Conakry : à la rencontre de Sidi Sow, un handicapé qui se bat pour vivre dignement

Boubacar Sidi Sow

Boubacar Sidi Sow est aujourd’hui un mécanicien très connu au quartier Simbaya, dans la commune de Ratoma. Son garage ne désemplit quasiment pas. Et, son métier lui permet de vivre dignement lui et sa petite famille. Mais, pour en arriver là, le chemin a été assez long et jonché d’embûches.

En effet, le jeune homme a perdu l’usage de ses deux pieds à son jeune âge après avoir contracté la poliomyélite. Il aurait pu finir mendiant dans les rues de Conakry comme beaucoup d’autres handicapés. Mais, Sidi Sow a refusé de se laisser abattre. Il a affronté toutes les difficultés qui se posaient à lui pour apprendre un métier. Un reporter de Guineematin.com est allé récemment à sa rencontre.

Originaire de Kégnéko dans la préfecture de Mamou, Boubacar Sidi Sow avait 13 ans lorsqu’il a été atteint de la poliomyélite. Le jeune homme a perdu l’usage de ses deux pieds. Et, le destin l’a conduit vers la mécanique. « C’est à partir du village que j’ai commencé à apprendre ce métier. Un jour, en partance pour l’école, un patron m’a rencontré, il travaillait avec la femme de Lansana Conté, Kadiatou Seth à l’époque. Il m’a dit je vais t’aider un jour à avoir un vélo. Il est venu me prendre et m’envoyer quelque part pour m’acheter un vélo. Je suis reparti au village. Un jour, je partais à l’école, lorsque l’un des pneus de mon vélo a crevé, mes parents ont envoyé le vélo chez un mécanicien et il a réparé. Mais quand il a fini de travailler, on ne lui a pas donné la somme intégrale qu’on devait le payer, on lui devait 200 francs.

J’ai passé une semaine, sans avoir l’argent, il est venu donc enlever le pneu de mon vélo pour l’amener chez lui. Depuis ce jour, j’ai décidé de ne plus envoyer mon vélo chez un mécanicien. J’ai écrit une lettre à mon père pour lui dire de m’acheter les matériels de travail. Désormais, si mon vélo tombait en panne, c’est moi-même qui le réparais. Entretemps, mon père est tombé malade et il est décédé. Je suis venu à Conakry. A côté de chez nous, il y avait un garage. Et comme j’avais un peu d’expérience, je suis venu me confier au maître mécanicien qui était là-bas. C’est à partir de là que j’ai appris à dépanner les motos et les vélos. Et, j’ai fini par ouvrir mon propre garage », explique-t-il.

Aujourd’hui, ce handicapé est fier de lui. Car grâce à son métier, il a réussi à se marier et à fonder une famille. « C’est grâce à Dieu et à ce métier que je me suis marié. Aujourd’hui, j’ai trois enfants : une fille et deux garçons. Je paye mon loyer, je nourris ma famille, je paye les frais de scolarité des enfants et les soins médicaux quand quelqu’un tombe malade. En un mot, j’arrive bien à m’en sortir vraiment. Je peux gagner parfois plus de 200.000 francs comme revenu journalier », a-t-il laissé entendre.

Pour lui, les personnes handicapées doivent arrêter de mendier tant qu’elles peuvent faire un travail leur permettant de se prendre elles-mêmes en charge. « Ce sont les fous qui ne peuvent rien faire. Moi, je n’ai pas de pieds, mais j’ai au moins mes deux mains et ma tête qui me permettent de faire quelque chose afin de ne pas quémander. Tendre la main chaque jour aux gens, ce n’est pas bien. Même si c’est ton père, si chaque jour il te donne de l’argent, un jour il finira par se fatiguer. Je demande donc à mes amis handicapés de prendre courage pour apprendre un petit métier afin de pouvoir subvenir à leurs besoins sans mendier. Si tes pieds ont un défaut mais que tes mains sont en bon état, et tu n’as pas de problème mental, sers toi de mains pour faire quelque chose. Moi en tout cas, c’est ce que je fais. Quand il faut faire un travail qui demande beaucoup de force, j’appelle mes apprentis pour qu’ils m’aident », a-t-il indiqué.

Dans son garage Boubacar Sidi Sow a un adjoint et 9 apprentis. Son travail est bien apprécié des clients, d’où le taux de fréquentation élevé de son garage. Et, il a d’autres ambitions. « Je veux vraiment agrandir ce garage. Je commence déjà à faire quelques économies. Je vais installer un conteneur à côté de moi ici et mettre des chaudronniers là-bas. Je compte aussi ouvrir un parc de vélo parce qu’il un peu d’espace à côté de moi ici ».

Interview réalisée par Mohamed DORE pour Guineematin.com

Tel : +224 622 07 93 59

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