Sur les traces d’Elhadj Ousmane Baldé « Sans loi », nouveau président de la coordination Haali Poulaar

Elhadj Ousmane Baldé "Sans Loi", nouveau président de la coordination Haali Poular
Elhadj Ousmane Baldé « Sans Loi », nouveau président de la coordination Haali Poular

Selon des chroniques historiques, le Fouta-Djalon s’étendrait des baobabs de Saraya (Kouroussa), aux palmiers de Kakandé, à Boké. Ce vaste ensemble, pays habité en très grande majorité par les Peuls et Haali Pulaar, à l’instar des trois autres régions de la Guinée, dispose d’une coordination nationale, dont le président Elhadj Saïkou Yaya Barry vient de décéder. Homme intègre et dynamique, ce Seydiyanké de Dabola de l’aristocratie régnante des Almamy du Fouta théocratique, laisse un vide difficile à combler.

Mais, à l’unanimité de ses membres, en accord avec le Khalife général Elhadj Bano Bah, de toutes les autorités morales religieuses et l’ensemble des fils de la région d’ici et de la diaspora, le choix a été porté sur Elhadj Ousmane Baldé « Sans loi ». Un opérateur économique de grande renommée, très présent dans le tissu économique et social de la Guinée, dont le lourd investissement (sept milliards de FG) dans la construction d’une mosquée de 15 000 places et d’un centre islamique dans son village à Fatako (Tougué), suffit pour démontrer son ancrage à la fois religieux et populaire.

Pourtant, comme tous les grands fortunés du Fouta-Djalon, Elhadj Ousmane Baldé « sans loi » est parti de rien. C’est un jeune homme, muni de quelques bonbons, allumettes et colas, qui fait des dizaines de kilomètres à pied pour se rendre à Labé, la grande ville, se procurer de petites marchandises qu’il revend dans les marchés forains de Fatako et environs.

Plus tard, poussé par le goût de l’expansion, il décide de scruter d’autres cieux, car comme le dit l’adage « on n’est jamais prophète chez soi ». Gueckédou, la florissante ville de commerce du Sud, une des portes d’entrée en Sierra Leone, sera la future destination d’Ousmane Baldé. Convaincu qu’il n’y a pas de sot métier mais des sots hommes, il va exercer tous les petits métiers allant, paraît-il, de la vente de petits produits de consommation à celle du bois mort.

Après des années de dur labeur, la chance lui sourit. Ses affaires prospèrent et le voilà qui, de l’échelle de l’effort, emprunte désormais l’ascenseur de la consécration. Il fait à présent partie des grands commerçants du pays avec des grands magasins et boutiques, de la représentation des marques de véhicules comme l’américaine Général Motors, et des comptes en banque bien garnis.

Par un coup magique du destin, le jeune commerçant ambulant de Fatako, devenu prospère, est élu président de la chambre de commerce et d’industrie de Guinée. Plus rien dans le secteur économique et bancaire ne se décide en son absence dans le pays. Les autorités le savent et le couvrent d’une attention particulière car, de par sa position privilégiée, il peut influencer le cours des événements en rapprochant des hommes et des tendances parfois diamétralement opposés.

Malgré tout ce prestige et les ors de ses immenses et flamboyantes résidences, Elhadj Ousmane Baldé « sans loi » ne disloque pas son identité, à plus forte raison, laissé sa vulnérabilité creuser son sillon dans sa vie.

Cette identité, c’est d’abord et avant tout Fatako, qui serait une altération de « farako » qui veut dire derrière la plaine en Maninka. Il est une synthèse du village habité par les Peuls et les Diakhankés. Sa mère est de la seconde communauté, alors qu’historiquement et sociologiquement, il est issu du clan des Demboubhés, frères des Koulounnankés, illustre ascendance d’Alpha Abdourahmane Koïn, fils d’Alpha Ibrahima et petit fils de Saïkou Saliou Balla mo Koïn, l’un des 9 marabouts fondateurs de la confédération théocratique du Fouta-Djalon, au début du 17e siècle.

Tenez, c’est Alpha Abdourahmane Koïn, le plus jeune des troupes du Fouta sous le commandement du Seydiyanké conquérant, Almamy Oumar Barry, qui captura l’animiste chef du N’Gabou, Diankewali Sané lors de la mémorable bataille de Tourban Kansala en 1868.

Les Demboubhés sont aussi les frères des Helayankés de Timbi. Comme pour démontrer que le tout nouveau président de la coordination nationale Hal Pulaar est un valeureux fils du Fouta, dont les familles ont victorieusement pris part à la rédaction, parfois par le sabre, de la belle histoire du Fouta qui n’emprunte rien à la légende pour avoir ses lettres de noblesse et de grandeur.

C’est un baobab de Koïn qui pousse là où celui de Dabola est tombé, avec les mêmes branches qui s’étendent pour donner de l’ombre à tous les fils du Fouta et de la Guinée toute entière.

Pour sa réussite, Elhadj Ousmane Baldé « sans loi » peut compter sur les bénédictions de sa prestigieuse famille maternelle Diakhanké, maraboutique par essence, de Fatako à Matakaou ( Koubia) de Badougoula ( Wora mali ) à Touba la sainte à Gaoual; mais aussi sur le soutien de ses fortes alliances comme celle de l’une de ses épouses, hadja Safiatou, fille du Nguerianké, Saifoulaye Diallo celui qui proclama l’indépendance de la Guinée le 2 octobre 1958 dont les connexions et interconnexions au cœur du grand Labé lui seront utiles et précieuses, tout autant que celles de sa femme, Hadja Hawaou, princesse Kaldouyanké de Simili, dans Koubia, de la famille du Waliou, le Ndouyêdio Thierno Aliou Bhoubha Ndiyan, aussi dont son père Alpha Bacar Diâri est le petit neveu, tandis que sa mère, Nénan Djénabou Barry dite « Nen Dara », est la fille d’un autre grand Waliou, le Worladio Thierno Oumar Rafiou de Daralabé. A noter que c’est une des sœurs de ce dernier qui est la mère du Kaldouyanké alpha Ibrahima Bassagui, le père du cadi de Kaadé et roi de Labé, l’illustre Alpha Yaya Diallo.

Comme on le voit, les cartes que le tout nouveau président de la coordination nationale Hal Pulaar a entre ses mains sont toutes des jokers qui viennent s’ajouter à sa grande réputation d’homme de devoir et d’honneur, déterminé à mériter l’inestimable confiance placée en lui par ses frères et pour la mémoire d’Elhadj Saïkou yaya Barry. Le nouveau capitaine du bateau Hal Pulaar le conduira à coup sûr à bon port, les vagues et les tempêtes n’y pourront rien.

Amadou Diouldé Diallo, journaliste – historien
Vichy / France

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