Violation des Droits de l’homme : la Coalition Guinéenne pour la CPI dénonce et réclame justice

La Cour Pénale Internationale (CPI) célèbre ses 22 ans d’existence ce vendredi, 17 juillet 2020. Créée en 1998 pour mettre fin à l’impunité sur les crimes les plus graves, la CPI fait du chemin même si elle est souvent contestée. Pour célébrer cette journée, la Coalition Guinéenne pour la CPI (CGCPI) a organisé une conférence de presse à Conakry. La structure a mis l’occasion à profit pour dénoncer les nombreuses violations des droits de l’Homme en Guinée avant d’interpeller les autorités pour que justice soit faite.

Déclaration :

Le dix-sept juillet 2020, la Coalition Guinéenne pour la Cour Pénale Internationale (CGCPI), à l’instar des autres Coalitions dans le monde, célèbre les vingt-deux (22) ans de la création de la Cour Pénale internationale (CPI) le 17 juillet 1998 à Rome, Journée dédiée à la justice pénale internationale.

Au moment de cette célébration, les guinéens qui traversent à la fois une crise sanitaire due à la Covid 19 et une crise sociopolitique endémique, sont victimes de cas graves de violations des droits de l’homme, notamment Interdiction du droit de manifestation sur toute l’étendue du territoire national, les arrestations, détentions et poursuites judiciaires contre les citoyens qui s’opposent à l’adoption d’une nouvelle constitution et a un troisième mandat pour l’actuel Président de la République.

En considération de ce qui précède, il sera question donc des vingt-deux (22) ans du Statut de Rome du 17 juillet 1998 (A) et la crise sociopolitique, ainsi que la crise sanitaire due à la Covid -19 qui frappent la Guinée(B).

1. A) Les vingt-deux (22) ans du Statut de Rome du 17 juillet 1998

La Cour Pénale Internationale (C.P.I) a été créée en 1998 pour mettre fin à l’impunité concernant les crimes les plus graves. Il s’agit précisément, conformément à l’article 05 du Statut, des crimes de génocide, des crimes contre l’humanité, des crimes de guerre et du crime d’agression. Cependant, il est important de souligner qu’il incombe aux juridictions nationales, a priori, de juger ces crimes atroces. La CPI n’interviendra que dans des circonstances exceptionnelles ou limitées, comme le prévoit l’article 01 du Statut.: « ll est créé une Cour Pénale Internationale, en tant qu’institution permanente, qui peut exercer sa compétence à l’égard des personnes pour les crimes les plus graves ayant une portée internationale, au sens du présent Statut. Elle est complémentaire des juridictions pénales nationales ».

En analysant les dispositions de l’article 01 précité du Statut de Rome, on comprend aisément que la CPI est une juridiction de dernier recours et que ce sont les juridictions nationales qui ont un grand rôle à jouer.

Il convient également de rappeler que la CPI est la première juridiction pénale internationale permanente. C’est pourquoi en dépit de ses faiblesses et des menaces dont elle fait l’objet, cette institution doit être soutenue afin qu’elle soit universelle, indépendante et efficace.

1. B) La crise sociopolitique et la crise sanitaire due à la Covid 19 en Guinée

La République de Guinée traverse une crise sans précédent marquée par de graves violations des droits de l’homme depuis le 14 octobre 2019, date du déclenchement de la contestation populaire contre le changement constitutionnel et le projet de troisième mandat en faveur du Président Alpha Condé. Le Front National pour la Défense de la Constitution (FNDC) composé de partis politiques, de syndicats.de membres de la société civile et de citoyens engagés, à l’aune de la résistance active et permanente, a lancé plusieurs appels à manifestations pour protester contre toutes les formes de velléités de confiscation du pouvoir. La contestation, plusieurs fois réprimée, a déjà occasionné depuis mi-octobre la mort d’au moins vingt civils et un gendarme.

A cette situation, le Président Alpha Condé et son entourage ont opté pour un passage en force en adoptant illégalement et frauduleusement une nouvelle constitution qui ouvrira les portes d’une présidence à vie.

