
Un procès inédit s’est ouvert ce jeudi, 03 octobre 2019, au tribunal correctionnel de Dixinn. C’est un maître coranique qui est poursuivi pour le viol d’un garçon de 13 ans qui se trouve être son talibé. L’acte s’est passé au quartier Sonfonia, dans la commune de Ratoma. A la barre, le prévenu a partiellement reconnu les faits articulés contre lui, rapporte un journaliste de Guineematin.com qui était sur place.
M.B.S, le maître coranique mis en cause dans cette affaire, reconnaît avoir ôté le pantalon du jeune S.B. et avoir touché à son sexe « par simple curiosité ». Mais, il assure qu’il ne l’a jamais pénétré comme le prétend la partie civile. « Le vendredi, 27 septembre 2019, après la lecture du coran, je suis allé avec S.B. et un autre jeune dans ma chambre pour leur remettre des maillots. L’un d’eux a pris un maillot et il est sorti. Je suis resté avec S.B. dans la chambre. Je lui ai demandé d’enlever son pantalon, il l’a fait. J’ai alors joué avec son sexe. Après, je lui ai remis 10 mille francs guinéens comme frais de transport. Mais, il n’y a pas eu de pénétration ni d’éjaculation comme prétend la partie civile », a assuré le prévenu.
Des explications loin de convaincre l’avocat de la partie civile. Maître Amadou Oury Diallo a aussitôt répliqué en lui demandant pourquoi il n’a pas demandé à l’enfant d’enlever son pantalon devant les autres talibés. « Il n’allait pas l’accepter. C’est pourquoi je l’ai fait rentrer dans la chambre », répond le maître coranique, estimant qu’il n’a rien fait de grave. « J’ai violé les principes de l’islam. Mais, je ne l’ai pas abusé sexuellement. J’ai touché seulement son sexe par curiosité », s’est-t-il défendu.
Mais, la mère de S.B, l’enfant victime de ce présumé viol, va balayer d’un revers de la main la version du prévenu. Appelée à la barre, la dame a narré sa version des faits. « Ce jour, S.B. est revenu à 18 heures à la maison. Dès son retour, il m’a dit : maman, aujourd’hui Oustaz m’a fait quelque chose. Il m’a emmené dans sa chambre, il a fermé la porte et il m’a intimé d’enlever mon pantalon. Quand j’ai enlevé mon pantalon, Oustaz a manipulé mon sexe. Il a enlevé lui aussi son pantalon et il m’a dit de sucer son sexe. Il a tenté de me pénétrer par derrière et a éjaculé sur moi. Après, il m’a dit de nettoyer, je l’ai fait. Il m’a remis 10 mille francs guinéens comme frais de transport et m’a dit que si je raconte ça à quelqu’un, il va me maudire », a-t-elle expliqué.
Explication suffisante, selon le conseil de la partie civile, pour établir la culpabilité du mis en cause. Le monde à l’envers, estime maître Amadou Oury Diallo. « Nous vivons dans un monde à l’envers. Normalement, les maîtres coraniques remplacent les érudits et les érudits remplacent les prophètes. L’enfant a été envoyé à l’école de M.B.S. pour apprendre le coran. Mais, au lieu de lui enseigner les principes de l’islam, il a fait le contraire en abusant sexuellement son élève. Si les garçons ne peuvent pas échapper aux agressions sexuelles dans son école, ce ne sont pas les fillettes qui seront à l’abri. Donc aujourd’hui, les chefs de familles se demandent où envoyer leurs enfants pour assurer leur éducation », a fait observer l’avocat, avant de demander au tribunal de condamner le prévenu au payement d’un franc symbolique.
De son côté, le procureur Daouda Diomandé a rappelé que ce maître coranique a plus de 50 élèves dans son école. Il s’interroge alors si S.B. est le premier à avoir été victime d’un tel abus de sa part ou si d’autres en avaient été victimes auparavant. « Il a manipulé le sexe de l’enfant et il a tenté de le pénétrer par derrière. Cet acte impudique, ignominieux est au-dessus de l’entendement. C’est un acte contre la morale prévu et puni par l’article 274 du code pénal guinéen. C’est pourquoi, je vous demande de le condamner à 3 ans d’emprisonnement ferme et une amende d’un million de francs guinéens », a requis le représentant du ministère public.
C’est dans ce contexte que le tribunal a mis l’affaire en délibéré pour décision être rendue le17 octobre 2019. En attendant, le maître coranique poursuit son séjour à la maison centrale de Conakry, où il est détenu depuis le 1er octobre dernier.
Saidou Hady Diallo pour Guineematin.com
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