Makalé Camara, candidate à la présidentielle du 18 octobre : « nous avons des bilans à opposer au peuple de Guinée »

« Le peuple est souverain, et c’est à lui de décider. Est-ce que le peuple veut se donner des chances avec une femme cette fois-ci pour que le rayonnement dont il a été question, le changement dont il a été question tout le temps, soit effectif ? Donc, c’est à la Guinée de décider de ce qu’elle veut. Est-ce qu’elle veut se doter d’une meilleure gestion, d’un meilleur chef ? Est-ce que la Guinée veut continuer ce qu’elle a commencé ? C’est au peuple de Guinée de le décider », a déclaré Hadja Makalé Camara, candidate à la présidentielle du 18 octobre prochain.

Ancienne ministre et ancienne ambassadrice, la candidate du Front pour l’Alliance Nationale (FAN) s’engage pour la première fois dans la course à la magistrature suprême de la Guinée. Quelles sont ses motivations ? Quelles sont ses chances de remporter cette bataille électorale ? Ce sont entre autres les questions auxquelles elle a répondu au cours d’une interview qu’elle a accordée à Guineematin.com ce samedi, 12 septembre 2020.

Décryptage !

Guineematin.com : vous venez de vous lancer en politique en prenant la tête du parti FAN ; et sans perdre du temps, vous briguez la magistrature suprême. Qu’est-ce qui a motivé votre entrée en politique ?

Hadja Makalé Camara : je suis en politique depuis que je suis ministre. Parce qu’être ministre déjà, personnalité publique, vous faites de la politique. Mais bien évidemment, prendre la tête d’un parti politique, ça ne s’est fait qu’en mars dernier. Et, je suis candidate à l’élection présidentielle prochaine. Je suis entrée en politique parce que ça me fait plus d’une trentaine d’années de hautes fonctions publiques. J’ai géré les travailleurs en tant que secrétaire générale du travail, et je suis juriste privatiste du Droit du travail. Je connais le paysannat en tant qu’ancienne ministre de l’agriculture, mais aussi je connais les femmes en tant que ministre de la Femme. Ayant été Ambassadeur, je connais aussi les problèmes de l’extérieur.

Et, je pense qu’il est temps de bien vouloir prendre moi-même les décisions qui s’imposent pour ce pays. En tant que femme, en tant que personnalité publique, en tant que juriste, en tant qu’activiste de la société civile par ailleurs, puisque j’ai été la toute première secrétaire générale du Réseau des Femmes Africaines, Ministres et Parlementaires ; mais aussi la présidente des Femmes et Jeunes de Guinée pour la Paix. Donc, je pense qu’après avoir fait tout cela, m’investir sur la migration irrégulière avec mon ONG, je pense qu’il est temps que je puisse en dernier ressort, avoir la dernière décision pour essayer de mettre en application tout ce que j’ai fait pour l’enfant, la femme et les jeunes de Guinée.

Guineematin.com : vous avez en face 11 candidats, dont le président sortant, Alpha Condé, et son principal opposant, Cellou Dalein Diallo. Quelles sont vos chances de remporter cette élection ?

Hadja Makalé Camara : est-ce que la Guinée veut réellement un changement ? Puisque les mastodontes dont vous avez parlé tout à l’heure occupent la scène publique depuis plus d’une dizaine d’années. Est-ce que le Guinéen est satisfait de la gestion de l’économie de son pays ? Est-ce que le Guinéen est satisfait de tout ce qui lui arrive dans ce pays ? Si c’est le cas, c’est le peuple qui va décider. Le peuple est souverain, c’est à lui de décider dernièrement. Est-ce que le peuple veut se donner des chances avec une femme cette fois-ci pour que le rayonnement dont il a été question, le changement dont il a été question tout le temps, soit effectif ? Donc, c’est à la Guinée de décider de ce qu’elle veut. Est-ce qu’elle veut se doter d’une meilleure gestion, d’un meilleur chef ? Est-ce que la Guinée veut continuer ce qu’elle a commencé ? C’est au peuple de Guinée de le décider. Et je pense qu’en toute chose, il faut considérer la fin.

