Massacre du 28 septembre 2009 : des victimes expriment leur soif de vérité et de justice

Alors que l’on s’achemine vers le 10ème anniversaire du massacre perpétré au stade du 28 septembre de Conakry, les victimes et leurs proches ont plus que jamais soif de justice. Cette page sombre et douloureuse de l’histoire de la Guinée tarde encore à livrer ses secrets. Les victimes ne demandent que l’ouverture du procès pour être rétabli dans leurs droits. Dans un entretien accordé à un reporter de Guineematin.com, dans la journée d’hier jeudi, 26 septembre 2019, deux victimes ont expliqué leur calvaire et l’envie qu’elles ont de connaitre la vérité autour de cette tragédie qui a fait au moins 157 morts et plus 100 femmes violées, sans compter les portés-disparus.

Saran Cissé, une des victimes du massacre du 28 septembre 2009

L’une des victimes du massacre du stade du 28 septembre en 2009 se nomme Saran Cissé. Elle a exprimé son découragement face à la lenteur de la procédure et sa soif de vérité et de justice. « Je me sens méprisée, complètement découragée. Pourquoi ? Parce que dix ans, ce n’est pas dix jours ; dix ans, ce n’est pas dix semaines. Dix ans nous sommes là en train de souffrir, oubliées, négligées, critiquées. On entend beaucoup sur nous, sauf du bien. Il y a beaucoup de choses qui se sont passées depuis dix ans, des gens ont été jugés et condamnés. Mais, le massacre du 28 septembre reste comme si rien n’est fait. Chaque jour, on nous dit que c’est demain ou après-demain. On est un peu soulagé parce que déjà on connait le lieu, là où ils vont tenir le procès. Mais, ça reste beaucoup à faire », a-t-elle laissé entendre.

Quand à la date de l’ouverture du procès et le budget y afférent, Saran Cissé a dit ne pas être totalement rassurée. « Ça ne nous rassure pas à 100%, mais ça nous rassure. Parce que moi, l’affaire d’argent-là m’importe peu. Vous savez pourquoi ? Parce qu’ils ont attaqué un président de la République qui nous dépasse, cela a été jugé sans avoir de montant. Pourquoi pas nous sur le massacre du 28 septembre ? Ce qui s’est passé au domicile du président, c’était la nuit et pour nous-là, c’était en plein jour, entre 12 heures et 14 heures. Ce n’est pas quelque chose qui n’est pas connu et puis c’est des guinéens, des gens qui étaient dans les camps, c’est des personnes connues, ce n’est pas des inconnues. Par exemple, l’attaque qui s’est passée chez le président (le 19 juillet 2011, ndlr) qui a été jugée, on peut dire c’est quelque chose qui est inconnue, mais pour nous là, c’est connu, parce qu’il y avait des pick-up remplis de gens qui sont venus nous trouver au stade. Donc ça, c’est des personnes connues. Chaque bataillon peut identifier les personnes qu’ils ont déployées au stade. Pourquoi ça retarde ? Pourquoi on demande des trucs qui n’en valent pas? Parce que moi, je vais dire que ça ne vaut pas », soutient la dame.

En outre, Saran Cissé réclame justice, surtout que certaines victimes sont entrain de mourir sans avoir connu la vérité dans cette affaire. « Nous vivons avec mépris. Vous n’êtes pas sans savoir que pour l’année 2019, nous avons perdu 5 victimes : quatre femmes et un homme, qui est le vice-président de l’AVIPA, qui n’ont pas participé au procès. Est-ce que cela va me trouver moi aussi ? Tout ce que nous voulons aujourd’hui, c’est la justice. Tout ce que nous réclamons, c’est la vérité. Au lieu de dire demain, que ça soit maintenant-là, c’est tout ce que nous demandons… »

Hadja Bountouraby Camara, victime du 28 septembre 2009

Même son de cloche chez Hadja Bountouraby Camara, une autre victime du 28 septembre 2009. « Jusqu’à présent, là où nous sommes, rien ne va. Tout le monde le sait, quand quelque chose de mal t’arrive, tu es soucieux, tu ne peux pas te réjouir de ça. Mais, ce que nous avons vécu au stade fait très mal. D’aucuns sont morts, d’autres portées disparus, certaines personnes ont été violées. Donc, on ne peut pas se réjouir de ça. Hadja Asmaou, la présidente de notre association, est derrière nous. Nous pouvons y croire. Parce que c’est elle notre chef. Il faut que ça soit vrai pour qu’il y ait un jugement. Il y a avait presque tous les leaders qui étaient là-bas ce jour, mais nous voulons la justice. Depuis 2009, nous souffrons. C’est la maladie ou la souffrance, parce que depuis qu’ils m’ont frappée sur mon pied gauche, j’ai toujours mal au pied. Nous ne voulons rien à part la justice et la vérité », a-t-elle fait savoir.

Fatoumata Diouldé Diallo pour Guineematin.com

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