Adama Sow de la FEGUIPAE sur la grève du SLECG : « c’est de l’extrême méchanceté… »

Le Syndicat Libre des Enseignants et Chercheurs de Guinée (SLECG) a entamé une grève générale et illimitée hier jeudi, 09 janvier 2020 sur toute l’étendue du territoire national. Alors que le mot d’ordre est relativement suivi, les voix se lèvent pour dénoncer cette nouvelle crise et appeler les uns et les autres à revenir au tour de la table des négociations pour sauver ce qui peut l’être. C’est le cas de madame Adama Sow, la présidente de la Fédération Guinéenne des Parents d’Elèves et Amis de l’Ecole (FEGUIPAE). Elle a donné ses impressions sur cette crise dans une interview accordée à un des correspondants de Guineematin.com basé à Kindia. Avec Adama Sow, il a été également question du niveau de ces enseignants grévistes, mais aussi la de la situation des contractuels.

Guineematin.com : comment appréciez-vous cette nouvelle grève lancée par le Syndicat Libre des Enseignants et Chercheurs de Guinée (SLECG) après trois mois de cours ?

Adama Sow : c’est une situation malheureuse et triste pour nous. C’est une déception totale. Moi, je pense en tant que guinéens, on devait se mettre autour de la table pour dialoguer pour l’intérêt supérieur de nos enfants. Ces enfants dont nous sommes en train de brimer le cursus scolaire, briser l’avenir ; un enseignant, c’est un parent d’élève, un enseignant, c’est celui qui incarne des principes et des valeurs que nous sommes en train de piétiner aujourd’hui. Moi, je me dis que l’affaire de huit millions de francs guinéens-là, c’est un faux débat. Un syndicat ne réagit pas ou ne revendique pas en termes de millions ou en terme de sommes, c’est en termes de pourcentage, dire nous voulons que notre salaire soit rehaussé ou amélioré de vingt pour cent, trente pour cent, donc en terme de pourcentage et non en millions. Donc, je me dis que c’est un faux débat. Vu le protocole d’accord qui a été signé, je l’ai lu de fond en comble avant qu’il ne soit signé, il n’y a pas un problème de huit million, ils ont dit d’assainir le fichier des enseignants de Guinée. Ce qui sera récupéré, sera partagé sur le salaire des enseignants, ça peut être au-dessus de ce qu’ils demandent, l’équivalent ou au-dessous. Mais aujourd’hui, c’est les mêmes problèmes qui ressurgissent. Nous, on est déçu, nous les parents d’élèves, parce que nos enfants sont en train de subir quelque chose qu’ils ne méritent pas. Leurs parents, leurs arrière-grands-parents se sont battus pour l’indépendance, ils se sont battus pour qu’un avenir meilleur des guinéens soit instauré… Je suis totalement déçue.

Guineematin.com : pensez-vous que cette grève n’a pas lieu d’être et qu’il y a une main noire?

Adam Sow: c’est de l’extrême méchanceté, permettez-moi de le dire et ça n’engage que ma personne, de la part du SLECG. Qu’on arrête ça. S’ils ont un agenda caché, ils n’ont qu’à le dire, laisser les enfants étudier. On en a marre, nous sommes fatigués de cette crise au sein de l’éducation.

Guineematin.com : qu’est ce qu’il faut pour gérer cette crise ?

Adam Sow: nous, nous sommes entrain de jouer notre partition qui est quoi, nous avons vu le département, nous leur avons posé des questions, ils nous ont répondu en tenant des engagements qu’ils vont doter toutes les écoles et les salles de classes qui n’ont pas d’enseignants et les écoles ou les enseignants vont grever, ils vont les remplacer et que ces enseignants vont percevoir le salaire de celui qui a grevé. En ce moment, il n’y aura pas à dire qu’on va te donner le SMIG, parce que c’est le poste de travail qui est payé, c’est le travail qui est payé et non le travailleur.

Guineematin.com : que dire de ces contractuels, de leur situation ?

Adam Sow : nous, on nous a confirmé qu’il n’y a pas de contractuels d’Etat pour le moment dans le fichier, c’est des enseignants qui sont des contractuels communautaires qui sont payés par la communauté et on a vu dans leur listing que ça n’existe pas. Nous, on se demande les contractuels d’Etat comment c’est venu, ils nous ont un peu donné la genèse, c’est les gens qui ont enseigné lors de la grève passée, mais il n’y a pas eu signature de contrat, personne ne peut montrer un contrat, il n’y a pas eu note de service. S’il y a eu des notes de service des directeurs d’écoles, ça n’engage qu’eux, ils n’ont pas été instruit de le faire et malgré tout ,ces enseignants contractuels ont reçu des primes, même si tu n’as enseigné qu’une seule heure, on regarde dans ton cahier de préparation sans compter les jours, les mois que tu as enseigné, une seul heure, ils ont été mis au même pied d’égalité. Maintenant, s’il y a revendication, ils n’ont qu’à passer par le concours, les méritants vont passer et l’Etat les recrute. Ceux qui ne peuvent pas ou ne méritent pas ou qui ont falsifié les diplômes seront mis à côté. Car, même si tu es universitaire ou tu es sortant de la Sorbonne, un enseignant, c’est un pédagogue, il faut faire l’ISSEG ou l’ENI, on tient compte de ces diplômes. Mais, si toi tu te débrouilles à faire un diplôme de l’ISSEG et scanner le diplôme de l’ENI, ça ne peut pas passer. Parce qu’ils ont retourné les faux diplômes a l’ENI à l’ISSEG et que ces directeurs ont reçu à comparer ces diplômes pour dire on reconnait ce diplôme, mais l’autre non.

Guineematin.com : il y a en qui dénoncent aujourd’hui le faible niveau de ces enseignants grévistes. Comment cela peut être résolu ?

Adam Sow : ce ne sont même pas eux maintenant, c’est de façon générale, le faible niveau-là. Ce n’est même pas les contractuels d’Etat qui revendiquent aujourd’hui, mais les enseignants qui ne savent même pas lire, et c’est les plus chauds dans cette grève encore. Au lieu de se former dans les centres ou à travers la lecture, ils ne font que troubler l’ordre de l’éducation. Donc, on en a marre.

Guineematin.com : que demandez-vous aux enseignants grévistes ?

Adam Sow: si tu veux grever, tu restes à domicile, c’est un droit. Mais, ne dérange pas ceux qui sont en classe, reste chez toi. Car ceux qui veulent enseigner les enfants en temps de crise ont aussi le droit tout comme vous les grévistes. Alors, il ne faut pas les déstabiliser, les gens qui veulent aider les élèves. Il faut les laisser enseigner, chacun est libre de sa pensée et de ses actes.

Guineematin.com : quelle invite faites-vous aux parents d’élèves ?

Adam Sow: les parents d’élèves doivent accepter de libérer leurs enfants pour aller suivre les cours, les grévistes ont le droit de rester à domicile. Mais, quand les enfants arrivent à l’école, ils trouveront les enseignants qui vont les prendre, mais si tu ne veux pas que ton enfant aille à l’école, garde-le à la maison, ne laisse pas ton enfant se faire manipuler, sortir dans la rue pour casser. S’il est pris là-bas, c’est sous ta responsabilité et non la responsabilité de l’école. Tout enfant reflète l’éducation de sa famille… On ne doit pas laisser un enfant se faire manipuler pour des casses dans les rues.

Entretien réalisé et décrypté à Kindia par Mohamed M’bemba Condé pour Guineematin.com

Tél. : 628 51 8888

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