Manifs contre un 3ème mandat en Guinée : « nous mobiliserons plus de gens dans la rue »

Mamadou Alimou Bah de l’UFR, membre du FNDC

Mamadou Alimou Bah, un jeune membre de l’UFR (le parti dirigé par Sidya Touré), est l’un des acteurs majeurs de la mobilisation des citoyens derrière le combat du FNDC à Conakry. Au cours d’un entretien avec un journaliste de Guineematin.com, il est revenu sur son engagement dans le combat contre un troisième mandat du président Alpha Condé en Guinée et les manifestations projetées par le Front National pour la Défense de la Constitution tous les lundis jusqu’à l’aboutissement de son combat.

Décryptage !

Guineematin.com : vous êtes membre du Front National pour la Défense de la Constitution (FNDC), une structure qui s’érige contre le changement de l’actuelle Constitution qui déboucherait sur un troisième mandat pour le président Alpha Condé. Qu’est-ce qui vous a poussé à militer au sein de ce mouvement ?

Mamadou Alimou Bah : je suis membre actif de l’UFR et vous savez que l’UFR est actif aujourd’hui au sein du FNDC. Donc, si aujourd’hui je suis au sein du FNDC, c’est parce que l’UFR adhère de façon pleine et entière aux idéaux du FNDC d’une part. Et d’autre part, je suis jeune, je suis conscient que la situation actuelle n’est pas favorable aux jeunes. La situation guinéenne est chaotique. Donc, il est du devoir de chacun de se lever aujourd’hui pour qu’il y ait un vrai changement. Il y a certains qui aiment confondre la lutte du FNDC au bilan du Professeur Alpha Condé, mais moi personnellement je ne parle pas actuellement du bilan du Professeur Alpha Condé.

Tout ce que nous voulons, c’est qu’Alpha a fait ses deux mandats, il a juré qu’il va respecter la Constitution, il n’a qu’à aller après ses deux mandats. Donc le bilan, on le fera après. C’est une question de respect de la loi. Mais aujourd’hui, on a vu les velléités du Professeur Alpha Condé, ce n’est plus caché. Si au début il y avait des doutes, maintenant on l’a su à travers ses multiples sorties. Et là, nous allons nous donner corps et âme pour défendre cette Constitution. C’est entre autres ce qui me pousse à adhérer au sein du FNDC et à mener le combat avec nos amis qui sont du FNDC.

Guineematin.com : il y a des gens qui pensent que le FNDC est un mouvement qui lutte contre la personne d’Alpha Condé. Qu’est-ce que vous avez à dire à ces personnes ?

Mamadou Alimou Bah : loin de là, nous ne luttons pas contre Alpha Condé, nous luttons contre un système. Nous luttons contre ceux qui veulent changer la Constitution dans le but d’octroyer un mandat à vie à un président. Si Alpha Condé décide de respecter la Constitution, on va le laisser terminer paisiblement son mandat. Donc notre combat, ce n’est pas contre une personne, c’est contre un système qui veut changer cette Constitution. Tout le monde sait comment cette Constitution a été obtenue. Il y a certaines personnes qui disent qu’en 2001 on a changé la Constitution. Mais en 2001, il n’y avait pas d’articles qui étaient cadenassés.

Donc, c’est partant de cette expérience qu’en 2010, les gens se sont retrouvés pour essayer de cadenasser certains articles qu’on ne peut aujourd’hui en aucun cas changer. Donc, on ne doit pas parler aujourd’hui du changement de Constitution. On peut modifier mais même si c’était le cas, pourquoi attendre maintenant pour le faire ? Nous ne sommes pas d’accord.

Guineematin.com : vous représentez le FNDC à Wanindara et vous êtes dans la commission organisation de cette structure. Votre quartier est l’un des ceux qui sont le plus actifs dans la mobilisation menée par le Front National pour la Défense de la Constitution. Quelle est votre stratégie de mobilisation ?

Mamadou Alimou Bah

Mamadou Alimou Bah : notre stratégie de mobilisation, nous le faisons de porte en porte. Mais d’ailleurs, la situation actuelle est en notre faveur. On sait que tous les Guinéens tirent le diable par la queue. Donc rien que ça, la mobilisation est acquise. Aujourd’hui, en Guinée, les gens souffrent. Nous rencontrons des difficultés parfois, il y a des gens qui nous disent que les manifestations les fatiguent puisqu’ils vivent au jour le jour. Ça seulement, ça peut être un motif de soulèvement. Parce qu’avec toutes les richesses que nous avons, le Guinéen ne devrait pas souffrir.

Donc, les gens envoient des arguments, mais nous essayons de les satisfaire. Nous faisons une mobilisation de porte à porte, nous leur disons pourquoi le FNDC aujourd’hui est en train de se lever contre ceux qui veulent changer la Constitution. Donc, finalement, les gens adhèrent et les gens sont en train d’adhérer. Vous avez vu lors de la première manifestation comment Ratoma est sortie et lors de la deuxième manifestation, là on n’en parle même pas.

Guineematin.com : lors des premières manifestations justement, il y a eu des victimes : des morts et des blessés. Quel est votre sentiment par rapport à ces situations ?

Mamadou Alimou Bah : c’est un sentiment de tristesse. Aujourd’hui, nous sommes meurtris, mais ça ne va pas nous décourager. Parce que nous savons qu’ils le font pour nous dissuader, mais ça c’est une illusion de leur côté. Nous n’allons pas reculer, nous sommes plus que motivés, c’est un combat noble. Je m’excuse, mais vous savez, c’est un sacrifice, chaque combat a un coût. Mais là, ça ne vient pas de nous. Ce sont eux qui devaient assurer notre sécurité, mais ce sont eux malheureusement qui sont en train de tuer les jeunes gens. C’est un sentiment de tristesse que nous avons.

Mais, nous allons malgré tout continuer le combat. Et nous voulons faire plus que ce que nous avons fait avant. Nous comptons mobiliser plus de gens dans la rue. Vous avez vu ce qui s’est passé en France, au Sénégal (les manifestations organisées par les antennes du FNDC dans ces pays, ndlr), je pense que vous avez eu les échos. Eux, ils voulaient interdire les manifestations mais on a essayé de nous mettre en contact avec la société civile sénégalaise tels que le mouvement « Y en marre » et d’autres. Et, ils ont décidé de nous venir en aide, ils ont projeté une manifestation pour le 2 novembre. Et aujourd’hui, vous savez qu’il y a forte communauté guinéenne au Sénégal, donc ils ont décidé nous accompagner dans ce noble combat. En Guinée, on a fait un calendrier de manifestations qu’on va mettre en exécution. Donc on va organiser des manifestations tous les lundis désormais jusqu’à ce que le président Alpha Condé renonce à son 3ème mandat. Nous sommes déterminés à aller jusqu’au bout.

Guineematin.com : c’est la fin de cet entretien. Un dernier mot ?

Mamadou Alimou Bah : mon dernier mot, c’est à l’endroit des jeunes de toute la Guinée et ceux de Wanindara en particulier. Je leur dirai de redoubler d’efforts. Aujourd’hui, la situation est vraiment critique en Guinée. Avant 2010, la Guinée ne produisait que 10 millions de tonnes de bauxite par an. Aujourd’hui, on est à 60 millions de tonnes. Il n’y a pas de répercussion de cette exploitation sur les pauvres guinéens que nous sommes. Et ceux qui bénéficient de ces richesses ne veulent pas que ça finisse. C’est cela la réalité.

Entretien réalisé par Mamadou Baïlo Keïta et décrypté par Ibrahima Sory Diallo pour Guineematin.com

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