Veillée d’armes à Conakry

A 48 heures de l’organisation du scrutin le plus controversé de l’histoire de la Guinée, chaque camp affûte ses armes. Le gouvernement menace de sévir contre d’éventuels fauteurs de troubles. Pour avoir un seul son de cloche, les opérateurs de la téléphonie mobile ont été sommés de couper Internet. Même si ces derniers prennent les Guinéens pour un peuple primitif en parlant des travaux de réparation sur leurs réseaux. Mais cela est une autre histoire sur laquelle nous reviendrons une autre fois.

En prélude à cette journée de dimanche 22 mars, une importante réunion des coordinations régionales serait prévue ce vendredi à Tanéné dans la préfecture de Dubréka. Trois coordinations sur quatre pourraient assister à cette importante réunion dont l’ordre du jour serait de prendre les mesures idoines pour concrétiser la menace d’empêcher ce double scrutin.

Au même moment, un proche du chef de l’Etat est sorti de son mutisme pour appeler les protagonistes au dialogue. Moustapha Koutoubou Sano, ancien ministre et actuel conseiller du président Alpha Condé, n’est pas loin d’emboîter le pas à Abdoulaye Yéro Baldé. Même s’il joue quelque peu à l’équilibrisme entre le pouvoir et l’opposition, le ton n’est pas celui d’un homme du sérail.

Pendant ce temps, les deux principales bêtes noires du régime ont, chacun, lancé un appel pressant à ses troupes. Dans une vidéo qu’ils ont adressée à leurs militants respectifs, Cellou et Sidya appellent à barrer la route à ce qu’ils qualifient de coup d’Etat constitutionnel et à protéger la jeune démocratie durement et chèrement acquise. D’autres acteurs de la société civile n’en font pas moins. Tous appellent à la résistance populaire contre le projet de nouvelle constitution.

D’autres leaders politiques, comme Faya Milimono, se sont aussi adressés aux leurs. Tous sont déterminés à aller jusqu’au bout. Sans doute ragaillardis par la perspective de l’isolement diplomatique du régime. Les élections de ce dimanche suscitent une véritable levée de boucliers. Aussi bien de l’intérieur que de l’extérieur du pays. Elles seront les pires que la présidentielle de 2003 où le président Conté n’avait comme seul et unique concurrent, Mamadou Bhoye Barry qu’il avait lui-même sélectionné pour le besoin de la cause.

En effet, une consultation électorale en Guinée sans la participation de l’UFDG, de l’UFR, du PEDN et du BL, pour ne citer que ceux-là, devient de facto une sélection. Condé aujourd’hui, comme Conté autrefois, a sélectionné ses concurrents pour légitimer ses élections. Mais aujourd’hui comme hier, les mêmes causes produisent les mêmes effets. Les principaux partenaires de la Guinée lors de toutes ses élections brilleront par leur absence.

Or une élection en Afrique au Sud du Sahara où il n’y a pas d’observateurs de l’Union africaine, la CEDEAO encore moins de l’Union européenne ou l’organisation internationale de la francophonie, une telle élection, dis-je, souffre d’une terrible illégitimité. C’est autant dire que les patriotes de toutes les régions et de toutes les sensibilités politiques, y compris au sein du RPG devraient malgré le temps qui leur est imparti, se lever pour faire comme M. Moustapha Koutoubou Sano : faire entendre raison à monsieur Alpha Condé.

Lequel Alpha Condé est le seul à présenter le bilan à la fin de son mandat. Le seul à répondre aussi d’éventuels dégâts collatéraux consécutifs à des élections contestées à la fois par l’opposition politique, la société civile et, une fois n’est pas coutume, les coordinations régionales.

Habib Yembering Diallo pour Guineematin.com

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