Déportation d’opposants à Kankan : Francis Haba dénonce « une situation inédite et regrettable »

Pépé Francis Haba, président du parti UGDD
Pépé Francis Haba, président du parti UGDD

Des voix continuent de s’élever pour fustiger les arrestations d’opposants enregistrées ces dernières semaines à N’Zérékoré et leur déportation au camp de Soronkoni, puis à la prison civile de Kankan. Au cours d’un entretien qu’il a accordé à Guineematin.com, Pépé Francis Haba, le président du parti Union Guinéenne de pour la Démocratie et le Développement (UGDD) s’est insurgé contre cette situation. Pour lui, il est inadmissible que le pouvoir guinéen continue d’arrêter et écrouer des opposants pendant que d’autres pays sont en train de libérer leurs prisonniers à cause de la pandémie du coronavirus.

« C’est une situation inédite et regrettable. Pendant que tous les dirigeants du monde s’activent et rassemblent toutes les forces vives de la nation pour lutter contre le Covid-19, les nôtres s’attèlent à régler des comptes avec les militants du FNDC qui se sont opposés aux élections illégales et illégitimes du 22 mars. La déportation des opposants dans les geôles de Kankan comme Soronkoni ou d’autres centres de concentration nous rappelle la sombre histoire du camp Boiro pendant le régime de feu Sékou Touré où des milliers de guinéens ont été condamnés sans procès équitables et torturés. Je condamne cette pratique dictatoriale avec la dernière énergie et je demande leur libération immédiate », a-t-il déclaré.

Pour cet opposant membre du FNDC, le pouvoir a arrêté les victimes des violences qui ont secoué le double scrutin législatif et référendaire à N’Zérékoré en lieu et place des bourreaux. Une façon pour le régime Alpha Condé de faire taire toutes les voix discordantes dans cette région, dénonce le président de l’UGDD. « Le cas particulier de la région forestière et de N’Zérékoré dépasse tout entendement et mérite une analyse particulière, le pouvoir y ayant dépassé toutes les limites acceptables. Alpha Condé et le RPG Arc-en-ciel dans leur ambition hégémonique considèrent cette partie de la Guinée comme un prolongement naturel de leur fief (Haute Guinée) puisque le soutien apporté par la Forêt à travers Dadis et une coalition de plusieurs formations politiques dont la nôtre (UGDD) avaient été décisif à l’élection présidentielle de 2010.

Fort malheureusement, les populations de la région ont rapidement rejeté Alpha Condé et son magistère à cause de la mal gouvernance et des promesses électorales non tenues. Ainsi, depuis 2012, la région paye un lourd tribut sur fond d’injustice, d’intimidations et de répressions. L’objectif étant d’y éteindre toutes voix discordantes afin d’y constituer un fief imaginaire par la fraude électorale. On peut se souvenir du cas révoltant et particulier du patriarche de N’Zérékoré dont la maison familiale avait été brûlée (en marge des affrontements inter-communautaires de juillet 2013), lui-même humilié et violenté par des militants connus du RPG Arc-en-ciel qui furent brièvement arrêtés puis libérés sans jugement afin de leur permettre de participer à la campagne des élections législatives de septembre 2013 avec le pouvoir.

Pépé Francis Haba, président du parti UGDD

Ainsi, le fait que les populations de Guéckédou à Diéké en passant par Macenta et Yomou, de Boola à Lola en passant par N’Zérékoré aient massivement réfuté le prétendu double scrutin du 22 mars 2020, a laissé un gout amer dans le gosier du pouvoir. Afin de préparer frauduleusement l’élection présidentielle de 2020, le pouvoir est donc en train de faire le ménage dans cette partie de la Guinée en profitant de la crise sanitaire et des violences électorales et post-électorales qui ont été commises par sa propre négligence. Ce n’est donc pas étonnant qu’il (le pouvoir) continue l’arrestation de personnes innocentes comme bouc émissaires. Sinon, comment pouvons-nous expliquer qu’il n’y ait pas de partisans du pouvoir interpellés ?

La quarantaine de militants de l’opposition appréhendés et transférés dans les prisons de Kankan sont ceux dont les églises ont été brûlées, les maisons calcinées et les familles tuées et enterrées dans une fausse commune. Il suffit de scruter leur liste pour se rendre compte de l’évidence. Ils ont été arrêtés en grande majorité dans les villages à leurs domiciles, certains pendant qu’ils avaient érigé des cordons de sécurité pour empêcher que les affrontements du centre-ville affectent leurs paisibles localités et d’autres pendant qu’ils y arrivaient pour secourir leurs familles en danger puisque les autorités de la ville et les forces de défense et de sécurité les avaient abandonnées dans les mains des éléments de l’Unimo et des Donzos, connus dans la sous-région pour les atrocités déjà commises », soutient Pépé Francis Haba.

Propos recueillis par Léon Kolié pour Guineematin.com

Tel : 661 74 99 64

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