » Ces interdictions ou intangibilités donnent une singularité et une valeur particulière à la constitution guinéenne et par voie de conséquence, elles méritent d’être conservées.

Après cette étude sommaire des notions de changement et de révision de la constitution, il apparaît nécessaire maintenant d’orienter la réflexion sur le contexte guinéen.

  1. La réflexion sur le contexte guinéen

Compte tenu de la discorde intellectuelle qui prévaut dans le pays, il importe d’apporter une réflexion neutre et saine, basée uniquement sur la logique et les textes de droit en vigueur.

La réflexion sera focalisée sur l’opportunité d’une révision constitutionnelle (A), ainsi que l’impossibilité pour le président de la république de prendre l’initiative de changer la constitution de 2010 (B).

  1. L’opportunité d’une révision constitutionnelle

Il est plus que jamais important pour un État d’adapter sa constitution aux principes et valeurs de la démocratie. Mais il faudrait bien que cette adaptation soit en harmonie avec les besoins du peuple et aux réalités du moment. 

D’après Montesquieu, « un état peut changer de deux manières : ou parce que la constitution se corrige, ou parce qu’elle se corrompt. S’il a conservé ses principes, et que la constitution change, c’est qu’elle se corrige ; s’il a perdu ses principes, quand la constitution vient à changer, c’est qu’elle se corrompt. »[16]

En effet, la constitution guinéenne de 2010 comporte beaucoup de manquements, d’où la nécessité de procéder à sa révision dans le respect strict des conditions sus définies. Il serait par exemple idoine et salutaire d’élargir le champ politique à tous les citoyens jouissant de leurs droits civiques et politiques de se présenter aux élections présidentielles, il s’agit bien des candidatures indépendantes. Sur les rapports entre le Président de la République et le Premier Ministre également.

A cela, il faut ajouter la nécessité de blinder la procédure de révision constitutionnelle. Il est bien important d’introduire le contrôle de constitutionnalité du projet ou de la proposition de révision, parce qu’en cas de violation des dispositions intangibles, qui peut sanctionner le pouvoir constituant dérivé, et quelle sera la sanction ?

  1. l’impossibilité pour le président de la république de prendre l’initiative de changer la constitution de 2010

Il apparaît opportun de signaler qu’aucune loi en vigueur en Guinée ne permet au Président de la République de changer la constitution. Pour ceux qui croient qu’il peut le faire par le biais de l’article 51, il faut essayer de bien interpréter ledit article.

L’article 51 dispose que : « le Président de la République peut, après avoir consulté le Président de l’Assemblée Nationale, soumettre à référendum tout projet de loi portant sur l’organisation des pouvoirs publics, sur la promotion et la protection des libertés et des droits fondamentaux, ou l’action économique et sociale de l’Etat, ou tendant à autoriser la ratification d’un traité.

Il doit, si l’Assemblée Nationale le demande par une résolution adoptée à la majorité des deux tiers des membres qui la composent, soumettre au référendum toute proposition de loi portant sur l’organisation des pouvoirs publics ou concernant les libertés et les droits fondamentaux.

Avant de convoquer les électeurs par décret, le Président de la République recueille l’avis de la Cour Constitutionnelle sur la conformité du projet ou de la proposition à la Constitution. En cas de non-conformité, il ne peut être procédé au référendum.

La Cour Constitutionnelle veille à la régularité des opérations de référendum. Lorsque le référendum a conclu à l’adoption du projet ou de la proposition, la loi ainsi adoptée est promulguée dans les conditions prévues à l’article 78. »

Il importe de rappeler au prime abord que l’interprétation d’une loi est l’un des exercices les plus difficiles en droit. Dans le cas d’espèce, il nécessite, pour mieux comprendre la quintessence de l’article 51, de faire recours à la technique d’interprétation systémique qui consiste au minimum à dégager le sens d’une disposition particulière à partir de la structure du texte dont elle fait partie, en fonction de sa place dans ce texte et de la structure de ce dernier.

