Guinée : qui pour conduire la transition ?

Colonel Mamady Doumbouya

Aujourd’hui, cinquième jour de la chute du régime Alpha Condé, le débat est de plus en plus porté sur les tractations pour la composition du gouvernement de transition devant permettre à la Guinée de tourner définitivement la page sombre de ces onze dernières années. À la différence de la transition de 2010, cette année, la classe politique est orpheline d’un acteur qui fut incontournable durant les dernières décennies. Un certain Alpha Condé qui, par le passé, a su manipuler tout le monde pour arriver à ses fins.

C’est grâce à la lutte menée par la classe politique et la société civile depuis le début des années 90 que l’opposant historique a réalisé sa consécration. Et c’est parce qu’il a foulé sous le pied l’idéal pour lequel certains guinéens lui ont accordé leur confiance qu’il a reçu une humiliation sans égale et est privé de liberté depuis le 5 septembre 2021.

L’arroseur étant désormais arrosé, la Guinée est à nouveau à la croisée de chemins. Elle doit une nouvelle fois envisager son avenir et son devenir. Dans l’immédiat, l’urgence est la composition de l’équipe gouvernementale devant remettre le pays sur les rails. De cette composition dépendra les autres processus : mise en place d’une nouvelle constitution, une nouvelle CENI, un nouveau fichier électoral et enfin l’élection d’un président de la République.

Pour le moment, il est illusoire de penser que la mise à l’écart d’Alpha Condé est une fin en soi. Seul le président est parti. Le système, lui, reste intact. Ce système sans scrupule et immoral doit être combattu. Avec lui, tous ceux qui l’incarnent. Ceux qui pensent que la politique est synonyme de mensonge, de la duplicité et de la trahison et de toutes les choses négatives. Alors que la politique c’est tout sauf cela. La politique n’est rien d’autres que la GESTION DE LA CITÉ.

Ces dernières années, les hommes caméléons (opposants le matin et partisans le soir) ont perverti la noble politique. Faisant croire à la jeune génération que le bon et meilleur politique est celui qui est dépourvu de la morale et de convictions. Une nouvelle implication de ces hommes dans la gestion de la très digne et très respectée REPUBLIQUE encouragerait et pérenniserait la perversion de l’Etat guinéen.

C’est pourquoi, le choix des hommes et des femmes devant conduire la nouvelle transition sera déterminante. La Guinée ne peut pas se permettre de commettre l’erreur que les Maliens ont commise en écartant l’auteur du coup d’Etat dans la conduite de la transition. Avec le colonel Mamady Doumbouya comme président de la transition, son Premier ministre devrait être une personnalité intègre, reconnue pour son patriotisme et sa neutralité. Par exemple, Khalifa Gassama Diaby, ministre de la Citoyenneté et de l’Unité nationale, qui fait partie du trio qui a préféré le pays à l’intérêt égoïste. Ceux qui ont osé démissionner pour marquer leur désaccord dans la façon dont le pays était géré. Les deux autres sont Cheick Sacko et Abdoulaye Yéro Baldé. Le critère de choix de Diaby serait double : son intégrité comme indiqué ci-haut mais aussi ses compétences. L’autre atout que l’homme possède est qu’il est issu d’une minorité ethnique. Donc, censé être neutre.

Khalifa Gassama Diaby, ancien ministre de la Citoyenneté et de l’Unité nationale

Le duo Doumbouya et Diaby pourrait être renforcé par des militaires et des civiles tout aussi reconnus pour leur intégrité, leur patriotisme et leurs compétences. S’il est impossible de donner quelques noms dans l’armée, en revanche, pour les civils, beaucoup de cadres sont connus parce qu’ils se sont illustrés durant la crise consécutive au troisième mandat. Des cadres qui ont renoncé aux avantages et privilèges. Mais aussi ont résisté à toutes les pressions politiques, économiques et même communautaires. Ils ont mis la Guinée avant tout.

Au sein de la société civile, on peut citer entre autres Abdourahmane Sano, Sékou Koundouno, Ibrahima Diallo, Oumar Sylla dit Foniké Mengué et beaucoup d’autres. Ou encore l’ancien bâtonnier Me Mohamed Traoré. Lequel pourrait être un bon ministre de la Justice. Outre son profil de juriste compétent, il s’est illustré dans le combat pour la démocratie et l’Etat de droit en Guinée. Et que dire de cas cadres de l’ancien parti présidentiel qui ont eu l’audace -et même la témérité- d’être seul contre tous en s’opposant au troisième mandat. Comme le cas d’Ismail Condé qui fut l’exception qui confirme la règle.

A l’opposé de ces valeureux fils de Guinée, qui font fierté de leur pays, il faut écarter tous ces opportunistes sans foi ni loi qui considèrent que la politique est un jeu de dupes.  Ils sont opposants le matin et partisans le soir. Sans scrupules, ces hommes caméléons sont connus de tous les Guinéens.

Habib Yembering Diallo pour guineematin.com

Facebook Comments Box