Burkina Faso : le Balai Citoyen dénonce le 3ème mandat d’Alpha Condé et réitère son soutien au FNDC

Kinda Eric Ismaël, porte-parole du Ballet Citoyen
Kinda Eric Ismaël, porte-parole du Ballet Citoyen

Kinda Eric Ismaël, porte-parole du Balai Citoyen, une organisation de la société civile burkinabè à l’origine du mouvement qui a chassé Blaise Compaoré du pouvoir en 2014 a accordé une interview à l’envoyé spécial de Guineematin.com à Ouagadougou. Dans cet échange enregistré hier, mercredi 25 novembre 2020, le porte parole du Balai Citoyen s’est exprimé sur le double scrutin burkinabè ; mais, aussi sur la situation sociopolitique de la Guinée où Alpha Condé a réussi à se maintenir à la tête du pays en changeant la constitution du pays.

Décryptage !

Guineematin.com : le dimanche dernier, 22 novembre 2020, le peuple burkinabè s’est rendu aux urnes pour élire le futur président et les 127 députés de l’Assemblée nationale. Avec quel œil le balai citoyen a observé ces élections ?

Kinda Eric Ismaël : Je pense qu’il faut se féliciter du fait que ces élections aient pu avoir lieu dans un contexte sécuritaire assez difficile, parce que ce n’était pas évident. Il faut donc saluer l’ensemble des burkinabè pour leur sens élevé du civisme. Ils sont sortis aller accomplir leur devoir civique ; et, ça, c’est un fait positif à relever. Toutefois, ces élections n’ont pas été parfaites, loin s’en faut. Il y a eu beaucoup de défaillances. Ces défaillances ont été dénoncées par l’opposition. Les mêmes défaillances ont été relevées par l’ensemble de la société civile. Mais, comme vous le savez, dans les pays africains, il y a toujours de problèmes quand on organise des élections. Si ce ne sont pas les fraudes qu’on dénonce, ce sont des problèmes logistiques.

Guineematin.com : Selon les tendances, le président sortant et candidat à sa propre succession, Roch Mark Christian Kaboré, semble en passe d’être réélu pour un deuxième mandat. Une fois cela fait, est ce que vous avez le sentiment qu’il sera tenté un jour de changer la constitution pour s’éterniser au pouvoir puisque c’est devenu une coutume en Afrique de l’Ouest.

Kinda Eric Ismaël : Au regard de l’histoire politique récente du Burkina Faso et au regard des récents événements qui se sont passés dans notre pays, ainsi que l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014 (A l’époque le peuple burkinabè dans son ensemble a refusé un troisième mandat. Il a empêché le président Blaise de tripatouiller la constitution pour pouvoir jouir d’un pouvoir à vie) ; donc, au regard de tout cela, il ne me vient même pas à l’idée que celui qui va être probablement reconduit, Roch Mark Christian Kaboré, puisse envisager un jour réviser la constitution pour briguer un troisième mandat. Cela dit, nous sommes des humains et nous pouvons faiblir, il faut partir sur cette réalité pour rester sur nos gardes. Il ne faut pas dormir, nous devons rester sur nos gardes. C’est pour cette raison que nous ne baisons pas la garde, nous continuons à cultiver la vigilance.

Guineematin.com : Puisqu’on parle de troisième mandat, en Guinée, Alpha Condé a changé la constitution pour s’offrir un troisième mandat contesté par une partie de la population. De quel œil suivez-vous l’actualité guinéenne ?

Kinda Eric Ismaël : Il est clair que les citoyens burkinabè qui ont bravé la mort, les dangers possibles pour empêcher cela dans notre pays, il est clair que nous, on ne peut pas cautionner le troisième mandat. Nous avons dénoncé à travers les écrits, les actions, le projet de troisième mandat d’Alpha Condé et celui d’Alassane Ouattara. Nous allons continuer parce que ce sont des mandats de trop, ce sont des mandats antidémocratiques ; et, aujourd’hui, nous réaffirmons cela avec force. Le troisième mandat d’Alpha Condé est une forfaiture. On sait dans quelles conditions les textes ont été tripatouillés pour lui permettre de briguer un troisième mandat. Cela dit, nous nous sommes au Burkina Faso, il appartient au peuple guinéen, de s’assumer. Nous n’avons pas de leçons à donner à qui que se soit. Chaque peuple doit s’assumer, chaque peuple doit pouvoir écrire les pages de son histoire.

Guineematin.com : Il y a une structure appelée également balai citoyen en Guinée, entretenez vous des liens avec elle ?

Kinda Eric Ismaël : Oui, il faut dire que c’est un lien de fraternité, un lien de camaraderie. Pratiquement, nous partageons la même vision. De ce point de vue, tout ce qui arrive au guinéen, tout ce qui arrive à nos frères guinéens nous concerne directement. Il n’y a pas de secret sur bien des points. Au plan politique, nous parlons du même langage et il n’y a pas que le ballet citoyen guinéen, les organisations de la société civile africaines, nous essayons de travailler à mettre en place un réseautage pour pouvoir partager des expériences, définir des stratégies communes.

Guineematin.com : Pensez-vous qu’en Guinée le front national pour la défense de la constitution (FNDC) a échoué dans son combat d’empêcher Alpha Condé de s’offrir un troisième mandat ?

Kinda Eric Ismaël : Nous suivons l’actualité guinéenne ; mais, je ne pense pas que je puisse répondre à la place du FNDC, puisque nous sommes seulement à quelques semaines de la réélection entre griffe d’Alpha Condé. Nous considérons que ce n’est pas totalement fini, puisque le FNDC est toujours en lutte. Nous suivons ça de très près, nous sommes résolument contre tout troisième mandat.

Guineematin.com : Avec l’expérience que vous avez, quel conseil donneriez-vous au FNDC ?

Kinda Eric Ismaël : Ecoutez, le FNDC est composé de partis politiques ; et, nous, nous ne prenons pas faits aux causes des partis politiques ; mais, quand il s’agit d’une organisation de la société civile qui partage les mêmes convictions que nous, nous nous affichons clairement et directement. Donc, par rapport aux luttes du FNDC, nous ne pouvons dire que si c’est une lutte pour la démocratie, nous souhaitons bon vent et beaucoup de courage au FNDC dans sa lutte pour l’enracinement de la démocratie en Guinée et un peu partout en Afrique.

Guineematin.com : Votre dernier mot ?

Kinda Eric Ismaël : Mon dernier mot, c’est de dire merci à Guineematin.com pour l’occasion que vous nous offrez de nous exprimer sur bien de questions. Saluer également tous nos frères Guinéens. Nous voulons leur dire aussi que le ballet citoyen leur apporte un soutien indéfectible dans leur quête de liberté et de vraie démocratie.

Interview réalisée par Abdoulaye N’koya SYLLA, envoyé spécial de Guineematin.com à Ouagadougou

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