Ousmane Keïta, guéri de la Covid-19 : « Alima n’a pas servi les malades que nous étions »

Ousmane Kéïta, président de l'union des consommateurs de Guinée
Ousmane Kéïta, président de l’union des consommateurs de Guinée

Selon les statistiques en date du 10 mai 2020 fournies par l’agence nationale de sécurité sanitaire, sur les 2 146 cas positifs de coronavirus enregistrés en Guinée, 714 sont sortis guéris. Et parmi ces guéris, on retrouve Ousmane Keïta, le président de l’union des consommateurs de Guinée.

A peine sorti du centre de traitement épidémiologique (CTE) de Donka, il a accordé un entretien à la Guineematin.com ce lundi, 11 mai 2020. Il est revenu notamment sur la souffrance que cette maladie lui a fait traverser et la qualité de la prise en charge à l’hôpital Donka.

Décryptage !

Guineematin.com : après plusieurs jours de traitement au CTE de Donka, vous avez été déclaré guéri du coronavirus. Comment vous sentez-vous aujourd’hui ?

Ousmane Keïta : je me sens mieux. Au sortir d’une péripétie compliquée, on a toujours quelques petites séquelles. Donc, je peux dire que je suis un peu fatigué. Au départ, j’avais du mal à marcher mais maintenant, avec la rééducation des muscles à la maison, j’arrive à marcher correctement et à reprendre petit à petit la forme.

Guineematin.com : comment avez-vous compris que vous êtes atteint de la Covid-19 ?

Ousmane Keïta : c’était un vendredi, j’étais avec un de mes partenaires qui avait été testé négatif. J’ai ressenti des douleurs, une sorte de légère courbature au niveau de mon corps et une sorte de démangeaison à la gorge. A partir de cet instant, j’ai dit attention, avec les émissions que je suis à la télévision, on dit que si tu as ces deux symptômes, il faut faire attention. Automatiquement, j’ai appelé un de mes contacts pour faire le test de dépistage le lendemain. Et deux jours après, j’ai eu les résultats qui révélaient que j’étais positif. Mais, dès que j’ai senti ces symptômes, j’ai alerté ma femme pour dire attention, je ne sais pas ce que c’est ; mais, à partir de maintenant, que personne ne rentre en contact avec moi. Comme il y a un peu d’espace chez moi, je suis rentré directement en confinement. J’ai pris une chambre pour rester seul jusqu’à mon départ pour l’hôpital.

Guineematin.com : une fois à l’hôpital, comment les choses se sont passées là-bas pour vous ?

Ousmane Keïta : pour commencer, je te conseille de ne pas souhaiter cela même à tes pires ennemis. Je suis rentré à Donka un lundi ou un mardi, je ne me rappelle plus exactement de la date ; le même soir, la chose s’est déclenchée ! J’ai eu une forte fièvre jusqu’à ce qu’un jeune du nom de Bakary que je connaissais est venu tremper un mouchoir pour le passer sur mon corps. Finalement, il a dû tremper le mouchoir pour imbiber mon matelas parce que sinon je ne pouvais pas tenir. Je me souviens aussi que je déambulais par moment dans les couloirs de l’hôpital à la recherche de l’air frais. Pourquoi ? Je ne sais même pas. Le premier brancard que je voyais, je me couchais dessus.

Alors, quelques jours après, je suis rentré dans une anorexie profonde. Je ne voulais pas manger. Chaque fois que je mangeais, je vomissais. Je suis passé comme ça pendant deux jours. Ensuite, il y a mes voisins, ma femme et mes enfants qui m’ont dit que si je ne faisais pas attention, je risquais de mourir. C’est ce jour que j’ai commencé à manger, même si je vomissais, pourvu qu’il y ait un peu de nourriture dans mon ventre. Les médecins que je remercie, particulièrement Dr Salam et Dr Condé, étaient tout le temps à mes côtés et ils ont tout fait pour que je mange. Je pense qu’ils m’ont donné des perfusions nutritives ; et, c’est à partir de là que j’ai commencé à voir la petite lumière au bout du tunnel.

Guineematin.com : comment appréciez-vous la prise en charge au CTE de Donka ?

Ousmane Keïta : au moment où j’y entrais, c’est Alima qui servait de la nourriture là-bas. Mais, excusez-moi du mot parce que je suis très fâché, c’était de la merde. Par contre, j’ai bien aimé le changement de service parce que par après, on a commencé à bien manger et correctement. Je ne peux pas dire que c’était des mets de 4 étoiles mais au moins de 2 étoiles. Donc, cela a vraiment remonté le moral des malades dont moi parce qu’avec cette maladie, il faut bien manger et boire beaucoup. Franchement, je dirais qu’Alima n’a pas servi les malades que nous étions. Par contre, le nouveau prestataire, je ne sais pas qui c’est, a fait en sorte que les malades aient vraiment le moral.

Guineematin.com : quel est votre constat sur le service rendu par les médecins ?

Ousmane Keïta : en matière de traitement, il y a eu beaucoup de rumeurs. Mais, je puis vous dire que la plupart d’entre elles sont infondées. Je peux vous dire que les médecins que nous avions venaient nous rendre visite trois fois par jour. Effectivement, il y avait des tares parce que je pense qu’il y avait un manque d’effectif et ces médecins ne pouvaient pas nous dire qu’il y a un manque d’effectif. Donc, c’est vrai, il y a avait des moments où c’était très difficile. On les appelait, mais ils ne venaient pas parce qu’ils n’étaient pas si nombreux. J’ai discuté à bâton rompu avec l’un d’entre eux dont je vais taire le nom. C’est là que j’ai compris que ce n’est pas tous les médecins qui ont le courage d’aller à l’hôpital Donka. Beaucoup de médecins dans le monde ont trouvé la mort parce qu’ils ont soigné les malades. Imaginez-vous un peu que les gens qui prennent le risque d’y aller pour s’occuper des malades, on vient les insulter. Donc, c’est ça la réalité. C’est vrai qu’il y a eu des dysfonctionnements, les toilettes étaient à un moment très sales ; mais, par après, des corrections ont été effectuées. Je pense donc que ces médecins sont à encourager et à féliciter.

Guineematin.com : avez-vous un conseil à donner aujourd’hui à la population guinéenne ?

Ousmane Keïta : je vais dire que vous pouvez prendre en compte toutes les mesures barrières, mais un jour vous pouvez faire une petite erreur qui peut faire que ce virus, qui se promène à côté de chacun de nous, vous attrape. A chaque fois que tu marches, il n’attend qu’une seule occasion. Cette occasion n’arrive que lorsque tu rentres en contact avec beaucoup de personne. Donc, au-delà du respect des gestes barrières, je demande à tout le monde de rester confiné chez soi et ne sortir qu’en cas d’extrême nécessité.

Interview réalisée par Alpha Assia Baldé pour Guineematin.com

Tél : 622 68 00 41

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