Guineematin.com : vous êtes parfois très critique à l’égard de la gouvernance du président Alpha Condé ; une gouvernance à laquelle vous avez pourtant appartenue. N’est-ce pas un paradoxe ?

Hadja Makalé Camara : ce n’est pas un paradoxe, parce qu’une gouvernance n’est pas 100% mauvaise. Mais, elle n’est tout autant pas aussi 100% parfaite. Je pense qu’il faut améliorer, il faut aller de l’avant. J’ai appartenu au gouvernement du Professeur Alpha Condé pour un an et demi. Ça n’a pas suffi pour que je puisse accomplir tout ce que j’avais besoin d’accomplir. Mais déjà, en un an et demi, j’ai redoré le blason du ministère des Affaires étrangères parce que le bâtiment que vous avez flambant neuf devant l’Ambassade des Etats Unis, c’est grâce à mon entremise que ce bâtiment a été érigé. J’ai bénéficié de 3 bus pour les travailleurs de mon département en un an et demi. J’ai changé la physionomie de ce ministère.

Et, avec la baraka, on s’est battu, la Guinée a appartenu à l’Union africaine. Donc, je pense qu’il y a des choses à améliorer dans ce pays. Je ne dénonce pas, je décris ce que je vois dans l’environnement. Les routes, c’est une vraie catastrophe. Je ne sais pas comment nous allons faire pour la campagne avec l’état de nos routes aujourd’hui. L’eau c’est un problème, la corvée d’eau incombe à la femme. Et cela me fait pitié de voir toujours les femmes guinéennes en queue derrière les maisons des propriétaires pour recueillir de l’eau. L’électricité elle-même, avec un pays comme le nôtre, ce n’est pas fini. Pour moi, la bouteille est à moitié pleine. Il faut se battre pour que la bouteille soit effectivement pleine.

Guineematin.com : le FAN va se lancer bientôt dans la campagne électorale. Quelle stratégie votre parti politique compte adopter pour faire adhérer les Guinéens à ses idéaux ?

Hadja Makalé Camara : vous voulez que je dévoile ma stratégie ici alors que nous sommes 12 candidats ? Nous allons nous battre comme tous les autres candidats. Nous allons nous battre avec notre programme de société que nous allons expliquer de fond en large aux Guinéens pour qu’ils comprennent ce que nous pouvons leur apporter de nouveau, de bien et surtout de tangible. Moi, je dis en dernier ressort, que les programmes se ressemblent bien évidemment puisque la réalité de la Guinée est une réalité que nous vivons tous les jours.

Mais, ce qui peut différencier les candidats, c’est non seulement leur bonne volonté, mais c’est aussi leur patriotisme, leur amour pour ce pays. Nous avons été éduqué ici dans ce pays, nous avons grandi ici dans ce pays, devant tout le monde, c’est l’école guinéenne qui est à la charge. Nous savons qui est qui, nous savons qui a fait quoi, nous avons des bilans à opposer au peuple de Guinée. Donc, c’est à lui de décider en dernier ressort quel est le chef qu’il veut se donner.

Guineematin.com : c’est la fin de cet entretien. Quel est votre mot de la fin ?

Hadja Makalé Camara : je vous remercie. Je suis heureuse d’intervenir sur votre site. Je voudrais profiter de cette opportunité que vous m’offrez généreusement pour lancer un appel à l’ensemble du peuple de Guinée pour dire d’essayer de mettre au pouvoir une femme. Les femmes aiment la rigueur, les femmes aiment les choses bien faites. Ce qui me motive profondément, c’est la cause de nos enfants.

Je ne peux pas tolérer aujourd’hui de voir nos enfants dans les cafés, alors qu’ils devraient être dans les écoles, ils devraient être dans des chantiers, ils devraient être en apprentissage. C’est un crime pour notre pays que de ne pas donner du boulot à nos enfants. Je lance aussi un appel aux femmes : vous les femmes, c’est votre pouvoir, pouvoir pour les hommes, pouvoir pour nos enfants, essayez de changer la donne dans ce pays aujourd’hui pour que nous imprimions une nouvelle gouvernance à la Guinée.

Interview réalisée par Ibrahima Sory Diallo pour Guineematin.com
Tél. : (00224) 621 09 08 18

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