Crise politique en Guinée : « Alpha Condé est en fin de règne » (UDRG-Paris)

Thierno Chérif Diallo, secrétaire général de la section UDRG à Paris
Thierno Chérif Diallo, secrétaire général de la section UDRG à Paris

Pour Thierno Chérif Diallo, secrétaire général de la section de l’Union des Démocrates pour la Renaissance de la Guinée (UDRG) à Paris, la violence d’Etat constatée actuellement en Guinée est un signe d’une fin de règne. L’opposant estime que le régime Alpha Condé est en perte de vitesse et que c’est pourquoi il bascule de plus en plus dans l’autoritarisme. Il l’a dit au cours d’un entretien qu’il a accordé à Guineematin.com hier, samedi 21 novembre 2020. Notre interlocuteur en a profité également pour expliquer les raisons qui l’ont amené à s’engager aux côtés de Bah Oury pour mener le combat politique.

« Dans un pays démocratique, on n’emprisonne pas ses opposants. On les laisse parler et proposer et puis, on les attaque sur le terrain des idées, pas sur le terrain physique ou existentiel… Embrigader les leaders de l’UFDG est une menace pour la démocratie guinéenne et une menace pour l’existence de notre pays parce que ça va pousser les uns et les autres à se radicaliser. Et, un peuple radicalisé, c’est un peuple prêt à tout », a fait remarquer le premier responsable de l’UDRG à Paris. Pour lui, cette radicalisation du régime ne peut annoncer que sa fin : « Alpha Condé est en fin de règne. Vous savez que la fin d’une dictature est toujours féroce, toujours sanglante. Et, c’est à ça qu’on assiste aujourd’hui en Guinée »…

Décryptage :  

Guineematin.com : parmi la multitude de partis politiques qui existent en Guinée, vous avez décidé de militer au sein de l’UDRG, jeune formation politique dirigée par monsieur Bah Oury. Qu’est-ce qui motive votre choix ?

Thierno Chérif Diallo : le choix est simple. Aujourd’hui, on est dans un pays où le débat est très communautarisé. On ne peut pas parler de politique sans qu’on ne soit renvoyé vers son patronyme. J’ai connu Bah Oury quand il était en exil ici (en France) en 2012. Je le fréquentais et je me suis rendu compte que le monsieur était différent des autres de par son humilité, de par la vision qu’il a de notre pays et surtout de par la pertinence de ses analyses. J’ai longtemps hésité mais quand il a été investi président de l’UGRD, je me suis dit  que le moment est arrivé. Il fallait vraiment qu’on donne la chance à ce monsieur, pousser ses idées en avant afin que notre pays redevienne un pays normal.

Comme vous le savez, le président Bah Oury est quelqu’un de très pertinent. On l’a suivi durant toutes ces années. Donc, je ne pouvais pas m’engager ailleurs que chez lui. Je sais que le combat ne sera pas facile parce qu’on crée tout de nouveau, mais je sais que c’est aussi un combat qui a du challenge. Venir dans un parti où presque rien n’est fait, participer à son élaboration, à son implantation au niveau international et à impacter l’orientation politique et idéologique du parti, je me suis dit que c’est le parti qu’il me fallait d’autant plus que son leader tient la route. On a vu toutes ces positions ces derniers temps par rapport à la crise actuelle en Guinée. Aujourd’hui, le développement des choses lui donne raison, malheureusement.

Guineematin.com : vous déplorez la communautarisation du débat politique, et vous vous engagez dans le même temps aux côtés d’un leader qui est issu de la même communauté que vous. Où est votre démarcation ?

Thierno Chérif Diallo : la démarcation est la posture du leader, Bah Oury. Le président Bah Oury est aujourd’hui soutenu par les différentes composantes de notre pays. Et, en ma connaissance, ce n’est pas un leader qui souffre d’un doute sur son orientation. Il ne souffre pas aussi d’un doute ethnocentriste. Je n’ai jamais entendu quelqu’un dans les attaques concernant le président Bah Oury dire qu’il est un ethnocentriste. Moi, je ne vois pas comme un Bah. Je vois un leader devant moi. Un leader qui peut donner à notre pays la chance qu’il n’a jamais eue. Donner à notre pays un socle de développement, où tout guinéen ne sera pas jugé en fonction de son patronyme.

Guineematin.com : étant loin de la Guinée, quel regard portez-vous aujourd’hui sur la situation politique de notre pays ?