Pour interpréter l’article 51, il faut l’analyser dans sa globalité. Ainsi, l’alinéa 1 donne la possibilité au Président de la République de « …soumettre à référendum tout projet de loi portant sur l’organisation des pouvoirs publics, sur la promotion et la protection des libertés et des droits fondamentaux, ou l’action économique et sociale de l’Etat, ou tendant à autoriser la ratification d’un traité. » Ledit alinéa n’a aucun lien avec le changement constitutionnel, il porte sur les lois référendaires, qui, compte tenu de leur importance, doivent passer par l’approbation du pouvoir constituant originaire.

D’ailleurs, le troisième alinéa vient renforcer éloquemment cette argumentation en précisant qu’ «  avant de convoquer les électeurs par décret, le Président de la République recueille l’avis de la Cour Constitutionnelle sur la conformité du projet ou de la proposition à la Constitution. En cas de non-conformité, il ne peut être procédé au référendum. »

Il faut rappeler que le contrôle de constitutionnalité est un procédé par lequel la Cour constitutionnelle vérifie la conformité des lois ou traités à la constitution en vigueur.[17] La constitutionnalité implique naturellement une supériorité[18] de la constitution à toutes les lois qui doivent être en conformité avec elle.

Le contrôle de constitutionnalité des lois et des traités est une technique de garantie de la suprématie de la Constitution contre l’arbitraire. Il trouve son expression dans la mise en place d’un système efficace de contrôle de la conformité des règles subordonnées à la norme suprême.[19] Ce contrôle de constitutionnalité pose le principe de justice constitutionnelle. [20]

En effet, La Cour constitutionnelle n’a pas pour mission de faire le contrôle de constitutionnalité d’une nouvelle constitution, c’est du moyen ce qui apparaît à l’article 94 de la constitution, ledit article dispose que :

«  La Cour Constitutionnelle statue sur :

  • la constitutionnalité des lois avant leur promulgation ;
  • le contentieux des élections nationales ;
  • le Règlement Intérieur de l’Assemblée Nationale, du Conseil Economique et Social, de la Haute Autorité de la Communication, de la Commission Electorale Nationale Indépendante, de l’Institution Nationale des Droits Humains, du Médiateur de la République, du Haut Conseil des Collectivités Locales quant à leur conformité à la Constitution.
  • les conflits d’attributions entre les organes constitutionnels ;
  • l’exception d’inconstitutionnalité soulevée devant les juridictions ;
  • les recours formés contre les actes du Président de la République pris en application des articles 2, 45, 74 et 90, ainsi que les recours formés contre les Ordonnances prises en application de l’article 82, sous réserve de leur ratification. »

En l’espèce, Hans Kelsen disait dans ‘’la théorie pure du droit’’, que « l’idée d’une ‘norme contraire aux normes’ représente une contradiction in adjecto ; une norme dont on pourrait affirmer qu’elle n’est pas conforme à la norme qui règle sa création ne pourrait pas être considérée comme une norme valable ; elle serait nulle, autrement dit elle ne serait pas du tout une norme juridique. »[21]

En tout état cause, en dehors de toute interprétation juridique, il est possible de faire appel à la logique intellectuelle pour aussi comprendre que l’article 51 n’a aucun rapport avec le changement constitutionnel. Car, la constitution ne peut servir de base de contrôle d’une nouvelle constitution qui vient la remplacer.

Il doit forcément y avoir des contradictions entre les deux textes. Or, il est mentionné à l’alinéa 4 de l’article 51 qu’ : « en cas de non-conformité, il ne peut être procédé au référendum. » donc, cet article est à écarter dans l’argumentaire de ceux qui estiment que le Président de la République peut prendre l’initiative de changer la constitution.

Aussi, il est indéniable que la naissance d’une nouvelle constitution suppose l’abrogation de l’ancienne.

Somme toute, croire qu’une disposition constitutionnelle peut permettre au Président de la République de changer la constitution c’est soit une erreur monumentale, soit une méconnaissance pure et simple du droit constitutionnel, soit une interprétation de mauvaise foi.

Pour clore, à l’état actuel du pays, AUCUNE SITUATION D’EXCEPTION OU D’URGENCE NE PEUT JUSTIFIER LE CHANGEMENT DE LA CONSTITUTION GUINÉENNE DE 2010.