Ainsi, en lieu et place de renforcer la démocratie et l’Etat de droit à travers le respect des libertés publiques, le pouvoir en place a utilisé la violence comme moyen de musellement et d’étouffement de toutes formes d’opposition. C’est ce qui explique les tueries de près d’une quarantaine de guinéens à Conakry et à l’intérieur du pays, notamment dans la région de N’Zérékoré.

Le 22 mars 2020, en plein épidémie de covid 19, le président Alpha Condé a fait organiser un référendum et des élections législatives les plus controversées de l’histoire sociopolitique de la Guinée.

Un double scrutin marqué par des dizaines de morts et plusieurs blessés ainsi que d’arrestations, de détentions arbitraires, de destruction d’édifices publics et privés.

Bon nombre d’observateurs nationaux et internationaux (CEDEAO, UE, UA, OIF, ONU) ont alerté sur les violations des droits de l’homme qui ont entraîné la mort d’une dizaine de citoyen guinéens, le manque de crédibilité, le caractère non inclusif des élections et le manque de consensus sur le fichier électoral.

A noter également les violences intercommunautaires survenues à Nzérékoré lors du double scrutin où on a dénombré près de 36 morts, plusieurs disparus, de destruction de lieux de culte, des arrestations arbitraires et de dégâts matériels importants, ce, selon le rapport du collectif des défenseurs des droits de l’homme en Guinée forestière.

A Labé, deuxième ville de Guinée, la nuit du 22 au 23 mars, des fidèles musulmans ont été empêchés d’accomplir leur devoir religieux. Des policiers sont venus les gazer en pleine prière. Puis, ils ont mis le feu aux motos stationnées devant la mosquée.

C’est dans ce contexte que la pandémie de la covid19 est apparue en Guinée le 12 mars 2020.

Pour tenter de la contenir, le Président Alpha Condé a décrété L’Etat d’urgence sanitaire avec des mesures de restrictions et de confinement qui ont été gérées de façon parfois excessive. Les forces de défense et de sécurité ont souvent profité de l’impunité pour se livrer à des excès et des bavures sur des pauvres citoyens.

A Coyah, une localité située à 50 km de la capitale Conakry, et en plein mois de Ramadan, des agents des forces de l’ordre postés au barrage de Friguiadi ont ouvert le feu sur une population civile qui manifestait contre les tracasseries des forces de l’ordre. Bilan: sept 7 morts et des dizaines de blessés dont une femme enceinte.

Plus grave encore, la CGCPI, constate que les militants des droits de l’homme et le monde universitaire font l’objet d’interpellations et de détentions illégales. Il est en est, à titre purement illustratif des cas de Oumar SYLLA Alias Foniké Mangué, Saikou Yaya DIALLO et du jeune enseignant-chercheur Docteur Mouhammadou DIALLO de l’université Général Lansana CONTE de Sonfonia, sans oublier les quarante-trois (43) détenus à Kankan.

La CGCPI rappelle que toutes les crises en Guinée, voire en Afrique, ont pour origine le maintien ou l’accession au pouvoir politique, c’est-à-dire l’alternance au pouvoir, ipso facto l’organisation d’élections crédibles, transparentes et acceptées de tous.

En considération de ce qui précède, la Coalition Guinéenne pour la Cour Pénale

1) Soutient la Cour Pénale Internationale afin qu’elle soit indépendante,

2) Exige la libération sans condition des personnes illégalement arrêtées

3) Exhorte et encourage le peuple de Guinée à user de toutes les voies

4) Appelle les cours et tribunaux à poursuivre les présumés auteurs des différents crimes commis en Guinée, sans aucune discrimination.

5) Invite les populations guinéennes à respecter les mesures sanitaires prises par les structures compétentes.

6) Demande au gouvernement d’alléger l’état d’urgence sanitaire en réduisant le prix du carburant à la pompe.

7) Rappelle que la solution aux problèmes guinéens réside dans le strict respect des lois de la République et non dans les dialogues dilatoires.

Conakry, le 17 juillet 2020

Pour le bureau Exécutif National

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