Guinée : les 16 Premiers ministres des 6 Présidents en 63 ans

Mohamed Béavogui, nouveau Premier ministre
Mohamed Béavogui, nouveau Premier ministre

Le 6ème président de la République de Guinée, le colonel Mamady Doumbouya, a nommé, le 6 octobre 2021, le 16ème Premier ministre de la Guinée. Mohamed Béavogui sera installé au palais de la Colombe dans la matinée de ce vendredi, 08 octobre 2021.

En attendant, Guineematin.com vous propose de revenir sur les rapports de force entre les Présidents de la République et les Premiers ministres en 63 ans d’indépendance.

Saïfoulaye Diallo et Luis Lansana Béavogui furent les Premiers ministres d’un président tout puissant, omniprésent et omnipotent. Le responsable suprême de la révolution était si puissant que ses Premiers ministres étaient de simples figurants. Ils lui obéissaient à la dimension de sa personnalité. 

A la disparition de Sékou Touré, le colonel Lansana Conté choisit un autre colonel pour en faire son tout premier Premier ministre ! Diarra Traoré, pour ne pas le nommer, a vite fait de l’ombre à son président. Celui-ci se débarrasse de lui et le nomme ministre de l’Education. Très rapidement, la divergence et la concurrence entre les deux tournent au drame après la tentative de coup d’Etat de juillet 1985. Pour la première fois un ancien Premier ministre est exécuté en République de Guinée. 

Onze après la disparition de son premier Premier ministre dans des conditions jamais élucidées, Lansana Conté est contraint par les partenaires étrangers à se trouver un nouveau Premier ministre. Et ce après la mutinerie qui a failli lui coûter son fauteuil. Le choix porte alors sur Sidya Touré. Inconnu des Guinéens, il devient à la fois Premier ministre, ministre des Finances et du Plan. Ce cumul de ses fonctions et ses premières mesures économiques d’une rigueur jusque-là inconnue apportent de l’eau au moulin à ses détracteurs. 

Les thuriféraires du régime mettent en garde le président Conté : s’il ne prend garde, son Premier ministre pourrait prendre sa place. La réaction de l’officier ne se fera pas attendre : Sidya Touré perd l’essentiel de ses prérogatives. Il restera néanmoins en poste pendant 3 ans, avant d’être limogé. 

Après le limogeage de Sidya, Lansana Conté, devenu général de l’Armée, nomme un fidèle parmi les fidèles : maître Lamine Sidimé. Contrairement à Sidya Touré, le célèbre juriste et ancien Premier président de la Cour suprême, obéira fidèlement au général-président. 

Malgré tout, et devant les pressions des bailleurs de fonds, le président Conté se sépare de son fidèle ami. Lamine Sidimé est remplacé par François Louncény Fall. Pas pour longtemps. Quelques mois seulement après sa nomination, Fall crée un précédent, un véritable séisme politique : il profite d’un séjour à l’étranger pour annoncer sa démission. Beaucoup de choses ont été citées comme motifs de cette démission que certains expliqueront même par des « affaires » intimes…

En tous les cas, pour l’opinion publique, cette démission a été perçue comme un camouflé pour le général-président. Elle a également mis à nue la mal gouvernance qui avait atteint des proportions jamais égalées. Les amis et les proches du président ont alors commencé à accentuer leurs regards sur la gestion du pays. On disait du chef de l’Etat qu’il pouvait dire une chose le matin et son contraire le soir. 

Après le départ de François Fall, le général Conté a marqué une pause, observé avant de jeter son dévolu sur un de ses fidèles parmi les fidèles : Cellou Dalein Diallo. Une nomination qui a suscité la jalousie de certains de ses amis et proches, promettant de rendre la vie invivable au nouveau Premier ministre. Dalein fera les frais du clan formé autour du président avant d’être renvoyé en 2006 « pour faute lourde ». 

C’est suite à cela que Fodé Bangoura, alors ministre secrétaire général de la présidence de la République, deviendra l’homme fort du pays avec le titre de ministre des Affaires présidentielles. Certains l’appelleront tout simplement « le petit président ».

Le petit président engagera finalement un bras de fer avec ses amis d’hier, créant un front contre certains Premiers ministres dont Cellou Dalein. Deux des amis du président se retrouvent à la Maison centrale de Conakry pour corruption et détournement de derniers publics. Ce qui, pour le chef de l’Etat, est inacceptable. Surpris par cette décision de Fodé Bangoura, Lansana Conté ira personnellement à la maison centrale de Coronthie pour faire sortir de prison Mamadou Sylla « Futurelec » et Fodé Bangoura, vice-gouverneur de la BCRG.

Beaucoup de vacarme sera alors enregistré dans la pays. Fodé Bangoura sera d’ailleurs accusé d’avoir manipulé des leaders syndicaux contre le chef de l’État. En tous les cas, cette affaire a été prise comme le meilleur exemple que la Guinée n’était plus un État de droit ! Pour la classe ouvrière, le président avait franchi le Rubicon. D’où les manifestations sociales de janvier et février 2007, qui finiront par l’exigence, entre autres, de la nomination d’un nouveau Premier ministre. Le président Lansana Conté reculera pour mieux sauter, en faisant semblant de lâcher du lest, en nommant Eugène Camara comme Premier ministre. Considéré comme un proche du général, il est rejeté par la population. Ce fut le Premier ministre dont le règne a été le plus court dans l’histoire de la Guinée.

Le général Lansana Conté cédera finalement pour de vrai devant la pression populaire en nommant Lansana Kouyaté à la Primature. Celui-ci sera bien accueilli. Mais, l’état de grâce sera de courte durée. Le président continue à régner d’une main de fer. Devant l’absence des résultats de Kouyaté, le limogeage de celui-ci ne suscitera aucune réaction populaire. Retour à la case départ. Un autre homme du sérail montera à la Primature : Ahmed Tidiane Souaré restera en poste jusqu’à la disparition du deuxième président de la Guinée indépendante, le 22 décembre 2008.

Le capitaine Moussa Dadis Camara réussi son putsch contre le défunt le 23 décembre et prend le rênes du pays. Il choisira Kabinet Komara comme Premier ministre. Le capitaine est visiblement complexé par le parcours et l’expérience de son Premier ministre. Il estime que celui-ci bénéficie des avantages et privilèges d’un pouvoir pour lequel il ne s’est pas battu. Rappelant à tout bout de champ que c’est lui et ses lieutenants qui ont pris le risque du coup d’État devant les généraux pour prendre le pouvoir. 

Kabinet Komara s’est tue et est resté poli jusqu’au bout. Malgré la gravité des crimes du 28 septembre 2009, personne n’a pointé un doigt accusateur sur le taciturne Premier ministre. Suite, au départ du capitaine Moussa Dadis de la Guinée et du pouvoir, et la désignation de Sékouba Konaté comme président de la Transition, feu Jean Marie Doré a été choisi pour devenir Premier ministre de la transition, en janvier 2010. 

Après la présidentielle de fin 2010, remportée par Alpha Condé, l’ancien opposant historique a nommé Mohamed Saïd Fofona à la Primature. Cette nomination d’un cadre du ministère du commerce, jusque-là inconnu du grand public, a été l’aboutissement des tractations politico-communautaires. 

Celui qu’on appelait l’imam sera remplacé par un autre ressortissant de Forécariah. Mamadi Youla restera en poste jusqu’à la nomination d’Ibrahima Kassory Fofana, qui a accompagné le président Alpha Condé au troisième mandat. Lequel troisième mandant aura été fatal aux deux hommes. 

Habib Yembering Diallo pour Guineematin.com

Téléphone : 664 27 27 47

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