Guinée : un modèle de gouvernance qui garantit l’alternance au sommet de l’Etat

Mamadou Baïlo Kéita, journaliste
Mamadou Baïlo Kéita, journaliste

Opinion : Depuis le 05 septembre dernier, la Guinée écrit une nouvelle page de son histoire de nation indépendante. Le peuple se berce d’espoir avec les valeurs (rectification institutionnelle, refondation de l’Etat, rassemblement, redressement et repositionnement) que prône le CNRD à tout bout de champ. Et, apparemment, tout semble aller, pour l’instant, comme dans le meilleur des mondes possibles. Mais, l’un des plus grands défis de cette nouvelle ère de la Guinée reste à trouver les moyens, les instruments et la garantie d’une alternance démocratique au sommet de l’Etat. Car, aussi longtemps que l’on se souvienne, l’alternance à la magistrature suprême du pays a toujours été un épineux problème jamais résolu par les Guinéens. La présidence à vie a quasiment été érigée en règle par les dirigeants.

Pourtant, depuis 1958, la Guinée, dans son ardent désir d’émancipation et d’émergence économique, a expérimenté plusieurs modèles de gouvernance. Mais, jusque-là, le pays n’a réussi qu’à fabriquer des dictateurs qui asservissent à volonté le peuple.

Le socialisme sous Sékou Touré, avec un parti État fort, a conduit à d’immenses dérives dont les séquelles sont encore vivaces dans les esprits. Le camarade révolutionnaire a régné 26 ans sans aucun partage. Il est mort au pouvoir sans avoir préparé la succession au sommet de l’Etat.

Egalement, le libéralisme sous Lansana Conté a fait sombrer la Guinée dans la corruption, le détournement, la dilapidation des deniers publics et bien d’autres maux. L’instauration du multipartisme n’a pas servi à grand chose. Le président général a régné pendant 24 ans sans partage. Il n’a perdu aucune élection (selon les résultats officiels) et n’a jamais daigné céder son fauteuil, en dépit de sa santé déclinante dans ses dernières années de vie. 

Avec l’avènement d’Alpha Condé au pouvoir en 2010, on a pensé que les choses allaient changer, surtout avec une constitution qui limite à deux le nombre de mandats présidentiels. Malheureusement, l’opposant historique s’est laissé corrompre par le pouvoir. En tout cas, il n’a jamais voulu quitter le fauteuil présidentiel de son gré. On ne va pas refaire l’histoire, puisque tout le monde est témoin des acrobaties et de la gymnastique verbale qu’il a utilisées pour tordre le cou au Droit et s’offrir une dictature à la tête de l’Etat. Il a fait virer le pays de la démocratie à la démocrature.

Nous sommes donc condamnés d’apprendre de nos erreurs du passé pour un lendemain prometteur où la culture de l’alternance au pouvoir sera définitivement encrée dans notre système de gouvernance. 

Mais, tout de suite, je précise que la guerre générationnelle (jeunes-vieux), à laquelle se livrent actuellement certains individus qui ambitionnent d’envoyer les vieux au pilori, ne me tente pas. Je suis de ceux qui pensent qu’il est impératif de fédérer l’ensemble des forces de la nation pour réussir à triompher des problèmes endémiques du moment et se projeter durablement dans le futur.

Dans un pays où la corruption est endémique, où les institutions se laissent inféoder, où la résistance et la culture du « NON » n’existent pas devant le chef, il faut trouver un moyen efficace et résistant pour induire une alternance au sommet de l’État.

Tout d’abord, je propose un nombre illimité de mandats pour la présidence de la République. Car, il faut donner la chance à ceux qui ont de bons projets, de la volonté et de l’énergie de continuer à gouverner ce pays pour impulser un développement.

Ensuite, il faudrait que la durée du mandat soit entre 6 à 7 ans. Ceci, pour permettre au président de dérouler tranquillement son programme de développement.

Enfin, il faut interdire systématiquement les mandats consécutifs. Il ne faudrait jamais que quelqu’un fasse deux mandats consécutifs, quels que soient ses exploits à la tête l’État. 

La formule sera donc : le mandat du président de la République est de 7 ans, renouvelable. Mais, en aucun cas et sous aucune forme, il ne peut y avoir deux mandats consécutifs à la présidence de la République.

De ce point de vue, on réglera le problème de l’alternance. Et, nos dirigeants qui aspirent briguer plus d’un mandat présidentiel seront contraints de servir le peuple pour éviter un vote sanction.

Egalement, on aura en même temps résolu le problème d’hommes providentiels à la tête des partis politiques. Car, à travers ce nouveau système, le président d’un parti qui se fait élire à la présidence de la République sera obligé de céder la place à un autre cadre si son parti tient à candidater pour le mandat suivant. Autant dire qu’on fera d’une pierre deux coups.

Enfin, ce nouveau système de gouvernance nous permettrait d’échapper à une politisation et une ethnicisation à outrance de l’administration. Ce qui, naturellement, va permettre à lutter efficacement contre le clanisme et le favoritisme au sein de l’administration publique de notre pays.

Mamadou Baïlo Keïta pour Guineematin.com

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