Nouvelle taxe téléphonique en Guinée : quels impacts sociaux-économiques ?

Kaba Mamadi, Consultant en digitalisation, NTIC, TELECOM
Kaba Mamadi, Consultant en digitalisation, NTIC, TELECOM

C’est en 2017 que l’Assemblée nationale guinéenne a donné son approbation pour la mise en place d’une taxe dite « taxe d’Interconnection » dont le montant prélevé est de 20 francs guinéens par minute sur les appels inter-opérateurs. La même année, un arrêté d’application ministériel a été signé afin d’acter cette décision des élus du peuple.

Quelle est donc cette nouvelle taxe qui crée des polémiques dans la cité ?

Il y a peu, un nouvel arrêté ministériel vient modifier celui de 2017 et donnant le droit à l’Etat de non seulement facturer la taxe d’Interconnection inter-réseaux dite « Off-net » mais aussi une autre taxe du même montant sur les appels au sein d’un même réseau « On-net ».

La bonne nouvelle pour le dernier consommateur est que cette nouvelle charge fiscale sera exclusivement prise en charge par les opérateurs !

Alors quelles sont les conséquences sociales et économiques de cette nouvelle assiette fiscale sur le secteur des télécommunications ?

Pour répondre à cette question, il faut rappeler que le marché des télécommunications guinéen est largement dominé et dompter par un seul opérateur qui représente plus de 60% dudit marché. Alors les conséquences immédiates de cette nouvelle taxe est la création d’un environnement fiscal insupportable par les opérateurs les plus faibles. A rappeler qu’il y a peu, le pouvoir public ferma les locaux d’un des opérateurs pour non acquittement de ces obligations fiscales.

Si la charge fiscale actuelle peine à être payée par certains opérateurs, sera-t-il judicieux d’en imposer plus ? Comme le dit les experts en fiscalité, trop d’impôt tue l’impôt !

En parlant des conséquences, une pression fiscale insupportable peut entrainer la suppression des emplois mais aussi la liquidation ou la fermeture des portes d’une société. Il n’est point à rappeler les conséquences de la liquidation ou de la fermeture d’une société téléphonique sur les emplois et par conséquent sur le bien être d’une tranche de la société.

A en croire les spécialistes en économie, l’économie guinéenne est certe résiliente mais reste très fragile avec un déficit budgétaire conséquent. Bref, les dépenses de l’Etat sont largement supérieures à son budget et sa capacité de mobilisation de ressources.

A mon avis, la création d’une assiette fiscale et le choix de l’assiette est le droit de tout Etat !

Cependant le choix de l’assiette fiscale au sein de la téléphonie mobile n’est pas à mon avis le meilleur de tous. Je suppose que la taxe sur la téléphonie mobile en Guinée est saturée.

D’une analyse personnelle du secteur, je propose avec conviction qu’il sera judicieux et plus juteux pour l’Etat de se tourner vers la nouveauté dans le secteur qui est le Mobile Money en particulier et la transaction électronique en générale. Cette partie du secteur est aujourd’hui une mine d’or exploitée et à exploiter par les Etats africains comme signaler dans l’un de mes articles précédant dédié à cet effet. Voir : https://guineematin.com/2020/12/14/mobiles-money-une-aubaine-a-exploiter-par-letat-en-guinee/

En parlant des causes de cette nécessité de taxe, j’aimerai humblement signaler qu’elles sont macro-économiques et non rien à avoir avec les investissements en infrastructures de l’Etat dans le secteur des télécommunications. Il est à rappeler que les deux investissements majeurs à savoir le câble sous-marin et la dorsale à fibre optique sont des investissements gérés par des sociétés anonymes S.A commerçant exclusivement qu’avec les opérateurs et dont les revenus sont partagés entre l’Etat et ses actionnaires. Ils ne peuvent en aucun cas être la cause d’une nécessité de taxation.

Kaba Mamadi, Consultant Spécialiste en Digitalisation et Télécommunications

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