Guinée : et si la guerre de succession avait déjà éclaté

Alpha Condé, Mamady Sinkoun Kaba et Cie

Les autorités guinéennes soufflent le chaud et le froid. Le report du double scrutin initialement prévu le 1er mars dernier était un signe d’apaisement. La décision avait été saluée de l’intérieur comme de l’extérieur. Elle était perçue comme la volonté du chef de l’Etat de calmer le jeu. Malheureusement avec l’arrestation, l’inculpation puis la détention de deux membres du FNDC, les illusions commencent à s’effondrer. Pour de nombreux Guinéens, le pessimisme reprend le dessus.

Et pourtant l’espoir d’un dénouement de la crise est permis. Il y a des signes qui ne trompent pas. Le régime, confronté à ses pires difficultés, est à bout de souffle. Il suffit de tenir encore. Comme le font les membres du FNDC. Un certain nombre de faits constituent la preuve que si la résistance continue le pouvoir n’aura pas le choix que de lâcher du lest.

La nouvelle arrestation du duo Kondouno et Diallo est un acte désespéré. Acculé de l’intérieur comme de l’extérieur, le pouvoir, qui manque d’arguments, montre ses muscles. Or dans une situation comme celle que la Guinée traverse, la force et la brutalité n’arrangent rien. Cela n’était passible qu’avant l’implication de la communauté internationale dans la résolution de la crise.

En effet, le moins intelligent d’entre nous sait que dans le contexte actuel ce n’est pas en arrêtant et emprisonnant les contestataires du projet de nouvelle constitution que le pouvoir parviendra à organiser son référendum. D’autant plus que la communauté internationale s’est invitée dans la crise. Ce dernier acte constitue donc une fuite en avant qui complique davantage la situait pour le pouvoir. Lequel est en train de prendre la perche qui lui est tendue par l’opposition et le FNDC.

En outre, l’arrestation de deux activistes constitue une autre preuve : c’est la division qui règne au sein de la mouvance présidentielle. Dans une situation comme celle à laquelle le gouvernement guinéen est confronté, il y a forcément plusieurs tendances au sein de ce gouvernement. Il y a les modérés qui tentent de calmer le jeu. Ceux-ci sont favorables au dialogue. Il y a un deuxième groupe qui manque de courage et de conviction. Celui-là se rallie derrière le groupe vainqueur. Il y a enfin les extrémistes prêts à en découdre avec l’adversaire. Ces derniers se sont fait entendre samedi dernier au siège du parti au pouvoir.

C’est au compte de ce groupe qu’il faudrait mettre l’expulsion du journaliste français et l’arrestation de Sékou Koundouno et d’Ibrahima Diallo. C’est aussi dans la même logique que les durs du régime commencent à faire le tri entre les bons et les mauvais responsables et militants du parti au pouvoir. D’où cette histoire de la fameuse 5ème colonne. Une histoire qui nous rappelle une période peu glorieuse et peu enviable de notre passé.

Cette chasse aux sorcières n’est ni anodine ni fortuite. Elle s’inscrit dans la logique de l’inévitable guerre de succession qui se profile à l’horizon. Car en dépit d’un semblant de sérénité, les responsables du parti ont senti le tsunami venir. A partir du moment où leur leader emblématique peut être sensible au point de reporter une élection à cause des organisations régionales et même sous régionales, il n’est pas sûr qu’il puisse tenir le coup.

Habib Yembering Diallo pour Guineematin.com

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