Reboisement 2019 : des associations de jeunes de Mamou dénoncent leur exclusion du processus

Lancée le 15 juillet dernier, la campagne nationale de reboisement initiée par le gouvernement provoque des mécontents qui crient à la trahison. Cette campagne conjointe, organisée par les ministères de l’Environnement et de la Jeunesse, devait mettre les jeunes au cœur des activités. Malheureusement, des « vieux ont été choisis à notre place, ils ne sont même pas d’ici », dénoncent des responsables d’associations de jeunesse de Mamou. C’est en tout cas ce qu’ils ont confié à Guineematin.com dans une interview réalisée dans la journée de ce vendredi, 02 août 2019.

Tout comme les jeunes de Boffa, leurs camarades de Mamou disent avoir été roulés dans la farine par les organisateurs de la campagne nationale de reboisement 2019. L’une des victimes de ce qu’elle qualifie de « substitution » se nomme Fatoumata Sira Doumbouya, membre de l’Association des Jeunes Filles et Femmes Leaders de Guinée, dont le siège est à Mamou. Dans cette interview, elle dénonce la substitution de son ONG par un monsieur qui n’habite même pas à Mamou.

Guineematin.com : votre structure devait faire partie des associations retenues pour la campagne de reboisement organisée par le gouvernement du côté de Mamou. Mais, vous nous apprenez que ça n’a pas été le cas. Expliquez-nous ce dont vous avez été victimes.

Fatoumata Sira Doumbouya : pour cette campagne de reboisement, la première mission qui est venue de Conakry pour Mamou pour superviser les territoires à reboiser et les pépinières qui sont disponibles et lister les ONG qui sont concernées, a pris en compte mon ONG, AJFFLG. Mon ONG figurait sur la liste des associations retenues pour la campagne. On m’avait même donné à Koûmi quelque chose de 5 hectares que je devais reboiser. On m’a associée à Koûmi avec ceux de l’ENATEF (Ecole Nationale d’Agents Techniques des Eaux et Forêts) de Mamou. Par après, on nous a dit d’attendre, quand les contrats vont venir de Conakry, on va les signer et commencer le travail. Une fois que les contrats sont arrivés à Mamou, on avait enlevé mon nom sans que je ne sois informée. Quand je m’en suis rendue compte, je suis allée directement chez l’inspecteur des eaux et forêts de Mamou pour lui demander les raisons du retrait du nom de mon ONG sur la liste. Je lui ai demandé de me montrer la liste des associations retenues. Il me la montre, je la lis et relis, je vois que mon ONG a été supprimée. En réponse, l’inspecteur me dit que ça ne relève pas d’eux à Mamou, mais de Conakry. Je lui demande ce qu’il fallait faire pour ça, il m’a dit qu’il allait faire tout ce qui est possible pour que je collabore avec ceux qu’on a retenu pour cette campagne.

Guineematin.com : ou vous avait pourtant affecté 5 ha à Koûmi que vous devriez reboisés avec l’ENATEF.

Fatoumata Sira Doumbouya : oui, mais il y a un monsieur à qui on avait donné les mêmes 5 ha. L’inspecteur des eaux et forêts de Mamou est allé négocier avec ce monsieur pour qu’il accepte qu’on fasse le travail ensemble. Je me suis rencontrée avec ce monsieur, on a échangé. Il m’a dit de faire une proposition. Je lui ai répondu de me laisser me concerter avec les membres de mon ONG. Je me suis vue avec mes éléments, on a fait le calcul de tout ce qu’il faut comme matériels pour le reboisement, la nourriture et tout. Je devais faire le compte rendu au chef section des eaux et forêts pour qu’il facilite l’entente entre nous et celui à qui on a affecté nos 5 ha à Koûmi. C’est ce qu’on a déposé au niveau du chef section des eaux et forêts de Mamou. Quand je l’ai appelé, il m’a dit de le laisser échanger avec le monsieur. Il a tenté le numéro du monsieur, ça ne passait pas. Il a aussi appelé le chef du cantonnement qui lui a dit qu’il était sur le terrain avec le monsieur à qui on a donné les 5 hectares qui étaient destinés à mon ONG.

Guineematin.com : vous avez don été carrément écarté ?

Fatoumata Sira Doumbouya : effectivement. C’est là que j’ai su qu’ils m’ont écarté, parce que le monsieur par qui on nous a substitués disait qu’il ne peut pas parler avec d’autres et parler avec moi. Mais, dès que j’ai su qu’il était sur le terrain pour voir les plantes, j’ai su directement que je n’étais plus dedans, ils ont confié ça au chef de cantonnement.

Guineematin.com : est-ce que vous savez qui a fait ça ? Qui a fait cette substitution ?

Fatoumata Sira Doumbouya : je n’ai pas une idée sur ça. Parce qu’aujourd’hui vendredi, 2 août 2019, on était à la direction nationale des Eaux et Forêts où on a rencontré le colonel Layali Camara, à qui on a expliqué le problème. Il nous a dit que ça ne vient pas de sa direction. Il a dit que ça vient de Mamou. Et lorsque nous avions posé la même question aux gens de Mamou, ils avaient accusé ceux de Conakry d’avoir enlevé notre nom. Le Colonel Layaly Camara a promis de nous ajouter à la seconde phase de la campagne, mais on ne sait même pas c’est pour quand puisqu’elle finit le 15 août. Une autre ONG a été victime de la même chose à Mamou. Quand ça n’a pas marché là-bas, ses membres sont allés voir la direction préfectorale des eaux et forêts, on leur a dit d’aller à Conakry. Ils sont venus ici à Conakry pour régler le problème. Il y a eu la solution. Ils sont repartis à Mamou et ils travaillent aujourd’hui, ils sont entrain de reboiser. C’est pour cela que nous aussi on est là.

Guineematin.com : que demandez-vous aujourd’hui aux autorités ?

Fatoumata Sira Doumbouya : ce que je demande, comma à Mamou la jeunesse n’a pas été approchée, elle a été ignorée, nous réclamons la part qui revient à la jeunesse de Mamou pour qu’on fasse le reboisement nous aussi. Parce que, s’il s’agit de sensibilisation, c’est nous les jeunes qui sortons dans la rue, dans les quartiers pour le faire. Il en est de même quand il s’agit d’assainissement. Toutes sortes d’activités de l’environnement à Mamou, c’est nous les jeunes qui les menons. Pourquoi ne pas nous associer à cette initiative présidentielle ? Donc, qu’on redonne à la jeunesse de Mamou la part qui lui revient dans cette campagne de reboisement. Ce n’est pas l’argent qui nous importe le plus dans cette affaire. Mais, c’est l’expérience qu’on va obtenir, l’enrichissement de notre CV, ça compte beaucoup, ça nous ouvre d’autres portes avec les organismes internationaux.

Propos recueillis par Alpha Mamadou Diallo pour Guineematin.com

Tél : 628 17 99 7

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