Changer la Constitution pour rester au pouvoir, une pratique courante en Afrique (REPERES)

(AFP) – Avant le président guinéen Alpha Condé, dont le parti a réclamé jeudi qu’il brigue un troisième mandat, de nombreux chefs d’Etat africains ont tenté – souvent avec succès – de se maintenir au pouvoir en modifiant la Constitution.

La Constitution guinéenne limitait le nombre de mandats à deux. Mais, l’adoption en début d’année d’une nouvelle loi fondamentale, lors d’un référendum boycotté par l’opposition, permet selon ses partisans à M. Condé, 82 ans, de remettre son compteur à zéro et de participer à la présidentielle prévue d’ici la fin de l’année.

– Tentatives réussies

– COMORES : Un référendum constitutionnel renforce en 2018 les pouvoirs d’Azali Assoumani, lui permettant de briguer deux mandats au lieu d’un. Celui-ci est réélu en 2019 lors d’un scrutin entaché de fraudes.

– RWANDA : Une réforme de la Constitution adoptée fin 2015 permet à Paul Kagame de se présenter pour un nouveau mandat en 2017 et de potentiellement diriger le pays jusqu’en 2034.

– CONGO : Une nouvelle Constitution adoptée par référendum en 2015 fait sauter les verrous qui interdisaient à Denis Sassou Nguesso de briguer un 3e mandat : la limite d’âge et celle du nombre des mandats. Il est réélu en 2016.

– DJIBOUTI : Le Parlement, entièrement acquis à la cause d’Ismaël Omar Guelleh, adopte en 2010 une révision constitutionnelle supprimant toute limitation du nombre de mandats présidentiels. Au pouvoir depuis 1999, Omar Guelleh a pu briguer de nouveaux mandats en 2011 et 2016.

– ALGERIE : Le Parlement adopte en 2008 une révision de la Constitution supprimant la limitation à deux du nombre de mandats présidentiels. Abdelaziz Bouteflika, au pouvoir depuis 1999, est réélu en 2009 puis en 2014. Il est poussé à la démission en avril 2019 sous la pression d’une contestation inédite.

– CAMEROUN : Une révision constitutionnelle en 2008 supprime la limitation des mandats présidentiels. Paul Biya, au pouvoir depuis 1982, est réélu pour un 7e mandat en 2018.

– TCHAD : Une révision constitutionnelle adoptée lors d’un référendum controversé en 2005 supprime la limitation à deux quinquennats présidentiels. Idriss Deby Itno, au pouvoir depuis 1990, est réélu en 2016 pour un 5e mandat.

– TOGO : Un amendement à la Constitution fait disparaître fin 2002 la limite de deux mandats présidentiels, permettant à Gnassingbé Eyadéma, au pouvoir depuis 1967, de briguer un nouveau mandat en 2003. Son fils, Faure Gnassingbé, qui lui a succédé après son décès en 2005, a été depuis réélu trois fois lors de scrutins contestés par l’opposition.

– Tentatives avortées

– BURKINA FASO : la volonté de Blaise Compaoré de modifier la Constitution afin de briguer un nouveau mandat après plus de 27 ans de pouvoir est à l’origine du soulèvement populaire qui le contraint à l’exil en 2014.

– ZAMBIE : Frederick Chiluba a dû renoncer à modifier la Constitution en 2001 sous la pression populaire.

MALAWI, le Parlement s’est opposé en 2002 à ce que Bakili Muluzi brigue un 3ème mandat en 2004.

– Cas particuliers

BURUNDI : La candidature de Pierre Nkurunziza à un 3e mandat plonge le pays en 2015 dans une grave crise (au moins 1 200 morts). M. Nkurunziza, au pouvoir depuis 2005, annonce en 2018 qu’il ne se présentera pas en 2020, alors que la nouvelle Constitution venant d’être adoptée par référendum le lui permet. Le candidat du parti au pouvoir, Évariste Ndayishimiye, est élu en mai 2020. M. Nkurunziza est décédé le 8 juin.

COTE D’IVOIRE : Au pouvoir depuis 2011, Alassane Ouattara annonce en mars 2020 qu’il ne se présentera pas à l’élection d’octobre. Le changement de Constitution adopté en 2016 lui en donne pourtant le droit à ses yeux, ce que conteste l’opposition. Il fait investir comme candidat Amadou Gon Coulibaly mais celui-ci décède subitement en juillet et son parti le presse depuis de se présenter pour un troisième mandat.

AFP

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