Contribution à la gestion de la transition, à l’attention du Comité National pour le Rassemblement et le Développement

Libre Opinion (Par Sény Facinet Sylla, Ancien Secrétaire Général Adjoint des Affaires Religieuses) : L’après 5 septembre 2021 ne mérite pas qu’on ouvre la boîte de pandore sur les maux dont souffre la Guinée et les mesures à prendre pour les éradiquer. Le pays vient de loin, de très loin. Le diagnostic est clairement posé de longue date. Nulle controverse là dessus; le syndrome consiste au clientélisme chronique dû au virus du présidentialisme qui a caractérisé la gouvernance dans le pays, de son indépendance à nos jours. On pourrait même dire un hyper présidentialisme lui-même entretenu par un ethnicisme à outrance.

L’instrumentalisation de la croyance « Dieu donne le pouvoir et le retire à volonté » chez des populations de faible culture démocratique d’une part, et de l’autre l’immoralité soldée par la démission d’une bonne frange de l’élite intellectuelle face au devoir de loyauté au peuple plutôt qu’au « président »; ces deux travers ont entraîné la sacralisation de la fonction présidentielle dans le subconscient du guinéen. Il en a résulté un terreau fertile pour les présidents qui se sont pris pour des  » petits dieux » pour outrancièrement abuser du peuple.

L’appel à ne pas ouvrir la boîte de pandore n’est pas l’expression d’une volonté de précipitation. Loin s’en faut ! Il signifie juste que le mal guinéen est déjà connu. On ne saurait mieux le décrire que dans l’argumentaire justificatif de la prise du pouvoir du Colonel Doumbouya le 5 septembre 2021. 

La thèse philosophique « Tout est dit et nous venons trop tard. Depuis plus de sept mille ans il y a des hommes et qui pensent » sied bien à ce propos.

La thérapie pour juguler le cancer est également bien connue. Le package du protocole sanitaire comporte trois éléments : 

1- La préparation d’un texte constitutionnel propre, susceptible de cadrer dignement la vie et le développement personnel du guinéen ainsi que le progrès harmonieux du pays dans un environnement de compétitivité internationale. Les questions cruciales de l’hyper présidentialisme et de l’ethnicisme exacerbée devraient trouver une réponse appropriée dans ce document. A cet égard, sont à explorer les pistes de passage du régime présidentiel au parlementaire, de la limitation du nombre de partis politiques à deux, le temps d’asseoir un minimum de culture démocratique au niveau des populations, de la gestion des élections par le Gouvernement à travers son Département de l’intérieur.

2- La création d’institutions fortes en nombre raisonnable, capables de favoriser la mise en oeuvre des objectifs de respect des droits humains et de développement socioéconomique, culturel et spirituel prescrits dans la Constitution.

3- La formation d’une équipe gouvernementale resserrée de femmes et d’hommes de haute compétence et de bonne moralité en vue d’organiser le référendum constitutionnel et des élections générales propres à venir dans un délai raisonnable. Une période d’environ 18 mois devrait suffire à exécuter ces tâches.

On ne peut pas dénier de l’intérêt au ballet de consultation en cours. Cependant on doit questionner sa pertinence au regard de la documentation profuse disponible sur la situation sociopolitique du pays. Aussi, la présence constatée de certaines têtes indésirables, au niveau notamment des partis politiques et de la Société Civile est sujet à questionnement. »Chat échaudé craint l’eau froide » dit – on.

Il n’est pas acceptable même au nom de l’inclusivité que ce forum donne l’occasion à des personnes de mauvais aloi de se refaire de la virginité sur l’échiquier autant politique que social. Les chantres et les artisans du coup d’Etat constitutionnel et du 3ème mandat qui ont précipité le pays dans le mur et occasionné l’intervention militaire, sont légion aux concertations. Cela n’est pas sans choquer de très nombreuses consciences. 

Il ne faut pas oublier que le fameux double scrutin référendaire et législatif et la mascarade présidentielle de 2020 ont arraché des dizaines de vie à notre vaillante jeunesse. Ils ont provoqué des centaines de blessés, parmi lesquels des handicapés à vie. De nombreux citoyens ont été privés de leur liberté en raison de leur opinion. D’autres ont été contraints à l’exil. D’importants biens publics et privés ont été détruits. Les acteurs de ces atrocités, s’ils ne sont pas encore derrière les barreaux, ne doivent être autorisées á narguer leurs pauvres victimes. Ces exactions ĺà, on peut peut-être les pardonner un jour, mais la mémoire collective les enregistre à jamais pour l’histoire.

Enfin, compte tenu des attentes et des sollicitations fortes et nombreuses des populations et des moyens disproportionnés pour y faire face, il est souhaitable qu’en lieu et place d’une Assemblée de transition comme on pourrait s’y attendre, il soit créée une équipe restreinte de contitutionnalistes chevronnés chargés de toiletter la Constitution de 2010. Cela soulagera grandement nos maigres finances et on y gagnera en temps, en énergie.
« En vérité, Dieu ne modifie pas les conditions d’un peuple tant que les individus qui le composent ne modifient pas ce qui est en eux-mêmes ». Saint Coran 13/10.

En clair, lorsqu’une communauté se fixe un objectif et déploie des efforts pour y parvenir, Dieu lui en facilite l’atteinte. Il est imploré à soutenir l’effort de changement engagé par le Comité National pour le Rassemblement et le Développement et à faciliter l’instauration de l’Etat de droit en Guinée pour son développement.

Aameen !!!

Sény Facinet Sylla

Ancien Secrétaire Général Adjoint des Affaires Religieuses

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