Interdiction du symposium de Roger Bamba : « on se trompe de combat » (Me Labilé Koné)

Me Koné Aimé Christophe Labilé, président de l'ONG avocats sans frontières de Guinée
Me Koné Aimé Christophe Labilé, président de l’ONG avocats sans frontières de Guinée

Le refus des autorités guinéennes de permettre à l’UFDG de tenir le symposium de Roger Bamba au palais du peuple et à la maison des jeunes de Ratoma continue de susciter des réactions. Maître Aimé Christophe Labilé Koné, président de l’ONG Avocats Sans Frontières, s’est prononcé sur la question dans un entretien qu’il a accordé à un journaliste de Guineematin.com, ce mardi 5 janvier 2021. Il dénonce une « violation » et un manque de respect pour la mémoire de l’opposant, décédé à la maison centrale de Conakry où il était détenu depuis trois mois sans avoir été jugé.

 

« Nous sommes africains et nous honorons nos morts. Nous avons l’habitude de faire des funérailles dignes de nom à la hauteur de la personne décédée. Maintenant, il appartient naturellement aux parents biologiques et aux proches de choisir le lieu du symposium. Le palais du peuple est un palais pour le peuple de Guinée. Pour y accéder, il y a naturellement des conditions : il y en a à qui on peut donner gratuitement pour qu’ils puissent mener des activités et d’autres à qui on loue. Alors, tous les citoyens devaient avoir la possibilité de louer ce palais-là pour telle ou telle activité.

 

Si on refuse cela à quelqu’un, j’aimerais bien connaître les raisons qui ont motivé cette décision. Parce que si c’est un refus catégorique, c’est une violation. C’est la même chose pour la maison des jeunes de Ratoma, qui a également été refusée à l’UFDG pour la tenue du symposium de Roger Bamba. Si cela est fait tout simplement parce que c’est un membre de l’UFDG, opposant au régime en place, je crois qu’on se trompe de combat. Les partis politiques doivent pouvoir accéder à nos lieux publics », rappelle l’avocat et activiste des droits de l’homme.

 

Avant d’avoir la version officielle sur cette situation, Me Labilé Koné estime que la décision des autorités est motivée tout simplement par la peur. « Je crois qu’il y a une peur. On a peur que quand les opposants se réunissent quelque part, qu’ils parlent du mal de ce gouvernement. Je crois que la raison fondamentale qui pousse ceux qui ont l’autorité sur ces lieux-là à refuser systématiquement, c’est parce que les organisateurs ont la coloration politique d’opposants. Pourtant, ça ne devrait pas être ainsi. Quand on est dans une démocratie, il faut être prêt à tout entendre. Entendre tous ceux qui sont pour ou contre. C’est ce qui équilibre la balance de la démocratie », a-t-il dit.

 

Pour le président de l’ONG Avocats Sans Frontières, au lieu d’interdire la tenue du symposium de Roger Bamba, les autorités devraient plutôt s’atteler à faire la lumière sur les causes de sa mort en prison. « Ceux qui nous dirigent, s’ils sont saints dans cette affaire, ils devaient vraiment chercher à établir quelle est la vraie cause de la mort de M. Roger Bamba. Parce que le doute va toujours planer sur cette mort-là. Alors, tout ce qui pouvait nous aider à lever ce doute-là, ça devait être une autopsie pour faire la lumière sur l’affaire », a dit l’activiste des droits de l’homme.

 

A noter que face au refus des autorités de lui autoriser l’accès du palais du peuple et de la maison des jeunes de Ratoma, l’UFDG a finalement annulé le symposium de Roger Bamba. Après la levée du corps, prévue vendredi à l’hôpital Ignace Deen de Conakry, la dépouille de l’opposant sera transportée à Lola, où il sera inhumé dimanche.

Mohamed DORÉ pour Guineematin.com

Tel: +224 622 07 93 59

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