Thierno Chérif Diallo : c’est un regard assez critique. Quand on est à l’étranger et surtout qu’on vit dans un pays développé, et qu’on voie notre pays d’origine embourbé dans ce chaos institutionnel, social, politique, économique et même existentiel, on reste assez critique et on essaie de se bouger et de trouver des solutions. La seule chose qu’on ne peut pas faire, c’est de s’engager dans quelque chose de communautariste. L’existence de la Guinée est nationale. La sortie de crise ne pourra jamais être régionale ou communautaire.

Malheureusement, on est aujourd’hui dans ce schéma, et il faudrait qu’on s’en sorte. Personne n’a intérêt à ce que cette situation perdure, sauf une minorité. J’aime souvent dire  que l’opposition entre les deux communautés majoritaires du pays, c’est de miner la Guinée définitivement. Il n’y aura aucun développement, aucun essor sur le plan politique, économique ou culturel, tant que la Guinée sera divisée.

Guineematin.com : le scrutin présidentiel du 18 octobre dernier a débouché sur une crise post-électorale qui a fait beaucoup de morts, de nombreux blessés et d’importants dégâts matériels. Ensuite, il y a beaucoup de responsables et de militants de l’opposition qui ont été arrêtés et incarcérés. Quelle analyse faites-vous de cette situation ?

Thierno Chérif Diallo : la première des choses, c’est d’abord de m’incliner devant les mémoires de toutes les personnes abattues par un régime criminel. Deuxièmement, c’est de condamner énergiquement ces assassinats. Au niveau du parti l’UDRG, nous sommes entièrement avec les victimes de ces massacres. Au niveau des opposants embastillés aujourd’hui, le président Bah Oury l’a clairement dit et de façon officielle, nous sommes du côté de l’UFDG dans ce combat.

Dans un pays démocratique, on n’emprisonne pas ses opposants. On les laisse parler et proposer et puis, on les attaque sur le terrain des idées, pas sur le terrain physique ou existentiel. Mais, Alpha Condé est en fin de règne. Et vous savez que la fin d’une dictature est toujours féroce, toujours sanglante. C’est à ça qu’on assiste aujourd’hui en Guinée…

Mais, embrigader les leaders de l’UFDG est une menace pour la démocratie guinéenne et une menace pour l’existence de notre pays parce que ça va pousser les uns et les autres à se radicaliser. Et, un peuple radicalisé, c’est un peuple prêt à tout.

Guineematin.com : quelle sont vos relations avec les autres partis politiques guinéens existant en France ?

Thierno Chérif Diallo : nous avons des rapports cordiaux. Nous au niveau de l’UDRG, aucun parti politique de l’opposition guinéenne n’est notre adversaire. Que ça soit l’UFDG, l’UFR, le PEDN ou les autres partis de l’opposition. Personne n’est dans la ligne de notre parti. Notre combat s’oriente contre un système. Même la personne du président Alpha Condé ne nous intéresse pas. Nous nous battons contre un système qui a paupérisé tout un pays. Aujourd’hui, c’est un clan de 300 personnes au maximum qui bénéficie des richesses nationales.

Dans ce clan, il y a toutes les ethnies. Il n’y a pas qu’une seule ethnie qui profite. C’est une oligarchie de 300 personnes au maximum qui profite. On est contre ce système. Dans un pays comme le nôtre, chacun devrait bénéficier des richesses nationales. Mais, c’est scandaleux que la majorité des populations soit mise de côté. Donc, nous nous battons contre ce système et dans ce combat, nous partons avec tous les partis qui ont compris que le système, c’est celui-là l’ennemi, pas une communauté ou une personne.

Guineematin.com : votre mot de la fin ?

Thierno Chérif Diallo : je vais remercier Guineematin.com pour l’opportunité que vous offrez à la section UDRG de Paris de s’exprimer sur vos colonnes. Et, je souhaiterais lancer un message à tous les partis de l’opposition et à tout le peuple de Guinée pour dire que l’UDRG est un parti qui arrive avec une dynamique pour appuyer. Nous ne sommes pas en train de dénigrer, nous ne dénigrerons pas un leader. Nous sommes venus appuyer afin de faire face aux défaillances actuelles. Dans ce combat, nous aurons besoin de tous les leaders de l’opposition et c’est un combat pour la survie de la Guinée. C’est un combat pour la dignité des Guinéens et dans ce combat, l’UDRG ne fera pas défaut.

Entretien réalisé par Alpha Assia Baldé pour Guineematin.com

Tél : 622 68 00 41

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