En dépit de tout, le continent africain est devenu l’incarnation de la naïveté intellectuelle qui se manifeste par des coups d’Etats constitutionnels. Les magistrats suprêmes (chefs d’Etats) des pays, qui, parfois sont élus sur la base d’un habillage démocratique, ont tellement soif du pouvoir qu’ils en veulent encore et encore alors que la logique et la raison voudraient que chaque homme respecte inconditionnellement les textes de droit.

« Après tout, il n’a jamais été prétendu qu’une constitution devait être immuable. Son adaptation est nécessaire à l’évolution de la société qu’elle est censée régir. Mais l’idée de manipulation sous-tend une utilisation orientée de la Constitution au profit des intérêts de certains. »[22]

Dakar, le 14 juin 2019

 

[1] J.J ROUSSEAU, du contrat social, chap. VI, du pacte social.

[2] Une étude D’AFRIMAP ET DE L’OPEN SOCIETY INITIATIVE FOR WEST AFRICA, GUINEE, Le secteur de la Justice et l’Etat de droit, 2013, p.7.

[3] H. PORTELLI, Droit Constitutionnel, 8ème éd, 2009, p.31.

[4] El. H. MBODJ, agrégé des facultés de droit, Université Cheikh Anta Diop de Dakar (SENEGAL), THEORIE CONSTITUTIONNELLE, p. 114.

[5] A. Marie le POURCHIET, Droit Constitutionnel, 4ème éd, 2012, p. 54.

[6] Art. 152 al. 1 de la constitution guinéenne de 2010.

[7] El. H. MBODJ, agrégé des facultés de droit, Université Cheikh Anta Diop de Dakar (SENEGAL), THEORIE CONSTITUTIONNELLE, p. 120.

[8] Exemple : la constitution de la République du Soudan du Sud du 9 juillet 2011 remplaçant la constitution provisoire du Sud Soudan de 2005.

[9] Exemple : la constitution guinéenne du 7 mai 2010.

[10] P. PACTET, F. MEUN-SOUCRAMANEN, droit constitutionnel, 30ème éd, 2011, p. 63.

[11] La charte constitutionnelle de la France à l’époque de la monarchie inspirée des grandes chartes de J. S. TERRE de 1215 et de Henry III du 11 février 1225 de l’Angleterre. (cf. J. P. ANDRIEUX, Introduction Historique au Droit, 2ème éd, 2007, p. 288).

[12] Montesquieu, de l’esprit des lois, tome I, livre premier, chap. III,  p. 95.

[13] P. PACTET, F. MELIN-SOUCRAMANIEN, Op. Cit. , p. 3.

[14] Art. 154 de la constitution guinéenne de 2010.

[15] Art. 152 de la constitution guinéenne de 2010.

[16] Montesquieu, de l’esprit des lois, tome I, livre XI, chap. XIV, p. 352.

[17] Art. 93 al. 1 de la constitution guinéenne de 2010.

[18] M. VERPEAUX, manuel de droit constitutionnel, 2010, p. 308.

[19] El. H. MBODJ, agrégé des facultés de droit, Université Cheikh Anta Diop de Dakar (SENEGAL), THEORIE CONSTITUTIONNELLE, p. 126.

[20] D. CHAGNOLAUD, droit constitutionnel contemporain, tome 1, 2ème éd, 2001, p. 49.

[21] K. GÖZLER, Le pouvoir de révision constitutionnelle, Villeneuve d’Ascq, Presses universitaires  du Septentrion, 1997, 2 volumes, 774 pages (www.anayasa.gen.tr/these.htm), p. 452.

[22] M. FAU-NOUGARET, Maître de conférences HDR en Droit Public Université de Bordeaux, Manipulations constitutionnelles et coup d’Etat constitutionnel en Afrique francophone.

Abdoulrahimy DIALLO

Étudiant, Master 1 Droit des Affaires

Université Nelson Mandela de Dakar

Tél : 00221-77-488-33-72

Mail : [email protected]

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